Une relaxe qui fait polémique dans le milieu littéraire ! L’écrivain François Bégaudeau vient d’être blanchi par la justice pour des propos jugés “sexistes” mais pas diffamatoires envers l’historienne Ludivine Bantigny. Un verdict qui choque certains, mais qui ne fait qu’appliquer la loi selon d’autres. Retour sur une affaire qui divise.
Des mots crus sur un forum en ligne
Tout commence en 2020 quand François Bégaudeau, auteur engagé proche de la gauche radicale, écrit sur le forum de son site des propos peu amènes envers l’historienne Ludivine Bantigny :
Dans le milieu radical parisien, Ludivine est connue pour être jamais la dernière. Tous les auteurs de La Fabrique lui sont passés dessus, même Geoffroy de Lagasnerie.
– François Bégaudeau
Des mots crus, sur un registre sexuel, qui visent clairement à rabaisser Mme Bantigny en tant que femme. Choquée, cette dernière a poursuivi l’écrivain en justice pour diffamation.
L’écrivain plaide le second degré
Devant le tribunal, François Bégaudeau a assuré qu’il s’agissait d’un simple “gag” de mauvais goût, sans réelle volonté de nuire. Il a plaidé la liberté d’expression et l’outrance volontaire, marques de fabrique de son style pamphlétaire.
Mais pour Ludivine Bantigny, la pilule ne passe pas. Elle a exprimé à la barre son sentiment de “souillure” face à ces propos dégradants, qui la réduisent au rang d’objet sexuel à disposition des hommes.
La justice tranche : sexiste mais pas diffamatoire
Après examen, le tribunal a tranché. S’il juge les propos de François Bégaudeau “indéniablement empreints de sexisme” et comprend qu’ils aient pu offenser la plaignante, il estime qu’ils ne relèvent pas de la diffamation en droit, car trop imprécis.
Faute de renvoyer à un fait précis, les propos incriminés ne revêtent pas les caractéristiques de la diffamation.
– Jugement du Tribunal de Paris
Une relaxe donc, sur le plan pénal. Mais qui ne gomme en rien le caractère sexiste et blessant des attaques subies par Mme Bantigny, comme le soulignent ses avocats. Le sexisme ordinaire a encore de beaux jours devant lui, semble nous dire ce jugement…
Réactions indignées et débat relancé
Cette relaxe fait déjà polémique, beaucoup y voyant un blanc-seing judiciaire pour le sexisme décomplexé. Les réactions indignées fusent sur les réseaux sociaux :
- Donc on peut traiter une femme de tous les noms, tant que ça reste vague, c’est ok pour la justice ?
- Ça veut dire quoi “pas assez précis” ? Faut carrément donner une liste exhaustive de partenaires pour que ce soit diffamatoire ?
- Bégaudeau se revendique de gauche et progressiste, mais sur les droits des femmes on repassera…
D’autres, moins nombreux, relativisent la portée de ce jugement, rappelant que le sexisme, même détestable, n’est pas toujours pénalement répréhensible. Un débat complexe et passionné qui est loin d’être clos.
Une affaire symptomatique
Au-delà du cas Bégaudeau, cette affaire illustre la persistance des réflexes sexistes dans le milieu littéraire et intellectuel, souvent prompt à donner des leçons de progressisme. Ludivine Bantigny l’analyse avec lucidité :
C’est malheureusement révélateur du sort réservé aux femmes qui s’expriment dans le débat public. Quand on n’est pas d’accord avec nous, on nous renvoie à notre physique ou à notre sexualité supposée, pour nous décrédibiliser.
– Ludivine Bantigny
Un phénomène qui touche de nombreuses autrices et intervenantes, bien au-delà du milieu de l’édition engagée comme La Fabrique. Le chemin vers l’égalité est encore long, et la relaxe de François Bégaudeau n’y aide pas, c’est certain. Espérons que la libération de la parole des femmes finira par faire bouger les lignes, dans la littérature comme ailleurs.