Le scandale Wirecard n’en finit pas de révéler ses secrets. Déjà considérée comme la plus grande fraude financière de l’histoire récente en Allemagne, l’affaire prend une nouvelle dimension avec les soupçons d’espionnage qui pèsent sur l’un de ses principaux protagonistes : l’Autrichien Jan Marsalek, en cavale depuis l’éclatement de l’affaire en 2020.
La justice allemande ouvre une enquête sur Jan Marsalek
Selon les informations révélées par le magazine Der Spiegel, le parquet fédéral de Karlsruhe a décidé d’ouvrir une enquête sur les liens présumés de Jan Marsalek avec les services de renseignement russes. L’ancien directeur des opérations de Wirecard, qui s’est volatilisé en juin 2020 au moment où le scandale a éclaté au grand jour, aurait en réalité œuvré pendant une dizaine d’années comme espion au profit de Moscou.
Jan Marsalek se trouverait actuellement à Moscou sous une fausse identité, d’après des enquêtes de médias internationaux.
– Der Spiegel
Wirecard, fleuron déchu de la finance allemande
Fondée en 1999, la société Wirecard était devenue en quelques années un acteur majeur du paiement électronique, au point d’intégrer en 2018 le prestigieux DAX, l’indice phare de la Bourse de Francfort. Mais cette success story a pris fin brutalement en juin 2020, lorsque ses dirigeants ont dû admettre que 1,9 milliard d’euros inscrits dans les comptes n’existaient pas.
Ce “trou” comptable a précipité la chute de l’entreprise, entraînant dans son sillage l’arrestation de plusieurs dirigeants, dont le PDG Markus Braun. Le gouvernement allemand a dû reconnaître des failles dans son système de supervision financière. L’affaire a été qualifiée de “plus grand scandale financier” de l’histoire récente du pays par le ministre des Finances d’alors, Olaf Scholz, aujourd’hui chancelier.
Jan Marsalek, personnage central et insaisissable
Au cœur de ce séisme financier se trouve Jan Marsalek. Bras droit du PDG, ce trentenaire autrichien était considéré comme le cerveau des opérations de Wirecard. Mais depuis la révélation de l’affaire, il s’est volatilisé dans la nature. Les médias le disent réfugié en Russie sous une fausse identité, grâce à ses connexions avec les services secrets de ce pays.
Plusieurs enquêtes journalistiques, notamment celles du Financial Times et du Spiegel, ont mis en lumière le passé trouble de Jan Marsalek. Présenté comme un personnage brillant et charismatique, il aurait en réalité entretenu depuis des années des liens étroits avec les services de renseignement russes, leur fournissant des informations confidentielles. Certains évoquent même un possible financement occulte par le Kremlin.
Les ramifications d’un scandale tentaculaire
Avec l’ouverture d’une enquête visant spécifiquement Jan Marsalek pour espionnage, c’est une nouvelle dimension qui s’ouvre dans ce dossier complexe. Au-delà de la gigantesque fraude comptable et financière, ce sont désormais les ramifications géopolitiques de l’affaire qui intéressent la justice.
L’implication potentielle de la Russie, à travers l’un des principaux dirigeants de Wirecard, soulève de nombreuses questions. Moscou cherchait-il à déstabiliser l’économie allemande ? À obtenir des informations stratégiques ? Les investigations des procureurs de Karlsruhe tenteront d’y répondre, alors que Jan Marsalek reste pour l’heure hors d’atteinte.
En parallèle, le volet financier continue d’être instruit. Depuis décembre 2022, la justice allemande juge les responsables présumés de la retentissante faillite de Wirecard à Munich. Un procès hors norme, à la mesure d’un scandale qui a profondément ébranlé la réputation de la place financière allemande et qui n’a pas fini de livrer tous ses secrets.
