Imaginez une ville où l’innovation technologique côtoie une discipline de fer, où les rues impeccables cachent un danger insidieux. À Singapour, une nouvelle menace émerge sous la forme de cigarettes électroniques trafiquées, surnommées Kpods, qui contiennent des substances aussi dangereuses qu’inattendues. Ces dispositifs, souvent associés à des saveurs fruitées comme la mangue ou la myrtille, dissimulent des drogues synthétiques, notamment l’étomidate, un hypnotique aux effets dévastateurs. Cette crise, qui touche particulièrement la jeunesse, a poussé les autorités à intensifier leur lutte contre ce fléau, transformant une simple vapoteuse en un enjeu de santé publique et de sécurité nationale.
Une Crise Émergente à Singapour
À Singapour, où la réglementation sur les stupéfiants est parmi les plus strictes au monde, les autorités font face à une montée alarmante de l’usage de cigarettes électroniques contenant des drogues synthétiques. Ces dispositifs, souvent importés illégalement depuis la Malaisie ou vendus via des plateformes comme Telegram, séduisent les jeunes par leurs arômes attrayants et leurs noms évocateurs comme zombie spice ou space oil. Mais derrière cette façade attrayante se cache un danger réel : l’étomidate, une substance qui peut provoquer des hallucinations, des convulsions, voire des issues fatales.
Depuis 2018, Singapour interdit les cigarettes électroniques, mais la récente vague de vapoteuses dopées a conduit à un durcissement des mesures. En septembre 2024, un renforcement de la loi a été instauré, assimilant la détention de ces dispositifs à une infraction liée aux drogues, avec des sanctions lourdes pour les contrevenants.
Un Drame Personnel au Cœur de la Lutte
Pour certains, cette crise est bien plus qu’une question de politique publique. Delfard Tay, un père de famille endeuillé, en est un exemple poignant. En septembre 2024, sa fille Shermaine, âgée de 19 ans, a été retrouvée sans vie au pied de leur immeuble. Pour Delfard, la cause est claire : les Kpods, ces vapoteuses trafiquées, ont joué un rôle dans cette tragédie. Depuis, il s’est engagé dans une campagne pour sensibiliser les jeunes aux dangers de ces dispositifs.
Je partage mon histoire parce que si une seule personne est sauvée des Kpods, la mémoire de ma fille aura servi à quelque chose.
Delfard Tay
Son témoignage a touché les autorités, qui l’ont intégré à une campagne nationale contre le vapotage. À travers des interventions publiques, Delfard met en garde contre les effets dévastateurs de ces produits, décrivant comment ils peuvent voler l’avenir des jeunes. Son message résonne dans une société où la jeunesse est vue comme un pilier de l’avenir.
Les Dangers de l’Étomidate dans les Vapes
L’étomidate, principal ingrédient actif des Kpods, est un hypnotique à action rapide, initialement utilisé en anesthésie. Lorsqu’il est consommé via des cigarettes électroniques, il peut provoquer des effets secondaires graves, allant des troubles de la coordination à des états psychotiques. Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent des adolescents singapouriens errant dans un état second, parfois comparés à des zombies, après avoir vapoté ces substances.
Une vidéo marquante, diffusée en juillet 2025, montre un jeune titubant dans le métro avant de s’effondrer. Une vapoteuse contenant de l’étomidate a été trouvée sur lui, confirmant les craintes des autorités. Ces incidents ont amplifié l’urgence de la situation, incitant Singapour à mobiliser des ressources considérables pour endiguer ce fléau.
Une Répression Sans Précédent
Face à cette menace, Singapour a déployé une réponse musclée. Depuis le 1er septembre 2025, la détention d’une cigarette électronique est passible d’une amende pouvant atteindre 2 000 dollars singapouriens (environ 1 327 euros). Les récidivistes risquent des sanctions plus sévères, y compris des programmes de réhabilitation obligatoire ou, pour les citoyens singapouriens, des coups de canne, une punition traditionnelle dans le pays. Les étrangers, quant à eux, peuvent être expulsés et interdits de territoire à vie.
Infraction | Sanction |
---|---|
Détention de vapoteuse | Amende jusqu’à 2 000 SGD (1 327 €) |
Récidive | Réhabilitation ou coups de canne (citoyens) / Expulsion (étrangers) |
Importation de vapes dopées | Jusqu’à 20 ans de prison |
Revente de vapes dopées | Jusqu’à 10 ans de prison |
Pour appliquer ces mesures, Singapour a mobilisé pas moins de 10 000 fonctionnaires, issus de divers organismes, pour traquer les contrevenants. En seulement trois semaines en septembre 2025, 656 personnes ont été arrêtées pour vapotage, dont 44 en possession de vapoteuses contenant de l’étomidate. Ces chiffres témoignent de l’ampleur du problème et de l’engagement des autorités à l’éradiquer.
Un Marché Illicite en Pleine Expansion
Le commerce des Kpods prospère dans l’ombre, alimenté par un marché noir florissant. Selon une étude d’Euromonitor International, plus de 75 % du volume mondial des cigarettes électroniques provient de circuits illicites. À Singapour, ces produits sont souvent introduits clandestinement depuis la Malaisie, où le vapotage est légal, ou vendus via des canaux numériques comme Telegram. Cette accessibilité rend la lutte contre ces dispositifs particulièrement complexe.
Les autorités craignent que les substances contenues dans ces vapoteuses ne deviennent encore plus dangereuses à l’avenir. Si l’étomidate est déjà un problème, d’autres drogues synthétiques pourraient bientôt apparaître, aggravant la crise. Cette perspective pousse Singapour à maintenir une vigilance accrue et à renforcer ses mesures répressives.
Un Débat sur la Répression
Tous ne partagent pas l’approche ultra-répressive de Singapour. La Coalition des défenseurs de la réduction des méfaits liés au tabac (CAPHRA) argue que les interdictions générales risquent de pousser ce commerce encore plus loin dans la clandestinité, rendant sa régulation encore plus difficile. Selon eux, une approche axée sur la réduction des risques, comme une régulation stricte mais légale du vapotage, pourrait être plus efficace.
Pourtant, pour les autorités singapouriennes, la tolérance zéro est une nécessité. Dans un pays où la consommation de drogue est sévèrement punie, les vapoteuses dopées sont perçues comme une menace directe à l’ordre public et à la santé des citoyens. Cette divergence d’opinions souligne la complexité du problème, entre répression et prévention.
L’Impact sur la Jeunesse
La jeunesse singapourienne est au cœur de cette crise. Les Kpods, avec leurs saveurs attrayantes et leur marketing agressif, ciblent directement les adolescents et les jeunes adultes. Les vidéos virales d’adolescents en détresse après avoir vapoté ont choqué l’opinion publique, renforçant l’urgence d’agir. Les autorités, en collaboration avec des figures comme Delfard Tay, multiplient les campagnes de sensibilisation pour alerter sur les dangers de ces produits.
- Accessibilité : Disponibles sur Telegram ou via des réseaux clandestins.
- Marketing : Noms et saveurs conçus pour séduire les jeunes.
- Conséquences : Hallucinations, convulsions, et risques mortels.
Ces campagnes insistent sur l’idée que les Kpods ne sont pas de simples cigarettes électroniques, mais des vecteurs de substances dangereuses. Les écoles et les centres communautaires sont désormais des lieux clés pour diffuser ce message, avec des programmes éducatifs visant à prévenir l’usage de ces dispositifs.
Vers un Avenir sans Kpods ?
La lutte contre les vapoteuses dopées à Singapour est loin d’être terminée. Si les mesures répressives ont permis de freiner leur diffusion, le marché illicite reste un défi majeur. Les autorités continuent d’investir dans la surveillance, la sensibilisation et la coopération internationale pour couper les filières d’approvisionnement, notamment avec la Malaisie.
Pour des figures comme Delfard Tay, cette bataille est aussi personnelle que collective. En partageant son histoire, il espère non seulement honorer la mémoire de sa fille, mais aussi protéger d’autres familles de la douleur qu’il a vécue. Son message, simple mais puissant, résonne comme un appel à l’action : les Kpods tueront vos rêves.
Alors que Singapour poursuit sa croisade contre ce fléau, une question demeure : la répression suffira-t-elle à éradiquer ce danger, ou faut-il repenser l’approche pour mieux protéger la jeunesse ? L’avenir nous le dira, mais une chose est sûre : la lutte contre les Kpods est devenue une priorité nationale.