La réorientation dans l’enseignement supérieur est un phénomène courant mais pas toujours facile à vivre pour les étudiants concernés. Entre la peur de décevoir son entourage, les difficultés financières et le sentiment d’échec, changer de filière peut s’avérer un véritable parcours du combattant. Pourtant, pour certains, c’est le déclic qui leur permet enfin de trouver leur voie et de s’épanouir dans leurs études et leur future carrière.
Un constat sans appel : des filières qui ne correspondent pas aux attentes
Chaque année, ils sont nombreux à se rendre compte que la filière dans laquelle ils se sont engagés ne leur convient pas. Cours trop théoriques, professeurs peu investis, débouchés incertains… Les raisons sont multiples mais le résultat est le même : une profonde remise en question et l’impression de s’être trompé d’orientation.
Parfois, il y a un décalage entre les enseignements, assez théoriques, et le métier imaginé
– Amadou Boye, conseiller au CIDJ
C’est le cas d’Ael, qui après un DUT et une licence en techniques de commercialisation, réalise lors de son master que le marketing digital et le métier de community manager ne lui plaisent pas du tout. “Je me suis rendu compte qu’on pouvait trouver ses cours intéressants dès le début !” confie-t-elle après sa réorientation en licence de psychologie.
L’importance de bien s’informer avant de choisir sa filière
Pour éviter les mauvaises surprises, il est primordial de bien se renseigner sur le contenu des formations et les métiers auxquels elles préparent avant de faire son choix sur Parcoursup. Assister aux journées portes ouvertes, échanger avec des étudiants et des professionnels, se renseigner sur les débouchés… Un travail de recherche indispensable pour construire un projet cohérent et réfléchi.
Certains bacheliers se retrouvent également dans des filières par défaut, faute de place dans celles qui les intéressaient vraiment. Un scénario courant qui conduit souvent à une réorientation quelques semaines ou mois après la rentrée.
Quand la réorientation devient une évidence
Si la plupart des étudiants qui souhaitent se réorienter le font en fin de premier semestre ou d’année, pour d’autres le déclic survient plus tard. C’est le cas de Lina, qui après 5 ans d’études de droit et un début de master en droit notarial se rend compte que cette voie ne lui convient pas du tout.
Un soir, je révisais une matière que je ne comprenais pas, j’avais l’impression d’être bête. À partir de ce moment-là, je ne suis plus allée en cours, j’ai loupé mes examens.
– Lina, étudiante en reconversion
Comme Lina, de nombreux étudiants “s’accrochent”, par peur de décevoir leurs proches ou parce qu’ils ont déjà beaucoup investi dans leur filière. Pourtant, persévérer dans une voie qui ne nous correspond pas peut avoir des conséquences désastreuses sur le moral et la santé.
Oser le changement pour trouver sa voie
Au delà des obstacles pratiques, c’est souvent la pression familiale et la peur du regard des autres qui freinent les étudiants dans leur démarche de réorientation. Pourtant, de plus en plus d’établissements mettent en place des dispositifs pour les accompagner et faire en sorte que leur transition se passe au mieux.
À l’Université de Lyon 2 par exemple, un événement dédié est organisé dès novembre pour informer les étudiants sur les possibilités de réorientation. Des conseillers sont également disponibles tout au long de l’année pour les épauler dans leurs démarches et la construction de leur nouveau projet.
Réorientation : et après ?
Si le chemin est parfois semé d’embûches, la réorientation est souvent vécue comme une véritable renaissance par ceux qui osent franchir le pas. C’est le cas d’Afrah, qui après une année de droit, intègre l’UFR d’odontologie et réalise son rêve de devenir chirurgien-dentiste. “La réorientation a été le meilleur choix de ma vie” confie-t-elle.
Même son de cloche pour Ael en psychologie ou encore Pei-Pei, qui après un passage en LLCER anglais puis un master de biologie qui ne lui convenait pas, a fini par intégrer la filière de ses rêves. Des parcours certes atypiques mais qui prouvent qu’avec de la motivation et du courage, il est toujours possible de rebondir et de trouver sa voie.
Et les compétences acquises dans l’ancienne filière ?
Contrairement aux idées reçues, les compétences acquises lors d’un premier parcours ne sont pas perdues, bien au contraire. Que ce soit sur un CV ou lors d’un entretien, cette première expérience est souvent perçue comme un atout par les recruteurs.
Les étudiants garderont toujours quelque chose de leur expérience, même si ce n’est pas palpable.
– Nadine Théophile, responsable de l’observatoire OFIPE
Ael ne regrette pas ses deux premières années de DUT qui lui ont apporté de précieuses compétences en gestion de projet et entrepreneuriat. Des atouts non négligeables pour la suite de son parcours et sa future vie professionnelle.
L’importance de dédramatiser la réorientation
Malgré les avancées, la réorientation reste encore trop souvent perçue comme un échec par les étudiants et leur entourage. Pourtant, c’est un processus naturel qui reflète une évolution et une maturation du projet professionnel. Un message qu’il est important de faire passer, tant auprès des jeunes que des parents.
Car la pression familiale peut être très forte, comme le raconte Pei-Pei dont la mère a longtemps vu sa réorientation comme une “perte de temps”. Un poids parfois difficile à porter pour ces étudiants en quête de sens qui doivent déjà faire face aux obstacles administratifs et financiers.
Accompagner et valoriser les parcours atypiques
Pour Marie-Karine Lhommé, vice-présidente de l’Université Lyon 2, il est indispensable de “changer de regard sur la réorientation” et de valoriser ces parcours atypiques. Une réorientation réussie doit être vue comme un succès, la preuve d’une capacité à rebondir et à se remettre en question.
Un état d’esprit qu’il est essentiel de développer chez les étudiants, trop souvent dans une logique de compétition et de course à “l’excellence”. Car la réorientation n’est pas un échec, mais une étape constructive dans un parcours de vie. La preuve que rien n’est figé et qu’il est toujours possible de changer de voie pour trouver celle qui nous correspond vraiment.
La réorientation, un processus salvateur
Si la réorientation peut sembler périlleuse, elle est souvent salvatrice pour ceux qui osent se lancer. Un nouveau départ qui leur permet enfin de se révéler et de s’épanouir, dans leurs études et leur future vie professionnelle. La preuve qu’il n’est jamais trop tard pour écouter son cœur et changer de cap pour aller vers ce qui nous fait vraiment vibrer.
Alors à tous ceux qui s’interrogent, qui doutent et qui ont peur de se tromper : osez, foncez, n’ayez pas peur du changement. Car c’est souvent en sortant de notre zone de confort que l’on se révèle et que l’on réalise de grandes choses. La réorientation est une aventure, certes semée d’embûches, mais ô combien grisante et libératrice. Une expérience unique qui forge et qui fait grandir. Parole d’étudiants qui ont osé franchir le pas !
