Une page se tourne dans les relations militaires entre la France et le Tchad. Jeudi dernier, l’armée française a officiellement rétrocédé sa base militaire de Faya, dans le nord du Tchad, à l’armée tchadienne. Cette opération intervient moins d’un mois après l’annonce surprise par N’Djamena de la suspension de l’accord de défense qui liait les deux pays depuis l’indépendance du Tchad en 1960.
Un retrait militaire planifié et coordonné
Selon l’état-major français des Armées, cette rétrocession de la base de Faya s’inscrit dans le calendrier établi avec le partenaire tchadien et suit le déroulé normal du plan de retrait. Les soldats français stationnés sur place ont quitté les lieux par la route en direction de N’Djamena, la capitale tchadienne située à près de 780 kilomètres au sud-ouest.
Le matériel et les véhicules militaires provenant des différentes bases françaises au Tchad, à savoir Faya Largeau, Abéché et N’Djamena, doivent quant à eux être rapatriés en France via le port camerounais de Douala d’ici le mois de janvier prochain. Une opération logistique d’envergure qui devrait prendre environ trois semaines par voie maritime selon un responsable de l’armée française cité par le ministère tchadien des Armées.
Un premier contingent déjà rentré en France
Ce retrait de Faya fait suite au départ la semaine dernière d’une première unité de 120 soldats français depuis N’Djamena en direction de la France, dix jours seulement après le départ des avions de chasse français jusque-là déployés dans le pays. Un symbole fort quand on sait que des troupes et des appareils militaires français étaient présents quasiment sans discontinuer au Tchad depuis son indépendance, il y a plus de 60 ans.
Cette présence visait principalement à former et entraîner les forces armées tchadiennes. Au total, ce sont près d’un millier de militaires français qui étaient encore stationnés dans le pays ces derniers mois, répartis sur trois emprises dont la base principale de Kossei à N’Djamena.
Le Tchad, ancien point d’ancrage français au Sahel
Si ce retrait militaire français du Tchad était prévu de longue date dans le cadre d’une reconfiguration plus globale du dispositif tricolore en Afrique, il a cependant été précipité par la décision unilatérale de N’Djamena fin novembre de dénoncer l’accord de défense qui liait les deux pays.
Une décision qui a pris Paris de court tant le Tchad représentait jusqu’à présent un maillon essentiel de la présence militaire française en Afrique et le dernier point d’ancrage dans la région stratégique du Sahel. Un changement de cap géopolitique majeur pour ce pays désertique et enclavé d’Afrique centrale.
Vers de nouvelles relations franco-tchadiennes ?
Au-delà de sa dimension militaire, ce retrait français du Tchad pose question quant à l’avenir des relations entre Paris et N’Djamena. Si les autorités des deux pays assurent vouloir maintenir des liens forts et privilégiés, il est clair que leur partenariat devra trouver de nouvelles bases, loin de la relation quasi-fusionnelle qui prévalait jusqu’alors dans le domaine de la défense et de la sécurité.
L’enjeu sera notamment de redéfinir les contours de la coopération économique et du soutien au développement que la France apporte à ce pays parmi les plus pauvres au monde. Un soutien qui passait jusqu’à présent en grande partie par le canal militaire et qui devra sans doute être repensé.
Quoi qu’il en soit, le retrait militaire français qui se concrétise aujourd’hui marque à n’en pas douter un tournant dans l’histoire des relations franco-tchadiennes. Un nouveau chapitre qui reste à écrire pour ces deux pays liés par une histoire commune aussi ancienne que tumultueuse. Les prochains mois seront décisifs pour en définir les grandes lignes et poser les jalons d’un partenariat rénové.