Le football chinois est sous le choc. Li Tie, ancien joueur international et sélectionneur de l’équipe nationale de Chine en 2020-2021, vient d’être condamné à 20 ans de prison ferme pour corruption par le tribunal de Pékin. Une peine d’une sévérité exceptionnelle qui témoigne de l’ampleur du système frauduleux dans lequel il était impliqué.
Un vaste réseau de matchs truqués et de pots-de-vin
Selon une source proche de l’enquête, Li Tie aurait perçu au total plus de 6 millions d’euros de pots-de-vin au cours de sa carrière d’entraîneur, en échange de son influence pour truquer des matchs et favoriser certains joueurs. Il aurait également versé de grosses sommes à des dirigeants de clubs pour décrocher le poste de sélectionneur national en 2020.
Son système était bien rodé. L’ex-international qui totalise 92 sélections « proposait » à des joueurs une place en équipe nationale contre le versement de pots-de-vin. Li Tie les aidait ensuite à rejoindre des clubs chinois complaisants. Une combine à grande échelle, comme il l’a lui-même avoué lors d’un documentaire diffusé en janvier par la télévision publique chinoise CCTV.
« Il s’agissait de pratiques courantes, mais j’aurais dû garder la tête froide et suivre la bonne voie. »
– Li Tie, ex-sélectionneur de la Chine condamné pour corruption
Un ancien joueur passé par l’Angleterre
Avant de sombrer dans les affres de la corruption, Li Tie avait connu une carrière honorable de joueur. Milieu défensif rugueux formé au Liaoning FC, un des plus grands clubs chinois, il tente l’aventure en Premier League anglaise au début des années 2000, d’abord à Everton puis à Sheffield United. Mais son passage outre-Manche s’avère décevant avec peu de temps de jeu.
De retour en Chine, il devient entraîneur et gravit rapidement les échelons. Il dirige notamment le Hebei China Fortune et le Wuhan Zall avant d’être nommé à la tête de la sélection en 2020, succédant au prestigieux Marcello Lippi. C’est là que son système frauduleux prend toute son ampleur.
Des peines de prison à la pelle
Le cas Li Tie n’est malheureusement pas isolé dans le football chinois gangrené par les scandales. Cette semaine, les tribunaux du pays ont distribué les peines de prison comme des cartons rouges :
- Chen Xuyuan, président de la fédération de 2019 à 2023, condamné à perpétuité en mars dernier pour corruption.
- Liu Yi, ex-secrétaire général de la fédération, condamné mercredi à 11 ans de prison.
- Tan Hai, ancien chef du bureau des arbitres, condamné à 6 ans et demi.
- Qi Jun, ancien responsable de la planification, condamné mardi à 7 ans.
Des sanctions d’une rare sévérité, applaudies en haut lieu. Le président Xi Jinping a fait de la lutte anti-corruption une priorité nationale, y compris dans le sport. Avec des peines aussi lourdes, le pouvoir envoie un message clair : tolérance zéro pour les tricheurs.
Opération mains propres dans le foot
Cette vague de condamnations marque-t-elle le début d’une vaste opération mains propres dans le football chinois ? Tout porte à le croire. Selon des sources proches des instances, d’autres têtes pourraient tomber dans les prochains mois, alors que la saison de Chinese Super League, la D1 locale, touche à sa fin.
Mais il faudra du temps pour éradiquer des pratiques aussi enracinées, dans un championnat miné par les affaires depuis des années. Malgré la puissance financière de ses clubs, qui attirent des stars étrangères par salaires mirobolants, la Chine peine à décoller au niveau international. Son équipe nationale stagne à une indigente 80ème place au classement FIFA.
Seule une remise à plat en profondeur du système et un changement de culture permettront au géant asiatique de développer enfin son immense potentiel. Un défi de taille, à l’heure où il rêve d’organiser une Coupe du Monde sur son sol. Les 20 ans de prison de Li Tie marqueront-ils le début d’une nouvelle ère ? L’avenir nous le dira.