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Réforme controversée au Nicaragua : vers une présidence Ortega-Murillo ?

Au Nicaragua, le président Ortega cherche à consolider son pouvoir avec une réforme constitutionnelle polémique. Sa femme deviendrait "co-présidente" et les opposants sont réprimés. Quelles en seront les conséquences pour le pays ?

Le Nicaragua se trouve à nouveau sous les projecteurs avec une réforme constitutionnelle initiée par le président Daniel Ortega qui suscite de vives controverses. Ce changement majeur élèverait sa femme, Rosario Murillo, actuellement vice-présidente, au rang de “co-présidente” et renforcerait considérablement l’emprise du couple présidentiel sur le pays.

Selon les informations relayées par plusieurs médias internationaux, dont l’AFP, cette réforme a été soumise à l’Assemblée nationale, dominée par le parti au pouvoir, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN). Son adoption ne fait guère de doute au vu du contrôle exercé par le président Ortega sur les institutions du pays.

Une présidence bicéphale et un mandat prolongé

Parmi les changements notables introduits par cette réforme figure l’instauration d’une “co-présidence”, composée d’un “co-président” et d’une “co-présidente” qui seraient désignés tous les six ans, et non plus tous les cinq ans comme c’est le cas actuellement. Cette mesure semble taillée sur mesure pour permettre à Daniel Ortega et son épouse Rosario Murillo de se maintenir au sommet de l’État.

Daniel Ortega, ancien guérillero sandiniste âgé de 78 ans, dirige le Nicaragua depuis 2007. Son gouvernement est accusé par la communauté internationale, notamment les États-Unis et l’Union européenne, d’avoir instauré un régime autoritaire qui muselle toute opposition et bafoue les droits de l’homme.

Répression des opposants et exil forcé

La réforme prévoit également des mesures punitives à l’encontre des opposants au régime. Ainsi, les personnes considérées comme “traîtres à la patrie” seront déchues de leur nationalité nicaraguayenne. Cette disposition fait écho à la vague de répression qui a suivi les manifestations anti-gouvernementales de 2018. Selon des sources proches du dossier, environ 450 opposants, journalistes, hommes d’affaires et membres du clergé ont été expulsés du pays et privés de leur nationalité.

Le couple présidentiel accuse l’Église catholique, les médias indépendants et les ONG d’avoir soutenu ce qu’il considère comme une tentative de coup d’État orchestrée par Washington. Depuis, plus de 278 journalistes ont dû s’exiler, principalement au Costa Rica et aux États-Unis, tandis qu’une cinquantaine de religieux ont été envoyés à l’étranger, en particulier au Vatican.

Contrôle accru sur les médias et la société civile

Le projet de réforme prévoit également un contrôle renforcé sur les médias. L’État sera chargé de veiller à ce que les organes de presse ne soient pas “soumis à des intérêts étrangers” et ne diffusent pas de “fausses nouvelles”. Cette mesure fait craindre une nouvelle atteinte à la liberté de la presse déjà fortement malmenée dans le pays.

En outre, le gouvernement envisage de créer une “police volontaire” composée de civils pour épauler les forces de sécurité. Lors des manifestations de 2018, des hommes armés et cagoulés étaient déjà intervenus pour réprimer violemment les protestations étudiantes, contraignant des milliers de Nicaraguayens à prendre le chemin de l’exil.

Vers un Nicaragua “révolutionnaire” sous la coupe du FSLN

Enfin, la réforme entend définir le Nicaragua comme un État “révolutionnaire” et intégrer les symboles du FSLN, comme son drapeau rouge et noir, parmi les emblèmes nationaux. Cette disposition consacre un peu plus la mainmise du parti sandiniste sur les institutions et la société nicaraguayenne.

Cette réforme constitutionnelle, si elle est adoptée comme prévu par l’Assemblée nationale, risque de renforcer la dérive autoritaire du régime Ortega-Murillo et d’exacerber les tensions dans un pays déjà profondément divisé. La communauté internationale, qui a multiplié les sanctions à l’encontre du gouvernement nicaraguayen, suivra avec attention l’évolution de la situation, craignant une nouvelle vague de répression et d’exil forcé des voix dissidentes.

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