Alors que les tensions s’exacerbent entre la Russie et les pays occidentaux, un nouveau front émerge dans les profondeurs de la mer Baltique. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, la sécurisation des infrastructures sous-marines, véritables artères de notre monde interconnecté, est devenue un enjeu majeur pour les pays membres de l’Otan.
Selon un haut gradé de l’Alliance atlantique, la tâche s’avère titanesque au vu de l’étendue du réseau à protéger. Le capitaine Niels Markussen, de la marine danoise, qui dirige le Centre maritime pour la sécurité des infrastructures sous-marines critiques à l’Otan, affirme sans détour qu’il est « impossible de placer un navire sur chaque mille marin de pipeline ou de câble ».
Une vulnérabilité extrême face aux actes de sabotage
Les récents incidents survenus dans la mer Baltique ont mis en lumière la fragilité de ces installations vitales. Plusieurs câbles sous-marins de télécommunications et d’alimentation électrique ont été endommagés ces derniers mois, laissant planer le spectre d’actes de « guerre hybride » orchestrés par Moscou.
Face à cette menace, l’Otan a décidé de réagir en déployant des moyens conséquents dans la région. Navires, avions et drones seront mobilisés pour une durée indéterminée afin d’améliorer la surveillance et la dissuasion. Une petite flotte de drones de surface navals sera notamment mise à contribution.
L’effet dissuasif d’une présence renforcée
Si cette mission de surveillance ne permettra pas d’éliminer tout risque d’incident, elle devrait néanmoins avoir un impact significatif. Comme le souligne le capitaine Markussen, cette présence accrue « apportera beaucoup plus d’attention, de surveillance et donnera une meilleure idée de qui opère là-bas et dans quel but ».
Reste que la tâche demeure immense au vu des moyens dont disposent les éventuels saboteurs. Le responsable de l’Otan rappelle qu’il « existe environ 50 000 gros navires dans le monde susceptibles d’endommager des infrastructures en jetant l’ancre ».
L’ombre du Kremlin plane sur la Baltique
Les soupçons se portent notamment sur l’Eagle S, un pétrolier battant pavillon des îles Cook qui ferait partie de la « flotte fantôme » russe. Ce navire est suspecté par la police finlandaise d’être impliqué dans le « sabotage » de plusieurs câbles fin décembre 2022. L’enquête est en cours, mais il ne fait guère de doute que le Kremlin cherche à déstabiliser cette zone hautement stratégique.
Il existe environ 50 000 gros navires dans le monde susceptibles d’endommager des infrastructures en jetant l’ancre.
– Niels Markussen, responsable Otan
Pour les pays riverains de la mer Baltique, l’heure est à la vigilance extrême. Lors d’une réunion en Finlande, les dirigeants des nations concernées ont discuté des moyens à mettre en œuvre pour renforcer la sécurité dans cet espace maritime vital pour l’Alliance atlantique.
Un bras de fer souterrain qui ne fait que commencer
Au-delà des enjeux de sécurité immédiats, c’est une véritable guerre de l’ombre qui se joue dans les profondeurs de la mer Baltique. En s’attaquant aux infrastructures sous-marines, la Russie cherche à affaiblir et déstabiliser les pays occidentaux qui dépendent de ces réseaux pour leur approvisionnement en énergie et leurs communications.
Face à cette menace asymétrique, l’Otan se doit de riposter et d’adapter sa stratégie. Le déploiement de moyens de surveillance et de dissuasion n’est qu’une première étape. À long terme, il faudra repenser en profondeur la sécurisation de ces infrastructures critiques, en développant de nouvelles technologies et en renforçant la coopération entre alliés.
Car une chose est sûre : dans ce bras de fer souterrain, la bataille ne fait que commencer. Et l’issue de ce conflit invisible pourrait bien déterminer l’équilibre des forces dans la région pour les années à venir.
