Une étudiante de 23 ans vient d’être relaxée par la justice après avoir tweeté “Brûlez tous les keufs” suite à la mort du jeune Nahel, tué par un policier le 27 juin 2023. Un jugement qui ne manque pas de faire réagir dans un contexte encore marqué par les émeutes urbaines qui avaient suivi le drame.
Retour sur une affaire polémique
Le 1er juillet 2023, en pleine vague d’émeutes suite à la mort de Nahel, cette étudiante au casier judiciaire vierge avait retweeté une vidéo d’interpellation violente en commentant : “La manière dont il lui ébouriffe les cheveux et lui fout une tape au visage ça me rend folle ptn le mépris et l’humiliation qui les font bander tout en utilisant des techni meurtrières comme ça… brûlez tous les keufs“. Un tweet vite supprimé mais qui n’avait pas échappé à la vigilance des autorités.
Suite à un signalement anonyme, une enquête avait été ouverte par le pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH). Un mois plus tard, la jeune femme était interpellée et placée en garde à vue. Les enquêteurs s’étaient même rendus sur son lieu de stage, des mesures jugées disproportionnées par son avocat.
Le tribunal relaxe l’étudiante
Lors du procès début juillet, le parquet avait justifié cette “réponse pénale” par le contexte “particulièrement préoccupant” des émeutes. Mais pour le tribunal, si les termes employés étaient “tout à fait inappropriés”, ils ne pouvaient être interprétés au sens littéral :
Il s’agissait davantage d’un cri de révolte et de l’expression symbolique, par une image forte, du rejet d’une police ayant recours à des actes violents.
– Jugement du tribunal
Selon les juges, aucun “lecteur moyennement avisé” ne pouvait y voir une incitation directe à s’en prendre aux forces de l’ordre. Pour entrer en voie de condamnation, il aurait fallu que l’autrice ait la volonté de susciter le passage à l’acte.
Un jugement qui questionne la liberté d’expression
Pour l’avocat de l’étudiante, Me Raphaël Kempf, ce jugement est une victoire pour la liberté d’expression. Selon lui, celle-ci doit permettre en démocratie d’exprimer des “critiques radicales” sans risquer une sanction pénale.
Mais d’autres s’inquiètent d’un double standard dans le traitement judiciaire des propos haineux selon leur cible. De fait, de nombreux internautes ont été condamnés ces dernières années pour des tweets nettement moins virulents visant d’autres catégories de population.
Cette relaxe soulève donc de nombreuses questions. Quelles sont les limites de la liberté d’expression sur les réseaux sociaux ? Peut-on réellement dissocier des propos de leur contexte ? Le ressentiment envers les forces de l’ordre est-il une circonstance atténuante ? Autant d’interrogations qui divisent l’opinion dans une société encore sous le choc des émeutes post-Nahel.