Un vent de révolte souffle sur l’Eglise catholique belge. En 2023, les demandes de radiation des registres du baptême ont atteint un niveau sans précédent, avec pas moins de 14 251 requêtes enregistrées. Un chiffre vertigineux, quand on sait que les années précédentes, ce nombre gravitait généralement autour de 1 200. Comment expliquer une telle déferlante ? D’après les évêques belges, ce phénomène serait en grande partie lié au “dégoût” suscité par les révélations chocs d’un documentaire diffusé à l’automne dernier.
Le scandale des violences sexuelles au cœur des témoignages
Intitulé “Godvergeten” (“les oubliés de Dieu”), ce documentaire choc diffusé sur la chaîne publique flamande VRT a donné la parole à une vingtaine de victimes, pour la plupart des hommes âgés. Ils y livrent des récits glaçants des agressions sexuelles et viols subis dans leur adolescence, alors qu’ils fréquentaient des institutions catholiques. Des témoignages qui ont remis sur le devant de la scène ce scandale qui ronge l’Eglise depuis des années.
La Flandre et Bruxelles, épicentres de la révolte
Fait notable : l’immense majorité (98%) des demandes de radiation provient de Bruxelles et du nord néerlandophone du pays, la Flandre. La Wallonie, partie francophone au sud, semble peu concernée par ce mouvement. Cette disparité régionale interroge sur les raisons profondes de ce rejet massif de l’institution catholique.
Aucune raison n’est demandée lors d’une demande de radiation, mais beaucoup ont spontanément indiqué qu’ils le faisaient par dégoût pour les abus sexuels dans l’Eglise catholique et la culture du silence présente dans le passé.
La conférence des évêques de Belgique
Le Pape appelle l’Eglise à “demander pardon”
Face à l’ampleur du scandale, le Pape François lui-même a dû intervenir. Lors d’une visite en Belgique fin septembre, il a déclaré que l’Eglise devait “avoir honte” et “demander pardon” pour ces crimes odieux commis en son sein. Des mots forts, relayés par le Roi Philippe et le Premier ministre Alexander De Croo, qui ont souligné à quel point ces affaires, couplées à celles des adoptions forcées, avaient “gravement entamé” la confiance des Belges envers l’Eglise.
Une confiance profondément ébranlée
Et pour cause. Selon un récent sondage, seuls 43% des 11,7 millions d’habitants du royaume se considèrent encore comme catholiques. Un chiffre en chute libre, qui traduit le malaise profond qui traverse l’institution. Face à ce désamour grandissant, l’Eglise belge parviendra-t-elle à se réinventer et à regagner la confiance perdue ? L’avenir le dira. Mais une chose est sûre : le chemin sera long et semé d’embûches.
Au-delà des mots, c’est un véritable examen de conscience et un profond changement de culture qui s’imposent. Car derrière chaque demande de radiation, c’est une histoire brisée, une foi trahie, une confiance anéantie. Autant de blessures intimes que l’Eglise se doit de reconnaître et de guérir si elle veut retrouver sa place dans le cœur des Belges.
