Le paysage politique roumain est en ébullition après l’annonce choc de l’annulation du premier tour de l’élection présidentielle, entaché de lourds soupçons d’interférence de la Russie. Face à cette situation sans précédent dans l’Union Européenne, le gouvernement a tranché : une nouvelle élection aura lieu au mois de mai, dans l’espoir de restaurer la confiance des citoyens dans le processus démocratique.
Un scrutin sous haute tension
C’est un véritable séisme qui a secoué la Roumanie en décembre dernier lorsque la Cour constitutionnelle a pris la décision rarissime d’invalider le premier tour de l’élection présidentielle. Au cœur du scandale : la victoire surprise du candidat d’extrême droite Calin Georgescu, accusé d’avoir bénéficié d’une campagne de soutien illicite sur les réseaux sociaux, orchestrée depuis la Russie.
Critique virulent de l’Union Européenne et de l’OTAN, opposé à toute aide militaire à l’Ukraine, Georgescu a immédiatement dénoncé un « coup d’État », galvanisant ses partisans qui sont descendus par milliers dans la rue pour crier au « vol » du scrutin. De son côté, la Commission Européenne a annoncé l’ouverture d’une enquête pour faire la lumière sur ces graves accusations d’ingérence étrangère.
Le gouvernement veut avancer
Malgré ce climat délétère, le gouvernement roumain s’efforce de reprendre la main. Le porte-parole Mihai Constantin a officialisé jeudi les nouvelles dates du scrutin : le premier tour se tiendra le 4 mai, suivi d’un éventuel second tour le 18 mai si aucun candidat ne décroche la majorité absolue. L’exécutif entend ainsi démontrer sa détermination à défendre l’état de droit et les institutions.
Autre signal fort : les principales forces politiques pro-européennes ont scellé une alliance fin décembre pour faire barrage aux tentations souverainistes. Elles comptent présenter un candidat unique en la personne de Crin Antonescu, dans l’attente de la validation officielle de sa candidature. De son côté, le maire indépendant de Bucarest Nicusor Dan tentera également sa chance, espérant fédérer les électeurs attachés aux valeurs démocratiques.
Une épreuve pour la démocratie roumaine
Au-delà du résultat des urnes, c’est la solidité de la démocratie roumaine qui sera mise à l’épreuve dans les prochaines semaines. Trente ans après la chute du régime communiste de Nicolae Ceausescu, les fantômes du passé totalitaire ressurgissent dans un pays qui n’a eu de cesse d’affirmer son ancrage européen.
« Nous voulons faire partie de l’Europe, il n’y a pas d’autre solution, mais nous ne voulons pas baisser la tête devant qui que ce soit »
– Un manifestant pro-Georgescu
Ces élections s’annoncent donc comme un test majeur pour mesurer la résistance des Roumains aux sirènes de la désinformation et du repli nationaliste. Elles seront scrutées de près par les partenaires européens et euro-atlantiques de Bucarest, inquiets de voir un pays clé du flanc est fragilisé par les soubresauts populistes.
Dans ce contexte volatil, une certitude demeure : la nouvelle présidentielle de mai sera décisive pour l’avenir de la Roumanie, écartelée entre ses aspirations européennes et la tentation du repli identitaire. Trente ans après avoir tourné la page du totalitarisme, les Roumains sont appelés à réaffirmer avec force leur attachement aux valeurs démocratiques.