La tension monte à l’approche de la déclaration de politique générale très attendue du Premier ministre François Bayrou. D’intenses négociations se sont déroulées ces derniers jours entre le gouvernement et l’opposition, notamment avec le Parti socialiste. Mais malgré ces tractations de la dernière chance, les socialistes sont ressortis déçus de leurs échanges à Matignon, déplorant le manque « d’avancée significative », en particulier sur le dossier brûlant des retraites.
Des discussions marathon pour tenter de trouver un accord
Conscient de la fragilité de sa majorité, François Bayrou joue son va-tout pour rallier une partie de la gauche à sa cause et ainsi éviter une motion de censure. Des émissaires du gouvernement ont multiplié les rencontres avec les responsables du PS, espérant arracher un accord de non-censure en échange de concessions, notamment sur le budget.
Les socialistes ont ainsi été reçus pendant de longues heures par les ministres des Comptes publics, du Travail et de l’Économie. Mais à l’issue de cette journée marathon, leurs espoirs semblent douchés. « Au moment où on parle, il n’y a pas de big deal », a regretté le député PS Jérôme Guedj, déplorant que le gouvernement ait présenté une « copie budgétaire inacceptable en l’état ».
Le nœud du problème : la réforme des retraites
Mais c’est surtout sur le dossier explosif des retraites que le fossé semble insurmontable. Selon des sources concordantes, les ministres auraient en effet fermé la porte à une suspension de la réforme, pourtant réclamée comme un préalable par les socialistes.
La suspension c’est le gage donné à une discussion qui ne peut pas être un enfumage.
Olivier Faure, Premier secrétaire du PS
Pour le patron du PS Olivier Faure, il est impensable de négocier sans garantie d’une pause dans l’application de la réforme, le temps de discuter pendant 6 mois avec les partenaires sociaux. Une ligne rouge visiblement infranchissable pour l’exécutif.
Bayrou pris en étau entre les attentes de la gauche et de sa majorité
Il faut dire que François Bayrou se retrouve pris en tenaille entre la pression de la gauche et la fermeté de sa propre majorité. Revenir sur les retraites serait vu comme une capitulation par les députés Renaissance et LR. Certains menacent même de ne pas voter la confiance si le gouvernement cédait.
Résultat, le Premier ministre semble avoir peu de marge de manœuvre pour satisfaire les socialistes sans braquer ses troupes. Un équilibre impossible qui laisse présager des prochaines heures très compliquées, à la veille d’un discours crucial pour la survie du gouvernement.
La menace d’une motion de censure
Si officiellement les socialistes maintiennent la porte ouverte, les espoirs d’un accord semblent désormais très minces. Les mots sont durs : « François Bayrou a été rattrapé par sa droite », estime un cadre du PS. Sans garanties supplémentaires, le groupe socialiste pourrait donc se résoudre à voter la censure aux côtés des Insoumis.
Mais grâce au refus du RN de s’allier à la gauche, le gouvernement devrait réussir à passer ce cap et obtenir la confiance, même d’une courte tête. François Bayrou pourrait alors se maintenir à Matignon, mais avec une majorité plus que jamais fragilisée et une opposante renforcée. Une victoire en demi-teinte qui présage d’autres batailles à venir.
Quel avenir pour le PS ?
Au-delà du sort du gouvernement, c’est aussi l’avenir du Parti socialiste qui se joue. En négociant sans obtenir de vraies concessions, le PS prend le risque d’être accusé par LFI de « compromission » avec le pouvoir macroniste.
Le premier secrétaire Olivier Faure, reconduit de justesse à la tête du parti, joue gros. S’il apparaît comme celui qui a lâché la proie pour l’ombre, sa stratégie et son autorité pourraient être fortement contestées en interne. Au PS, certains craignent qu’en cas d’échec, ce nouvel épisode n’accentue encore un peu plus les divisions et l’affaiblissement d’un parti en crise.
Pour éviter cela, Olivier Faure se veut ferme face au gouvernement, martelant ses « lignes rouges » sur les retraites et le budget. Mais faute d’obtenir satisfaction, il pourrait être pris à son propre piège, accusé par sa gauche de naïveté et par sa droite de jusqu’au-boutisme.
Pris en étau, le PS joue sans doute une partie de son avenir dans ces négociations à haut risque. Avec pour l’instant un constat amer : celui d’un dialogue de sourds et d’un rendez-vous manqué avec l’exécutif. À moins d’un revirement de dernière minute, François Bayrou devrait donc défendre demain sa politique sans le soutien des socialistes. Un échec qui promet d’autres passes d’armes politiques dans les mois à venir.