« Je suis le haut-parleur du peuple ». C’est ainsi que se définit sans ambages Rodrigue Petitot, le tribun qui mène les manifestations contre la vie chère secouant la Martinique depuis plusieurs semaines. Un rôle d’activiste et de porte-parole autoproclamé qui étonne au regard de son parcours pour le moins chaotique.
Un passé judiciaire chargé
Lors d’une interview accordée début septembre à la chaîne locale Zitata TV, ce quadragénaire originaire du nord de l’île s’est confié sans fard sur son lourd passé. « J’ai été incarcéré quatre fois » pour trafic de drogue et violences avec armes, avoue-t-il face caméra. Sa dernière peine, initialement de 10 ans, a été ramenée à 4 ans grâce à un aménagement.
Même sorti du fin fond de l’enfer, on peut faire de bonnes choses et œuvrer pour le peuple.
Rodrigue Petitot
Une rédemption sur laquelle il insiste : « Même sorti du fin fond de l’enfer, on peut faire de bonnes choses et œuvrer pour le peuple ». Se présentant comme « quelqu’un qui est contre l’injustice », Rodrigue Petitot veut faire table rase de son passé au nom de son combat actuel.
Liaisons politiques troubles
Mais la polémique enfle aussi autour de ses accointances politiques. Longtemps proche des milieux indépendantistes martiniquais, l’activiste est apparu l’an dernier dans un surprenant documentaire azéri intitulé « La Martinique : une île aux fleurs dans l’esclavage français », diffusé par la chaîne CBC TV basée à Bakou.
Durant 25 minutes, aux côtés d’Aude Goussard, la secrétaire du RPPRAC, il y dénonce pêle-mêle la vie chère, les descendants des colons qui « dominent toute l’économie » et l’impunité dans le scandale du chlordécone. Des prises de position et une exposition médiatique prématurée qui interrogent.
Pourtant, à ce moment-là, personne ne les connaissait.
Zaka Toto, doctorant en histoire
« Pourtant, à ce moment-là, personne ne les connaissait », s’étonne Zaka Toto, lui aussi interrogé dans le documentaire. Pour ce doctorant en histoire, cette mise en lumière atteste de l’ancienneté et de la solidité des réseaux politiques de Rodrigue Petitot, qui a dû « être recommandé » à l’équipe azérie.
Un tribun clivant
Aujourd’hui propulsé leader des contestataires, Rodrigue Petitot divise. Si certains saluent son charisme et son franc-parler, d’autres pointent ses outrances verbales et doutent de sa légitimité. Les révélations sur son passé judiciaire et ses connexions troubles renforcent la controverse.
Qu’il soit vu comme un activiste sincère ayant payé sa dette ou un opportuniste aux ambitions troubles, Rodrigue Petitot est devenu en quelques mois un acteur incontournable du paysage social martiniquais. À moins que l’étalage de son parcours sulfureux ne finisse par lui coûter sa soudaine notoriété.
