C’est un prévenu peu commun qui comparaît ce mercredi devant le tribunal correctionnel de Marseille. Un rabbin influent de la cité phocéenne est jugé pour abus de confiance après avoir perçu à titre personnel plus de 400 000 euros de dons destinés à sa communauté. Une affaire qui choque et ébranle de nombreux fidèles.
Des centaines de milliers d’euros détournés
Selon les éléments de l’enquête, le rabbin Emmanuel Taubenblatt aurait perçu sur son compte personnel pas moins de 407 171 euros de dons entre janvier 2017 et septembre 2022, alors qu’il présidait une association gérant un centre communautaire juif de Marseille. Des sommes conséquentes qui auraient dû financer les activités de la communauté.
L’enquête a été ouverte suite à des signalements du service anti-fraude de Bercy. Elle a mis en lumière de troublants virements à destination des enfants du rabbin, pour un total de près de 27 000 euros, sans aucun justificatif. Des transferts de fonds plus que suspects.
Le rabbin plaide une « mauvaise gestion »
Face aux accusations, le rabbin Taubenblatt assure n’avoir « rien à se reprocher » et évoque une simple « mauvaise gestion financière », rejetant toute volonté d’enrichissement personnel. Il affirme que les dons ont été intégralement redistribués aux nécessiteux de la communauté. Une ligne de défense que devra apprécier le tribunal.
Je suis un homme de Torah à l’écoute de sa communauté. Je reconnais une mauvaise gestion financière mais je n’ai jamais pris un euro pour moi.
a déclaré le rabbin Taubenblatt
Son avocat, Me Olivier Rosato, pointe une « totale méprise » dans ce dossier. Il rappelle que son client a refusé une procédure de plaider-coupable, signe selon lui de sa bonne foi. Il entend plaider la relaxe lors du procès.
La communauté sous le choc
Cette affaire secoue en profondeur la communauté juive marseillaise. Beaucoup peinent à croire que ce rabbin respecté, décrit comme proche de ses fidèles, ait pu abuser de leur confiance et détourner leurs dons. La déception et l’incompréhension dominent.
C’est une énorme trahison. Nous lui faisions confiance, nous pensions donner pour de bonnes œuvres. Apprendre qu’il a perçu cet argent pour lui, c’est un crève-cœur.
confie un membre de la communauté sous couvert d’anonymat
Au-delà de ce cas individuel, cette affaire jette une lumière crue sur l’opacité qui peut régner dans la gestion des dons religieux. Elle soulève la question des contrôles et de la transparence au sein des associations cultuelles.
Un second volet à l’affaire
Un autre homme sera jugé aux côtés du rabbin Taubenblatt ce mercredi. Il s’agit de Eliahu Attia, ancien trésorier de l’association. Il est soupçonné d’avoir lui aussi perçu indûment des fonds associatifs entre 2017 et 2022.
Selon nos informations, son rôle dans le détournement présumé des dons reste à éclaircir. Aurait-il agi en complicité avec le rabbin ou a-t-il profité de sa position pour s’enrichir personnellement ? Des questions auxquelles devra répondre l’instruction.
Des précédents troublants
Malheureusement, ce n’est pas la première fois qu’un homme de foi est soupçonné d’avoir abusé de la confiance de ses ouailles. En janvier dernier, un autre rabbin marseillais, Jojo Oyahon, a été renvoyé devant les tribunaux dans un dossier similaire concernant une synagogue du 6e arrondissement.
Ces affaires à répétition ternissent l’image des institutions religieuses et renforcent la méfiance des fidèles. Elles appellent à une grande vigilance et à un contrôle renforcé des flux financiers au sein des lieux de culte, quelle que soit la confession concernée.
Un procès très attendu
C’est donc un procès sous haute tension qui s’ouvre ce mercredi à Marseille. Au-delà du sort judiciaire du rabbin Taubenblatt, c’est la confiance des fidèles qui est en jeu. Les révélations de l’instruction ont déjà fait des dégâts, créant un climat de suspicion délétère.
Les débats devront faire la lumière sur ce qui s’est réellement passé. S’agit-il d’une fraude massive et intentionnelle comme le soupçonnent les enquêteurs ou d’une gestion certes calamiteuse mais dénuée d’intention frauduleuse, comme le plaide la défense ?
Au-delà des responsabilités individuelles, ce sont aussi les failles du contrôle et de la transparence financière des associations cultuelles qui seront sur le banc des accusés. Cette affaire doit être l’occasion d’une remise à plat et d’un renforcement des règles pour éviter que de tels abus ne se reproduisent.
Car c’est bien la confiance et le lien sacré entre un guide spirituel et sa communauté qui est en péril avec ce type de scandales. Un lien de confiance essentiel, qui ne doit pas être entaché par le doute et les soupçons d’enrichissement personnel. L’institution doit être exemplaire et irréprochable.
Ce procès sera donc suivi avec la plus grande attention par la communauté juive marseillaise mais aussi par tous les fidèles, de toutes confessions. Car au-delà d’un homme, c’est la probité des représentants religieux qui est questionnée. Un enjeu crucial pour préserver le lien de confiance si précieux entre les croyants et leurs guides spirituels.
