La réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis pour un second mandat soulève de nombreuses interrogations quant à l’avenir des relations entre Washington et le continent africain. Si les dirigeants africains se sont empressés de féliciter le locataire de la Maison Blanche, appelant à une coopération dans le respect mutuel, l’orientation isolationniste prônée par Trump et son slogan “America First” font planer des incertitudes sur plusieurs dossiers clés.
Quel impact sur les échanges commerciaux ?
Au cœur des relations économiques entre les États-Unis et l’Afrique, l’accord commercial AGOA (African Growth and Opportunity Act) permet depuis 2000 à de nombreux pays africains d’exporter une large gamme de produits vers le marché américain en franchise de droits de douane. Mais face aux velléités protectionnistes de Donald Trump, qui a déjà promis d’imposer des taxes importantes sur les importations étrangères, l’avenir de ce dispositif préférentiel, qui doit être renouvelé l’an prochain, apparaît incertain.
Sous une administration Trump, avec son mantra +America First+, la politique commerciale serait probablement insulaire et transactionnelle. Le maintien de l’AGOA pourrait être légitimement menacé.
Ronak Gopaldas, consultant à l’Institut d’études de sécurité (ISS)
Autre enjeu, la façon dont la rivalité entre les États-Unis et la Chine, qui multiplie les investissements sur le continent africain, va se jouer sous l’ère Trump II. Washington soutient d’ambitieux projets d’infrastructures comme le “couloir de Lobito” reliant la Zambie et la RDC à l’Angola, pour concurrencer l’influence grandissante de Pékin.
Engagement américain contre le jihadisme
Les forces américaines jouent un rôle important dans la formation et la lutte contre les groupes jihadistes affiliés à Al-Qaïda ou à l’État islamique qui sévissent en Afrique. Lors de son premier mandat, Donald Trump avait ordonné le retrait des troupes de Somalie, avant que son successeur Joe Biden ne les renvoie. Mais le Niger a récemment demandé aux soldats américains de quitter le pays, à l’instar du Mali ou du Burkina Faso qui se sont tournés vers la Russie.
Quel sera l’engagement militaire des États-Unis en Afrique sous la nouvelle administration Trump, alors que ce dernier a déjà critiqué les milliards dépensés pour l’Ukraine ? Des discussions sont en cours avec les partenaires africains pour “réinitialiser” l’aide sécuritaire, selon le chef du commandement américain pour l’Afrique (Africom), mais les incertitudes demeurent.
Aide au développement et climat
Avec 4 milliards de dollars prévus pour 2024, les États-Unis figurent parmi les principaux bailleurs de l’aide au développement en Afrique. Mais Donald Trump avait tenté lors de son premier mandat de réduire drastiquement ces fonds, avant de se heurter au Congrès. Des interrogations planent déjà sur l’avenir de programmes emblématiques comme le plan de lutte contre le sida (Pepfar).
Sur le front climatique, Donald Trump, climatosceptique notoire qui avait retiré son pays de l’Accord de Paris, pourrait freiner les efforts vers des énergies plus durables, au détriment du continent africain qui subit le plus les effets dévastateurs du réchauffement. Son retour fait craindre un nouveau coup de frein dans les négociations mondiales sur le climat.
Si l’Afrique ne devrait pas figurer en tête des priorités de Donald Trump, l’avenir des relations avec ce partenaire stratégique pour les intérêts américains s’annonce incertain. Entre velléités isolationnistes, recentrage sur les enjeux intérieurs et volonté de contrer l’influence chinoise, la réélection de Trump ouvre une nouvelle ère dans la coopération parfois tumultueuse entre Washington et le continent.