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Russie : Recettes Pétrolières au Plus Bas Depuis 2020

11 milliards de dollars seulement en novembre : les revenus pétroliers russes viennent de toucher leur plus bas niveau depuis la crise Covid. Sanctions, frappes sur les raffineries et chute des volumes exportés font mal. Mais jusqu’à quand Moscou pourra-t-il tenir ce rythme ?

Imaginez le cœur économique d’un pays qui bat de plus en plus faiblement. En novembre dernier, les recettes tirées du pétrole russe ont atteint leur niveau le plus bas depuis la crise du Covid-19. Un chiffre qui donne le vertige quand on sait que l’or noir représente encore le principal poumon financier de Moscou.

Un effondrement historique des revenus pétroliers

Le constat est brutal. Les exportations totales de pétrole brut et de produits raffinés ont chuté de 420 000 barils par jour pour tomber à seulement 6,9 millions de barils par jour. C’est le volume le plus faible enregistré depuis le début du conflit en Ukraine, et même depuis les mois noirs de 2020.

Conséquence directe : les rentrées d’argent ont fondu comme neige au soleil. 11 milliards de dollars seulement pour le mois de novembre. Cela représente 3,6 milliards de moins qu’en novembre 2023 et surtout 11,4 milliards de moins que la moyenne des six premiers mois de 2022, juste après le début de l’invasion.

Deux phénomènes qui s’additionnent

Ce plongeon résulte de la rencontre de deux tempêtes parfaites. D’un côté, les volumes exportés diminuent fortement. De l’autre, les prix moyens du baril russe se maintiennent à des niveaux bien inférieurs à ceux du Brent.

Pour le brut, la baisse mensuelle atteint 290 000 barils par jour. Les produits pétroliers reculent de 130 000 barils par jour. Au total, près d’un demi-million de barils quotidiens se sont évaporés en un seul mois.

La réduction des volumes exportés, combinée à des prix plus faibles, a fait chuter les recettes à leur niveau le plus bas depuis la pandémie.

La mer Noire, théâtre d’une guerre invisible

L’un des points les plus spectaculaires concerne les exportations maritimes via la mer Noire. Elles se sont effondrées de 42 % en un mois, tombant à seulement 910 000 barils par jour.

Cette chute vertigineuse s’explique par les attaques répétées contre la fameuse « flotte fantôme » : ces navires vieillissants, souvent sans assurance occidentale, qui permettent à la Russie de contourner les sanctions et le plafonnement des prix.

Installations portuaires endommagées, navires touchés, équipages effrayés : le coût de transport explose et de nombreux armateurs préfèrent désormais refuser les cargaisons russes, même à prix cassés.

L’Inde et la Turquie en première ligne

Les deux grands acheteurs traditionnels du pétrole russe discount subissent de plein fouet cette désorganisation. New Delhi et Ankara ont vu leurs approvisionnements maritimes fortement réduits au cours des dernières semaines.

Certains raffineurs indiens se tournent désormais vers l’Arabie saoudite ou l’Irak, même si cela signifie payer plus cher. En Turquie, plusieurs terminaux dédiés au transbordement de brut russe tournent au ralenti.

À retenir : La combinaison sanctions + frappes ciblées sur l’appareil de production et de transport commence à produire des effets macro-économiques visibles.

Les raffineries russes sous le feu

Depuis l’été, l’Ukraine a intensifié ses frappes de drones longue portée contre les infrastructures pétrolières russes. Plus d’une douzaine de raffineries ont été touchées, parfois à plusieurs reprises.

Ces attaques ne détruisent pas complètement les installations, mais elles provoquent des arrêts prolongés pour réparations et surtout une pénurie de pièces détachées occidentales, rendues inaccessibles par les sanctions.

Résultat : la capacité de raffinage du pays a diminué d’environ 10 à 15 % selon les estimations indépendantes, ce qui se traduit mécaniquement par moins de produits pétroliers à exporter.

Un budget russe sous tension

Ces chiffres tombent au pire moment pour le Kremlin. Les dépenses militaires explosent depuis trois ans tandis que les recettes fiscales liées aux hydrocarbures, qui représentent encore près de 40 % du budget fédéral en temps normal, s’effritent mois après mois.

Pour compenser, Moscou a déjà augmenté massivement les impôts sur les entreprises et particuliers, vidé une partie de son Fonds national de richesse et multiplie les emprunts intérieurs. Mais ces leviers montrent leurs limites.

Certains analystes estiment que si la tendance actuelle se poursuit, la Russie pourrait connaître son premier déficit budgétaire réellement problématique dès 2026.

Vers une nouvelle normalité à bas prix ?

Face à cette pression, la stratégie russe reste inchangée : inonder le marché avec du pétrole à prix cassés pour conserver des parts de marché, même au prix de marges très faibles.

Le baril d’Oural russe s’échange actuellement avec une décote de 15 à 20 dollars par rapport au Brent, un écart historiquement élevé qui reflète à la fois la peur des sanctions secondaires et les coûts logistiques exorbitants de la flotte fantôme.

Mais même cette stratégie atteint ses limites alors que la Chine et l’Inde, principaux clients, commencent à négocier encore plus durement les prix et que de nouveaux fournisseurs (Guyana, Brésil, États-Unis) inondent le marché asiatique.

En résumé, novembre 2025 marque peut-être un tournant. Le modèle économique russe, qui repose depuis vingt ans sur des exportations massives d’hydrocarbures à prix élevés, montre des signes d’épuisement profond. Les sanctions occidentales, combinées à la résilience militaire ukrainienne, produisent enfin l’effet recherché : priver Moscou des moyens de financer indéfiniment son effort de guerre.

La question n’est plus de savoir si l’économie russe va craquer, mais quand et à quel point cela affectera la conduite du conflit.

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