Dans un paysage vallonné près de Liège, le groupe aéronautique français Safran vient d’inaugurer un centre d’essais ultramoderne baptisé Becover. Cet investissement stratégique vise à développer les moteurs d’avion du futur, plus écologiques et s’affranchissant du titane russe. Une étape clé vers une souveraineté européenne dans un domaine hautement stratégique.
Un site unique en Europe pour les moteurs de demain
Couvrant 3000 m2, le centre Becover est décrit comme « unique en Europe » par Safran. Il est destiné à tester tous types de compresseurs pour les nouvelles générations de moteurs d’avion civils et militaires. Un outil indispensable alors que le groupe prépare le moteur Rise en partenariat avec GE Aviation, visant une entrée en service à l’horizon 2035.
Rise se veut révolutionnaire sur le plan environnemental, promettant 20% de consommation de carburant en moins par rapport aux modèles actuels, et jusqu’à 80% avec l’utilisation de carburants durables. Des promesses rendues possibles grâce à une architecture moteur innovante, sans nacelle.
Des essais prévus dès 2025
Si les avionneurs comme Airbus et Boeing prévoient de lancer leurs appareils de nouvelle génération vers 2035, Safran doit s’y préparer dès maintenant. Les premiers essais du compresseur Rise débuteront début 2025 à Liège, un « évènement marquant » selon Olivier Andriès, directeur général de Safran.
Le site semi-enterré est conçu pour minimiser son impact environnemental et les nuisances sonores, avec notamment une éolienne pour son alimentation électrique. Pendant 6 mois, le compresseur bardé de 1200 capteurs subira des tests poussés simulant toutes les conditions de vol.
Sortir de la dépendance au titane russe
Au-delà de l’enjeu écologique, Becover représente aussi un pas vers l’indépendance pour Safran. Jusqu’à présent, les prototypes des moteurs étaient testés en Russie, pays disposant d’un titane de haute qualité utilisé dans les parties critiques des moteurs. Mais depuis l’invasion de l’Ukraine, la donne a changé.
Si le titane russe n’est pas directement sous sanctions, Safran a engagé une diversification de ses approvisionnements par précaution. Le groupe assure pouvoir désormais s’en passer complètement si nécessaire, grâce notamment à des technologies comme la soudure par friction inertielle qui réduit les besoins en titane.
Nous avions des liens très étroits avec la Russie, mais nous devons maintenant être désensibilisés au titane russe et on y est.
Olivier Andriès, directeur général de Safran
Un investissement pour la souveraineté européenne
Avec le centre Becover, Safran dispose désormais des moyens de développer et tester en toute indépendance les technologies de rupture qui équiperont les avions de demain. Un atout stratégique majeur alors que le secteur aéronautique est engagé dans une course à l’innovation pour réduire son empreinte environnementale.
En se dotant de telles capacités uniques en Europe, le groupe affirme aussi sa volonté de peser dans la compétition internationale et de contribuer à l’autonomie stratégique européenne dans un domaine clé. Les enjeux sont à la fois écologiques, industriels et géopolitiques pour les décennies à venir.
2035 peut sembler loin mais pour nous, c’est maintenant que tout se joue. Avec ce centre, nous prenons une longueur d’avance.
François Lepot, directeur général de Safran Aero Boosters
Un pari sur l’avenir et la souveraineté qui place Safran et l’Europe en pole position dans la course aux moteurs d’avion verts. La promesse d’une aviationà la fois plus performante et plus responsable, affranchie des dépendances du passé. Le décor est planté à Liège pour cette révolution technologique et stratégique.