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Réouverture Prudente des Bars en Syrie Sous Contrôle Islamiste

Les bars de Damas tentent un retour à la normale après le changement de régime. Malgré les assurances des nouvelles autorités islamistes, l'inquiétude demeure sur la pérennité des libertés sociales. Les Syriens oscillent entre soulagement et crainte pour l'avenir...

Dans les ruelles animées de la vieille ville de Damas, les néons colorés des devantures de bars se rallument timidement. Après des semaines d’incertitude suite à la chute du régime de Bachar al-Assad, les propriétaires d’établissements osent à nouveau servir de l’alcool, malgré la mainmise des islamistes radicaux sur le pays. Un retour à la normale encore fragile pour une population tiraillée entre soulagement et inquiétude.

Des assurances officielles encore floues

Si les rumeurs d’une répression de la consommation d’alcool, interdite par l’islam, ont rapidement circulé après la victoire des rebelles, les nouvelles autorités se veulent pour l’instant rassurantes. Interrogé par une source proche de l’AFP, un responsable de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), le groupe djihadiste désormais aux commandes, balaie l’idée d’une interdiction :

Parler d’une interdiction concernant l’alcool est faux. Le nouveau gouvernement a des enjeux plus importants à gérer.

Une position de principe qui reste à confirmer dans les faits, alors qu’aucune communication officielle n’a encore eu lieu sur le sujet. Dans le flou, les gérants préfèrent jouer la prudence, à l’image de Safi, propriétaire du Papa Bar à Bab Touma, le quartier chrétien :

Je suis allé au poste de police pour leur dire que je voulais rouvrir et servir de l’alcool. Ils m’ont répondu qu’il n’y avait pas de problème, que j’avais le droit de travailler et vivre comme avant.

Une tolérance affichée envers les différentes communautés

Pour l’heure, bars et restaurants accueillent à nouveau les fêtards, bercés par les traditionnels airs de pop arabe. Les décorations de Noël illuminent même les rues, pour le plus grand bonheur de la communauté chrétienne. Des signes encourageants, après l’annonce par le nouveau régime d’une attitude tolérante envers la diversité religieuse et les pratiques sociales du pays.

Le soir de la réouverture de son établissement Al-Alia, le gérant Yezan Shalash raconte la visite surprise de membres de HTS, venus sans armes :

Ils ont dit aux gens : « Nous ne sommes pas là pour vous faire peur. Nous sommes ici pour que nous puissions tous vivre ensemble en Syrie, pour permettre à tous de profiter de la liberté que nous avons si longtemps attendue ». Ils nous ont très bien traités, mais j’ai peur que ce soit temporaire.

Une normalité encore hésitante

Car derrière les sourires et les verres qui s’entrechoquent, l’ambiance reste fébrile. Si certains clients savourent ces moments de légèreté retrouvée, beaucoup s’inquiètent de la pérennité de ces libertés. La fréquentation reste timide, loin de l’euphorie des grandes occasions.

Mohsen Ahmad, 44 ans, est bien décidé à profiter malgré tout : « Nous nous attendions à un gros bordel. Mais voyez, nous sommes très vite revenus à la vie et avons repris nos soirées et nos droits ». Une normalité encore précaire, suspendue aux décisions à venir des nouveaux dirigeants.

Un avenir suspendu aux décisions du nouveau régime

Car si le gouvernement de transition installé par HTS se veut pour l’instant rassurant, les craintes persistent sur ce qui adviendra après le 1er mars, date limite de son mandat. L’avenir du pays, et avec lui celui des libertés sociales comme la consommation d’alcool, restent plus que jamais incertains.

Les Syriens oscillent ainsi entre une volonté de retrouver une vie normale et la peur de voir ces fragiles acquis remis en cause par les nouveaux maîtres islamistes du pays. Un pari sur l’avenir que résume Safi en contemplant les bouteilles alignées derrière son comptoir :

J’espère que les clients oseront revenir prendre un verre, comme avant. Mais difficile de savoir de quoi demain sera fait.

Dans une Syrie en plein bouleversement, les bars de Damas tentent un retour à la normale encore bien précaire. Derrière leurs néons colorés se joue une partie de l’avenir du pays, entre espoirs de liberté et craintes d’un retour à un ordre moral strict. Un équilibre fragile que seules les prochaines décisions des nouveaux dirigeants permettront de confirmer ou d’infirmer.

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