Sous le soleil d’automne qui baigne les remparts de Saint-Malo, une ombre plane sur la cité corsaire. Depuis trois ans, la ville mène un combat acharné contre les géants de la location saisonnière comme Airbnb. Sa méthode : instaurer des quotas draconiens pour limiter le nombre de meublés touristiques. Un pari audacieux qui vient d’être validé par la justice, mais dont l’efficacité reste à prouver.
Saint-Malo, le cauchemar des propriétaires Airbnb
Pour les propriétaires qui rêvaient de louer plusieurs biens sur Airbnb, c’est la douche froide. Depuis 2021, Saint-Malo limite à un seul le nombre de logements qu’un particulier peut proposer à la location saisonnière. Dans chaque quartier, un quota maximal de meublés touristiques est fixé. Une réglementation unique en France, qui fait grincer des dents.
Dès le début, j’ai été stoppé. Je ne vous cache pas que j’avais pour projet d’en mettre plusieurs, comme beaucoup, mais j’ai dû y renoncer.
Un propriétaire Airbnb à Saint-Malo
Jeudi dernier, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les recours d’une dizaine de propriétaires contre ces restrictions. Une victoire pour la ville, qui entend ainsi préserver l’accès au logement pour ses habitants. Mais tous ne jouent pas le jeu…
Des propriétaires qui résistent
Malgré les quotas, certains propriétaires continuent de louer plusieurs biens sur Airbnb. Une situation que déplore ce Malouin, contraint de se limiter à un seul appartement :
Les règles, je comprends qu’il y en ait. Mais après, chacun doit les respecter. Et apparemment, un grand nombre ne les respecte pas.
Selon nos informations, les contrôles restent sporadiques et les sanctions rares. La mairie assure pourtant que sa politique porte ses fruits, même si les effets mettront du temps à se faire sentir.
Peu d’impact sur le marché locatif
Dans les agences immobilières, on constate que les propriétaires contraints d’arrêter la location saisonnière ne remettent pas forcément leurs biens sur le marché locatif classique. Beaucoup préfèrent les garder pour leur usage personnel.
Pour l’heure, il n’y a pas eu d’effet significatif sur le marché locatif nu à l’année à Saint-Malo. Les propriétaires ne lâchent pas forcément leur bien.
Eric Dubois, agent immobilier
Pour la mairie, il faudra du temps et d’autres mesures, comme de nouvelles constructions, pour inverser la tendance. En attendant, les touristes peinent à trouver un logement intra-muros, comme Delphine, contrainte de s’excentrer :
Ici sur Saint-Malo, c’était plus compliqué à trouver, ou pas dans les mêmes critères que sur l’extérieur. Je trouve ça dommage.
Un bras de fer qui ne fait que commencer
Si la décision de justice conforte Saint-Malo dans sa stratégie, la bataille est loin d’être gagnée. Face à l’ampleur du phénomène Airbnb, les quotas ne sont qu’un premier pas. Il faudra du temps et une volonté politique sans faille pour rééquilibrer le marché immobilier malouin.
En attendant, propriétaires et locataires restent suspendus aux prochains épisodes d’un bras de fer qui pourrait faire des émules dans d’autres villes. Car au-delà de Saint-Malo, c’est tout le modèle Airbnb qui est questionné. Un géant du tourisme collaboratif qui doit aujourd’hui composer avec des régulations de plus en plus strictes. La partie ne fait que commencer…