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Retour des Otages : Ran Gvili, le Dernier à Revenir

Israël retient son souffle : après le retour du corps d’un ouvrier thaïlandais, Ran Gvili reste le dernier otage mort encore à Gaza. Sa mère promet : « Nous ne baisserons pas les bras. » Mais pendant ce temps, la trêve vacille et les frappes continuent… Que va-t-il se passer ?

Jeudi matin, la Place des Otages à Tel-Aviv était presque vide. Quelques drapeaux israéliens flottaient mollement dans la brise, à côté de deux immenses portraits. L’un montrait Ran Gvili, sous-officier de l’unité d’élite Yassam, casque sous le bras et regard déterminé. L’autre, Sudthisak Rinthalak, ouvrier agricole thaïlandais, sourire timide sur un fond de champs verdoyants. Deux hommes que tout opposait, unis désormais par le même espoir : rentrer enfin chez eux.

Un retour qui soulage… et qui fait mal

La veille, mercredi, le corps de Sudthisak Rinthalak a été remis aux autorités israéliennes. Âgé de 43 ans, ce père de famille originaire du nord-est de la Thaïlande travaillait depuis 2017 au kibboutz Beeri. Le 7 octobre 2023, il se trouvait dans les champs quand les combattants du Hamas ont surgi. Il a été tué, puis emmené à Gaza. Pendant plus d’un an, sa famille a vécu dans l’incertitude la plus totale.

Son identification officielle a eu lieu il y a quelques heures seulement. Le Forum des familles d’otages l’a décrit comme un travailleur « apprécié de tous », discret et courageux. Aujourd’hui, son portrait trône aux côtés de celui de Ran Gvili sur cette place devenue symbole de l’attente collective.

Ran Gvili, le policier qui n’aurait jamais dû être là

Ran Gvili, lui, n’était même pas en service ce samedi noir. En arrêt maladie pour une opération à l’épaule, il regardait les informations chez lui dans le Néguev quand les sirènes ont retenti. Sans hésiter, il a pris son arme personnelle, enfilé son gilet et foncé vers le kibboutz Aloumim, à quelques kilomètres de la frontière.

Il est tombé sous les balles en tentant de protéger les habitants. Son corps a été emmené à Gaza. Depuis, sa mère Talik répète inlassablement la même phrase : « Le premier à sortir, le dernier à revenir. » Sur X, elle a publié une photo de son fils en tenue de motard, casque à la main, avec ce simple message : « Nous ne baisserons pas les bras jusqu’à ce que tu reviennes. »

« C’est notre devoir de nous assurer qu’ils soient tous de retour chez eux. »

Mirala Gal, bénévole sur la Place des Otages

Un cessez-le-feu en sursis

Depuis l’entrée en vigueur de la trêve le 10 octobre, sous forte pression américaine, les choses ont avancé vite. Les vingt derniers otages vivants ont été libérés. Vingt-sept dépouilles sur vingt-huit ont été rendues. Il ne reste plus que Ran Gvili.

Le Hamas explique ce retard par les difficultés à localiser les corps dans une bande de Gaza ravagée par quinze mois de guerre. Des quartiers entiers sont réduits en poussière, les tunnels effondrés, les repères disparus. Chaque recherche est une épreuve.

Mais la trêve reste extrêmement fragile. Mercredi encore, une frappe israélienne dans le sud de Gaza a tué cinq personnes selon la Défense civile palestinienne. L’armée israélienne parle d’une riposte après l’attaque d’une patrouille qui a blessé cinq soldats. À Khan Younès, des dizaines de familles ont accompagné leurs morts dans un cortège silencieux.

« Nous espérons que le monde se tiendra à nos côtés et mettra fin à ce bain de sang. »

Raafat Abu Hussein, habitant de Khan Younès ayant perdu des proches

Des chiffres qui donnent le vertige

Depuis le début de la trêve, au moins 366 Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens, selon le ministère de la Santé du gouvernement Hamas – des chiffres considérés comme fiables par l’ONU. Trois soldats israéliens sont morts durant la même période.

Le bilan global de l’offensive israélienne dépasse les 70 000 morts à Gaza, majoritairement des civils. Côté israélien, l’attaque du 7 octobre a coûté la vie à 1 221 personnes, là encore en majorité des civils.

Bilan humain en quelques chiffres :

  • 251 personnes enlevées le 7 octobre 2023
  • 20 derniers otages vivants libérés depuis le 10 octobre
  • 27 dépouilles rendues sur 28
  • 1 seul corps encore à Gaza : Ran Gvili
  • 70 125 morts palestiniens (ministère de la Santé de Gaza)
  • 1 221 morts israéliens le 7 octobre

Et maintenant ?

La première phase du cessez-le-feu, qui prévoyait la libération de tous les otages et un retrait partiel des troupes israéliennes, est presque achevée. Reste la deuxième étape, bien plus explosive : désarmement du Hamas, mise en place d’une autorité de transition, déploiement d’une force internationale.

Aucun accord n’a encore été trouvé. Chaque incident, chaque frappe, chaque blessé fait peser la menace d’une reprise totale des hostilités. À Tel-Aviv, sur la Place des Otages, on retient son souffle. À Gaza, dans les ruines de Khan Younès, on enterre ses morts en espérant que la reconstruction pourra enfin commencer.

Entre ces deux réalités, Ran Gvili reste le dernier lien. Le dernier symbole. Le dernier homme que tout le monde, d’un côté comme de l’autre de la frontière, attend pour pouvoir, peut-être, tourner une page.

Quand son corps franchira enfin la frontière, ce ne sera pas seulement le retour d’un policier courageux ou la fin d’une longue attente pour une mère. Ce sera, peut-être, le signal que quelque chose peut encore être sauvé dans ce conflit qui a déjà tout détruit.

En attendant, sur la Place des Otages, les portraits de Ran et de Sudthisak continuent de veiller. Deux hommes, deux destins, une même promesse : personne ne sera oublié.

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