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Réfugiées de Sierra Leone au Liban: un entrepôt comme abri

Prises au piège de la guerre au Liban, plus de 170 réfugiées de Sierra Leone ont trouvé refuge dans un entrepôt près de Beyrouth. Fuyant les bombardements israéliens, elles rêvent maintenant de rentrer chez elles auprès de leurs familles. Mais le chemin du retour s'annonce semé d'embûches...

Dans un entrepôt désaffecté en périphérie de Beyrouth, Jaiatu Koroma et son bébé de cinq mois ont trouvé un refuge précaire. Comme elle, plus de 170 femmes de Sierra Leone, pour la plupart des travailleuses étrangères, se sont retrouvées piégées par la guerre qui fait rage au Liban entre Israël et le Hezbollah. Fuyant les bombardements israéliens qui pilonnent la banlieue sud de la capitale libanaise, elles ont échoué dans cet abri de fortune géré par des bénévoles, surnommé The Shelter.

Un entrepôt comme unique refuge

Autrefois, ce vaste bâtiment en béton couvert de graffitis servait à organiser des fêtes. Désormais, il accueille ces femmes sur des rangées de matelas posés à même le sol, au milieu des baluchons emportés à la hâte. Chaises en plastique, tables de jardin, canapés, berceau et table à langer cédés par des donateurs meublent cet espace devenu refuge. Jaiatu Koroma, 21 ans, son bonnet rouge sur la tête, exprime sa gratitude pour “la nourriture, l’eau” et les couches fournies. Mais son seul souhait est de “rentrer dans son pays”.

Une cohabitation solidaire

Dans cet entrepôt, le quotidien s’organise tant bien que mal entre les réfugiées. Certaines transportent le linge pour le faire sécher, d’autres se reposent sur leurs matelas en discutant ou en se coiffant mutuellement. Les bénévoles, eux, gèrent les tracas du quotidien : livraisons d’eau pour les douches, raccordement à un générateur électrique. Selon Déa Hage Chahine, une volontaire, le nombre de femmes accueillies est passé de 60 à 175 en seulement 21 jours. Certaines nécessitent une assistance médicale ou psychologique. “On travaille sans relâche”, souligne-t-elle.

Prise au piège de la guerre

Depuis fin septembre, les frappes israéliennes se sont intensifiées sur les fiefs du Hezbollah, dont la banlieue sud de Beyrouth, faisant plus de 1550 morts côté libanais selon les autorités. Cette escalade militaire fait suite à des échanges de tirs transfrontaliers un peu plus de 20 ans après le retrait de l’armée israélienne du Sud-Liban. Le Hezbollah avait alors ouvert un “front” en soutien au Hamas palestinien. Aujourd’hui, ce sont des centaines de milliers de personnes qui ont dû fuir leurs foyers.

Le défi du rapatriement

Pour aider au rapatriement de ces femmes qui parfois n’ont plus de passeports, les bénévoles ont lancé une collecte de dons en ligne. Mme Hage Chahine dénonce la “kafala”, un système de parrainage controversé utilisé pour faire venir les travailleurs étrangers au Liban, prêtant le flanc à de nombreux abus. Elle fustige aussi un certain “racisme” qui relègue ces travailleurs au rang “d’humains de seconde classe”.

Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), environ 17 500 des 180 000 migrants recensés au Liban ont été déplacés par le conflit. L’OIM a reçu 15 000 requêtes pour des retours assistés, dont 1300 émanant de ressortissants sierra-léonais. Le consulat de Sierra Leone œuvre à délivrer des documents de voyage d’urgence pour faciliter ces rapatriements, car “un nombre important de nos concitoyens sont bloqués”, confirme un responsable.

Laissez-moi rentrer auprès d’eux. Laissez-nous aller dans notre pays. On veut sauver notre vie..

– Susan Baimda, réfugiée de Sierra Leone

Susan Baimda, 37 ans, qui a trouvé refuge à The Shelter il y a deux semaines, ne rêve que de retrouver ses quatre enfants, qu’elle n’a vus que sur l’écran de son smartphone depuis trois ans qu’elle a quitté la Sierra Leone. Même si à l’entrepôt “tout le monde prend soin” d’elles, elle veut rentrer chez elle, comme toutes les autres réfugiées.

Un avenir incertain

Malgré la mobilisation des bénévoles et les efforts des autorités, le sort de ces réfugiées de Sierra Leone reste très incertain. Prises dans l’étau d’une guerre qui les dépasse, elles sont tributaires de l’évolution d’un conflit complexe aux ramifications régionales. Leur situation met aussi en lumière la précarité et la vulnérabilité des travailleurs étrangers au Liban, soumis à un système qui fait polémique.

Leur espoir de retrouver leur patrie et leurs proches est aujourd’hui suspendu à l’obtention de ces précieux sésames que sont les documents de voyage. Et à la capacité de la communauté internationale à organiser et financer leur rapatriement dans un contexte chaotique. Un défi logistique et humanitaire de taille. En attendant, l’entrepôt est leur seul refuge. Une fragile bulle de sécurité dans un Liban en guerre où se mêlent leurs rêves de retour et la dure réalité d’un exil forcé.

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