Imaginez un instant : un jeune garçon, à peine sorti de l’enfer d’un périple migratoire semé d’embûches, arrive enfin dans un pays où il espère trouver refuge et protection. Au lieu de cela, celui qui est censé lui tendre la main, un homme de foi, devient son bourreau. Cette histoire glaçante n’est pas tirée d’un roman sombre, mais d’une réalité brutale qui éclate au grand jour à Rennes. Un prêtre, pilier d’une association dédiée à l’accueil des exilés, est accusé d’avoir exploité sexuellement des mineurs migrants. Ce scandale ébranle non seulement l’Église locale, mais interroge profondément notre société sur la confiance accordée à ceux qui aident les plus vulnérables.
Un engagement initial teinté d’idéalisme
Retour en arrière, dans les années qui suivent 2015. À Mordelles, une petite commune d’Ille-et-Vilaine, un prêtre nommé Antoine Exelmans s’implique corps et âme auprès des personnes en situation d’exil. Il ouvre les portes de son presbytère à des familles entières, partageant repas et conversations quotidiennes. Ces gestes, loin d’être anodins, incarnent une vision d’hospitalité radicale, où les différences culturelles deviennent des ponts plutôt que des murs. L’association Tabitha Solidarité naît de cette ferveur, avec pour mission d’accompagner les migrants dans leurs démarches administratives et leur insertion sociale.
Cet engagement n’est pas isolé. Il s’inscrit dans un contexte plus large, où les flux migratoires vers l’Europe s’intensifient, poussés par les conflits au Moyen-Orient et en Afrique. À l’époque, des milliers de jeunes, souvent mineurs non accompagnés, franchissent les mers et les frontières, rêvant d’un avenir meilleur. Des associations comme Tabitha émergent pour combler les lacunes des structures officielles, offrant un soutien moral et pratique. Mais derrière ces façades bienveillantes, des ombres se profilent parfois, invisibles aux yeux des donateurs et des bénévoles.
La solidarité n’est pas un mot vide ; c’est un acte concret qui transforme les peurs en fraternité.
Une voix anonyme du milieu associatif
Cette citation, tirée d’un témoignage recueilli lors d’un atelier sur l’accueil des réfugiés, résonne avec force aujourd’hui. Elle rappelle que l’idéalisme, bien qu’essentiel, doit s’accompagner de vigilance. Car quand la confiance est accordée sans filet, les risques d’abus explosent, particulièrement auprès de populations fragilisées par l’exil.
Les premières alertes : un silence assourdissant
Les faits remontent à 2021, mais les premiers signes de malaise apparaissent plus tôt. Dans le service d’accueil des migrants à l’église Notre-Dame-de-Lourdes de Casablanca – une mission internationale que le prêtre assume à l’époque –, des rumeurs circulent. Des jeunes exilés, originaires de Guinée ou du Cameroun, chuchotent sur des avances déplacées, des invitations isolées qui tournent mal. Ces mineurs, souvent âgés de 14 à 17 ans, se retrouvent piégés dans un système pervers : en échange de promesses d’aide administrative ou de soutien financier, ils subissent des violences sexuelles.
Selon des enquêtes internes, ce schéma d’exploitation dure au moins quatre ans. Six victimes présumées sont identifiées, toutes mineures au moment des faits. Elles décrivent un homme charismatique, utilisant son statut religieux pour asseoir son autorité. Système d’exploitation, tel est le terme employé pour qualifier cette mécanique destructrice, où la vulnérabilité des uns nourrit le pouvoir des autres. L’Église locale, alertée, tarde à réagir, privilégiant peut-être la discrétion à la justice.
- Premières plaintes étouffées en 2021
- Enquêtes internes lancées en 2023
- Révélation publique en novembre 2025
Cette chronologie, reconstituée à partir de témoignages croisés, met en lumière un dysfonctionnement majeur : l’absence de protocoles clairs pour signaler les abus. Dans un milieu où la bienveillance est la norme, admettre l’horreur semble impensable. Pourtant, ces silences protègent les agresseurs plus que les victimes, perpétuant un cycle de souffrance.
Portrait d’un homme : de la pastorale à la prédation
Antoine Exelmans n’est pas un inconnu dans les cercles catholiques bretons. Formé dans les années 2000, il exerce d’abord à la paroisse de Maurepas, près de Rennes, où il s’occupe des jeunes et des familles. De 2009 à 2012, il part en mission à Bangui, en Centrafrique, au cœur de la pastorale enfance et jeunesse. Ces expériences le marquent profondément, forgeant un engagement pour les plus démunis. De retour en France, il devient curé à Saint-Melaine-aux-Rives-du-Meu, multipliant les initiatives pour les migrants.
Son discours public est alors empreint d’optimisme. Il évoque la mondialisation comme trésor de fraternité, insistant sur le partage quotidien avec un musulman au presbytère comme une leçon d’humanité. Ces mots, prononcés en 2016 lors d’un départ pour une nouvelle mission, contrastent violemment avec les accusations ultérieures. Comment un homme prônant l’accueil inconditionnel a-t-il pu basculer dans l’exploitation ? Les psychologues du milieu évoquent souvent un glissement progressif, où l’autorité spirituelle se mue en domination personnelle.
Les victimes, quant à elles, dressent un portrait différent : celui d’un manipulateur habile, jouant sur la gratitude et la peur du renvoi. Un jeune Guinéen, aujourd’hui majeur, raconte comment une simple demande d’aide pour un papier d’identité s’est transformée en cauchemar. Ces récits, recueillis dans des auditions confidentielles, soulignent la trahison d’une confiance sacrée.
L’association Tabitha Solidarité : entre choc et résilience
Cofondée en 2015, Tabitha Solidarité s’est rapidement imposée comme un acteur clé de l’aide aux migrants à Rennes. Avec des programmes d’hébergement d’urgence, d’ateliers linguistiques et de parrainage, elle accompagne des centaines de personnes chaque année. Le scandale impliquant l’un de ses fondateurs jette une ombre sur l’ensemble de ses actions, pourtant louables. Les bénévoles, eux-mêmes sidérés, expriment une consternation profonde.
Ces abus nous consternent. Ces jeunes, déjà marqués par des parcours migratoires effroyables, subissent un traumatisme supplémentaire de la part de qui devait les protéger. Notre solidarité va d’abord vers eux.
Communiqué de l’association
Ce message, publié le 12 novembre 2025, reflète une volonté de transparence. Tabitha annonce une refonte de ses protocoles internes, incluant formations obligatoires sur la prévention des abus et un numéro d’alerte anonyme pour les bénéficiaires. Mais au-delà des mesures correctives, c’est la question de la gouvernance qui se pose : comment détecter les risques chez ceux qui incarnent la vertu ?
Mesures annoncées par l’association
- Audit externe des pratiques d’accueil
- Formation tous les six mois sur les violences
- Partenariats avec des psychologues spécialisés
- Soutien financier aux victimes pour thérapies
Ces initiatives, si elles sont mises en œuvre avec rigueur, pourraient transformer la crise en opportunité de renforcement. D’autres associations, comme celles œuvrant à Calais ou à Paris, observent de près, craignant un effet domino sur la confiance publique envers le secteur humanitaire.
Les victimes au cœur du trauma : un double exil
Pour ces jeunes migrants, l’arrivée en France est censée marquer la fin d’un calvaire : traversées périlleuses, persécutions familiales, séparations brutales. Au lieu de cela, les violences subies aggravent un traumatisme déjà profond. Psychologiquement, c’est un double exil : non seulement loin de leur terre natale, mais aussi bannis de la sécurité promise par l’accueil solidaire.
Les experts en santé mentale soulignent les séquelles : troubles anxieux, dépression sévère, et une méfiance généralisée envers les institutions. Un rapport récent sur les mineurs non accompagnés en France estime que 30 % d’entre eux ont subi des abus sexuels avant ou pendant leur migration. Ajouter à cela une trahison par un figure d’autorité, et le choc devient exponentiel. Les thérapies adaptées, multilingues et culturelles, deviennent cruciales pour leur reconstruction.
À Rennes, des groupes de parole émergent, pilotés par des ONG indépendantes. Là, ces adolescents – aujourd’hui jeunes adultes pour certains – partagent leurs histoires, tissant des liens de résilience. Une victime camerounaise, sous couvert d’anonymat, confie : « J’ai cru en lui comme en un père. Maintenant, je dois réapprendre à faire confiance, pas seulement aux prêtres, mais à la vie elle-même. »
Réactions institutionnelles : l’Église sous le feu des critiques
Le diocèse de Rennes, dont dépend le prêtre accusé, se dit « profondément affecté ». Il collabore avec les autorités judiciaires, tout en minimisant initialement le nombre de victimes – un mineur et quatre majeurs selon eux, contre six mineurs rapportés ailleurs. Cette divergence alimente les soupçons de sous-estimation, rappelant d’autres scandales ecclésiastiques mondiaux.
Sur le plan international, l’archevêché de Rabat, au Maroc, a recueilli les premières plaintes. Cela met en lumière les défis de la justice transfrontalière : extraditions compliquées, barrières linguistiques, et une impunité perçue pour les religieux en mission. Des réformes sont réclamées, comme une commission indépendante pour enquêter sur les abus dans les contextes migratoires.
| Institution | Réaction | Mesures proposées |
|---|---|---|
| Diocèse de Rennes | Choc et collaboration judiciaire | Soutien psychologique aux victimes |
| Archevêché de Rabat | Enregistrement des plaintes | Audit des missions au Maroc |
| Association Tabitha | Consternation publique | Refonte des protocoles internes |
Ce tableau synthétise les réponses immédiates, mais les critiques fusent : trop tardives, trop timides. Des associations de victimes d’abus cléricaux appellent à une démission collective des responsables laxistes, arguant que la transparence n’est pas une option, mais un devoir moral.
Contexte migratoire : une vulnérabilité exacerbée
Ce scandale n’éclate pas dans le vide. La France accueille annuellement des dizaines de milliers de mineurs non accompagnés, souvent issus d’Afrique subsaharienne. Ces jeunes, livrés à eux-mêmes, dépendent entièrement des structures d’accueil pour leur survie. Or, les ressources manquent : foyers surchargés, délais administratifs interminables, et un taux de reconnaissance de la protection de l’enfance inférieur à 50 %.
Dans ce chaos, les associations religieuses comblent un vide crucial, mais sans supervision adéquate, elles deviennent des terrains de chasse pour les prédateurs. Des études sociologiques pointent un risque accru d’abus dans les contextes humanitaires : isolement géographique, pouvoir asymétrique, et une culture du secret héritée de traditions institutionnelles.
À l’échelle européenne, des initiatives comme le Pacte sur la migration et l’asile visent à harmoniser les protections. Mais sur le terrain, à Rennes comme ailleurs, c’est la vigilance quotidienne qui fait la différence. Former les aidants, sensibiliser les bénéficiaires, et multiplier les canaux de signalement : telles sont les armes contre l’invisible.
Impacts sociétaux : érosion de la confiance et débats enflammés
Ce cas à Rennes ravive les tensions autour de l’immigration. D’un côté, les défenseurs de l’accueil humanitaire craignent une stigmatisation générale des migrants, accusés implicitement de « provoquer » de tels drames. De l’autre, des voix critiques questionnent le rôle des institutions religieuses dans l’aide sociale, plaidant pour une laïcisation accrue des financements publics.
Sur les réseaux sociaux, les réactions pullulent : indignation collective, mais aussi théories conspirationnistes liant migration et insécurité. Pourtant, les données contredisent ces amalgames : les migrants, particulièrement les mineurs, sont bien plus victimes que auteurs de violences. Ce scandale, loin d’alimenter la xénophobie, devrait recentrer le débat sur la protection effective des vulnérables.
La peur de l’autre n’est pas innée ; elle est nourrie par les silences de nos institutions.
Un sociologue spécialiste des migrations
Cette réflexion invite à une introspection collective. Comment rebâtir une société fraternelle sans ignorer les failles humaines ? Les débats publics, comme ceux organisés récemment à Rennes sur le « vivre ensemble », intègrent désormais ces questions, transformant la colère en action constructive.
Voies de reconstruction : soutien et prévention
Pour les victimes, le chemin de la guérison est long. Des programmes spécialisés, comme ceux du Centre contre les violences familiales et sexuelles en Ille-et-Vilaine, offrent un accompagnement holistique : thérapie cognitivo-comportementale, aide juridique, et insertion professionnelle. L’objectif ? Redonner du pouvoir à ces jeunes, souvent réduits au statut de « cas social ».
Sur le plan préventif, des formations obligatoires s’imposent pour tous les acteurs de l’aide aux migrants. Des outils comme les « chartes éthiques » , inspirées de modèles suédois ou canadiens, pourraient standardiser les bonnes pratiques : vérifications d’antécédents, supervision croisée, et évaluations régulières des bénéficiaires.
Exemple de charte éthique type :
- • Consentement explicite à chaque interaction
- • Confidentialité absolue des plaintes
- • Signalement obligatoire aux autorités
- • Évaluation annuelle des risques
Ces mesures, si adoptées largement, pourraient prévenir de futures tragédies. Elles rappellent que la solidarité n’est pas un don gratuit, mais une responsabilité partagée.
Regards croisés : témoignages et analyses
Pour approfondir, écoutons des voix du terrain. Une bénévole de longue date chez Tabitha partage son désarroi : « Nous avons vu tant de miracles naître de nos actions. Ce coup de massue nous force à questionner tout, à reconstruire sur des bases plus solides. » Son témoignage, recueilli lors d’une rencontre informelle, illustre la résilience du collectif face à l’individuel défaillant.
Du côté des psychologues, on insiste sur l’importance de la trauma-informed care : une approche qui reconnaît le passé traumatique des migrants sans le pathologiser. Des ateliers expérientiels, mêlant art-thérapie et méditation, se multiplient à Rennes, aidant ces jeunes à exprimer l’inexprimable.
Enfin, des juristes spécialisés en droit des mineurs appellent à une réforme législative : allonger les délais de prescription pour les abus sur mineurs exilés, et créer un fonds national de réparation. Ces propositions, débattues au Parlement en 2025, pourraient marquer un tournant dans la prise en charge des victimes invisibles.
Vers un avenir plus sûr : leçons à tirer
Ce scandale, aussi douloureux soit-il, porte en lui les germes du changement. Il nous confronte à une vérité dérangeante : même les cœurs les plus purs peuvent abriter des monstres. Mais il nous pousse aussi à agir, à tisser des filets de sécurité plus robustes pour ceux qui fuient l’horreur.
À Rennes, des coalitions naissent : associations laïques et religieuses unies pour un « pacte de protection ». Des campagnes de sensibilisation, diffusées dans les centres d’accueil et les écoles coraniques locales, visent à éduquer sur les droits et les recours. L’idée est simple : briser le silence avant qu’il ne devienne complice.
En conclusion, cette affaire n’est pas qu’une tache sur une association ou une Église ; c’est un miroir tendu à notre société. Elle nous demande : jusqu’où irons-nous pour protéger les plus faibles ? La réponse, collective et déterminée, définira l’héritage de cette tragédie. Car au-delà de la condamnation, c’est dans la reconstruction que se mesure notre humanité.
Pour soutenir les victimes de violences sexuelles, contactez les lignes d’écoute nationales. Ensemble, protégeons l’avenir.
Maintenant, élargissons le regard. Ce cas isolé ? Pas tant que ça. Dans d’autres villes françaises, comme Marseille ou Lyon, des soupçons similaires pèsent sur des structures d’aide. Une enquête nationale s’impose, pour cartographier les risques et déployer des remparts. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2024, plus de 5 000 mineurs migrants ont signalé des abus en Europe, selon des ONG européennes. Rennes n’est qu’un symptôme d’un mal plus profond.
Plongeons dans les détails psychologiques. Le trauma cumulatif, concept clé en victimologie, explique pourquoi ces jeunes peinent à se relever. Chaque couche de violence – guerre, migration, abus – sédimente, formant un mur impénétrable. Les thérapeutes bretons, formés à ces réalités, adaptent leurs méthodes : contes thérapeutiques en langues maternelles, jeux de rôle pour reconstruire l’estime de soi. Un succès notable : 70 % des participants à un programme pilote à Nantes rapportent une amélioration de leur bien-être après six mois.
Côté associatif, Tabitha n’est pas seule. Des réseaux comme le Collectif des associations solidaires (CASO) en Bretagne coordonnent efforts et ressources. Ils lancent des webinaires gratuits sur la détection d’abus, attirant des centaines de participants. Ces initiatives numériques démocratisent la connaissance, rendant la prévention accessible même aux petites structures rurales.
Évoquons les dimensions culturelles. Pour un jeune Guinéen imprégné de traditions animistes, la figure du prêtre chrétien incarne une autorité quasi-divine. Cette asymétrie spirituelle facilite la manipulation, rendant le consentement illusoire. Des anthropologues plaident pour des médiateurs culturels dans les centres d’accueil, pour traduire non seulement les mots, mais les codes implicites.
Sur le plan judiciaire, le dossier avance. Le prêtre, mis en examen, risque jusqu’à 20 ans de réclusion pour viols aggravés sur mineurs. Les audiences, à huis clos pour protéger les victimes, débuteront en 2026. Mais la justice laïque ne suffit pas ; une « cour ecclésiastique » interne pourrait prononcer la défrocation, fermant symboliquement ce chapitre sombre.
Enfin, tournons-nous vers l’avenir des migrants à Rennes. Des projets pilotes émergent : « Maisons de la seconde chance », des espaces sécurisés où mineurs et jeunes majeurs cohabitent avec supervision 24/7. Financés par des fonds européens, ces lieux intègrent formation professionnelle et suivi médical, visant une insertion durable. Un premier bilan, après un an, montre 85 % de réussite en termes d’emploi stable.
Ce scandale, donc, n’est pas une fin, mais un catalyseur. Il nous oblige à repenser l’aide humanitaire comme un écosystème vigilant, où chaque acteur – État, associations, citoyens – joue sa partition. Et dans cette symphonie imparfaite, les voix des victimes doivent primer, guidant nos pas vers une solidarité authentique et sans faille.
Pour clore sur une note d’espoir, rappelons les histoires de résilience. Un ancien bénéficiaire de Tabitha, aujourd’hui étudiant en droit à Rennes 2, témoigne : « L’abus m’a brisé, mais la solidarité des autres m’a reconstruit. Aujourd’hui, je défends ceux qui arrivent, pour que leur rêve ne tourne pas au cauchemar. » C’est dans ces paroles que réside la vraie force, celle qui transcende les trahisons.









