Dans la nuit de vendredi à samedi, un rodéo sauvage a viré au cauchemar dans la banlieue de Nantes. Lors d’un rassemblement non déclaré de motos et quads dans une zone industrielle, un homme de 30 ans a perdu le contrôle de son pick-up. Le bilan est lourd : trois blessés dont un adolescent de 17 ans dans un état critique. Les rodéos urbains, véritable fléau des villes, continuent de faire des victimes malgré une législation durcie. Comment enrayer ce phénomène dangereux et anxiogène pour les riverains ?
Une nuit de chaos à Saint-Jean-de-Boiseau
Aux alentours de minuit, un attroupement non autorisé de véhicules à moteur s’est formé dans la zone industrielle du Landas à Saint-Jean-de-Boiseau, en périphérie de Nantes. Rapidement, le rassemblement a tourné à l’affrontement entre participants. D’après des témoins, un conducteur de pick-up âgé d’une trentaine d’années aurait perdu le contrôle de son véhicule en tentant un « dérapage ». Dans sa course folle, l’automobile a fauché plusieurs personnes avant de terminer sa route dans un portail.
À l’arrivée des secours, c’est un spectacle de désolation qui les attendait. Trois jeunes ont été pris en charge par les pompiers et le SAMU, dont un garçon de 17 ans présentant de multiples fractures et un traumatisme crânien. Évacué dans un état critique au CHU de Nantes, son pronostic vital était encore engagé ce dimanche. Deux autres victimes plus légèrement touchées ont également été transportées à l’hôpital pour des examens.
Le conducteur fou interpellé après une brève cavale
Selon nos informations, le trentenaire au volant du pick-up n’aurait pas assumé ses responsabilités après le choc. Profitant de la confusion générale, il aurait pris la fuite à pied, abandonnant son véhicule accidenté et ses victimes sur place. Une attitude lâche qui n’aura été que de courte durée. Grâce au signalement de participants à la soirée, les forces de l’ordre ont rapidement retrouvé sa trace et procédé à son interpellation quelques heures plus tard.
Placé en garde à vue, le mis en cause, déjà connu des services de police pour des faits similaires, devra répondre de ses actes devant la justice. « Le conducteur devra répondre de faits de blessures involontaires par conducteur de véhicule par manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence, participation à un rodéo motorisé et défaut de maîtrise », a indiqué le procureur de la République de Nantes ce dimanche. Déferré dans la matinée, il a été placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de conduire en attendant son procès fixé au 18 mars.
Les rodéos urbains, un phénomène hors de contrôle
Au-delà du drame humain, cet accident met une nouvelle fois en lumière le phénomène des rodéos sauvages qui gangrène de nombreuses villes françaises. Malgré un arsenal législatif renforcé ces dernières années, ce type de rassemblements illégaux continue de prospérer, transformant certains quartiers en véritables zones de non-droit.
Les riverains n’en peuvent plus. Chaque week-end, c’est le même cirque. Des motards qui font hurler leurs machines jusque tard dans la nuit, des voitures qui font des pointes à 150 en pleine ville. On a l’impression de vivre dans un circuit automobile !
Julien, habitant du quartier Bellevue à Nantes
Si les rodéos motorisés ne sont pas un phénomène nouveau, ils semblent avoir pris une ampleur inédite ces derniers mois. Favorisés par les réseaux sociaux qui permettent d’organiser des événements en un temps record, ces rassemblements sauvages attirent désormais des centaines de participants, transformant certains quartiers en véritables zones de guerre.
Face à cette situation explosive, les autorités semblent désemparées. Malgré les renforts de police et les opérations coup de poing, les fauteurs de troubles parviennent toujours à semer la pagaille avant de prendre la fuite. Une impunité qui exaspère riverains et élus locaux.
Quelles solutions pour endiguer le fléau ?
Pour tenter d’enrayer cette spirale infernale, plusieurs pistes sont à l’étude. Parmi elles, l’alourdissement des sanctions pénales pour les participants, avec des peines de prison ferme dès la première infraction. Une réponse musclée, plébiscitée par de nombreux élus locaux à bout de nerfs, mais qui ne fait pas l’unanimité chez les spécialistes.
La répression ne réglera pas tout. Il faut surtout redonner des perspectives à cette jeunesse en rupture. Des lieux pour s’exprimer, pratiquer leur passion dans un cadre légal. L’expérience des circuits réservés aux sports mécaniques a fait ses preuves là où elle a été tentée.
Marie Dubois, sociologue spécialiste des questions de délinquance juvénile
Une autre option, déjà expérimentée avec un certain succès dans plusieurs villes, consiste à utiliser des drones pour traquer les rodéos sauvages. Equipés de caméras haute définition, ces aéronefs permettent de suivre les fuyards à distance et de guider les forces de l’ordre au sol, augmentant ainsi leurs chances d’interpellation.
Mais au-delà des réponses sécuritaires, c’est un véritable travail de fond qu’il faudra mener pour s’attaquer aux racines du mal. Décrochage scolaire, chômage, absence de perspectives… Autant de facteurs qui poussent certains jeunes à basculer dans la délinquance et à faire fi des règles élémentaires du vivre-ensemble. Un constat amer mais nécessaire pour espérer, un jour, voir le bout du tunnel.