Les enchères d’art ne cessent de révéler de nouvelles étoiles, et cette fois, c’est au tour d’un tableau emblématique de René Magritte de briller sous les projecteurs. Mardi soir, chez Christie’s à New York, “L’empire des lumières”, une œuvre phare du maître surréaliste belge, a été adjugée pour la somme record de 121,1 millions de dollars, frais inclus. Un montant historique qui éclaire d’une lumière éclatante le marché de l’art en cette année de centenaire du mouvement surréaliste.
Un paradoxe visuel emblématique
Réalisé dans les années 1950, “L’empire des lumières” est un tableau qui joue sur les paradoxes visuels chers à Magritte. On y voit une maison plongée dans la nuit, éclairée uniquement par un réverbère, tandis qu’un ciel d’un bleu éclatant évoque une scène de jour. Ce contraste saisissant entre ombre et lumière, entre nuit et jour, est caractéristique de la série de toiles portant ce même titre, dans laquelle Magritte explore les frontières de notre perception.
L’œuvre mise aux enchères mardi soir provient de la collection privée de l’architecte d’intérieur américaine Mica Ertegun, figure influente du monde de l’art et épouse du magnat de la musique Ahmet Ertegun, fondateur du label Atlantic Records. Proposée avec une estimation entre 60 et 80 millions de dollars, la toile a finalement été emportée pour 121,1 millions, établissant ainsi un nouveau record pour une œuvre de Magritte et pour une peinture surréaliste.
Des enchères sous le signe du 7e art
Outre sa valeur artistique intrinsèque, “L’empire des lumières” possède un lien particulier avec le monde du cinéma. En effet, le tableau avait servi d’inspiration au réalisateur américain William Friedkin pour son film d’épouvante culte, “L’Exorciste”, sorti en 1973. Une référence qui a sans doute contribué à attiser l’intérêt des collectionneurs pour cette œuvre singulière.
Ce résultat exceptionnel témoigne de la fascination que continue d’exercer l’univers de Magritte sur le public, et de la valeur toujours croissante accordée aux œuvres rares issues de collections prestigieuses.
Alex Rotter, président du département d’art d’après-guerre et contemporain chez Christie’s
Un marché de l’art en quête de records
Si cette vente constitue un record absolu pour Magritte et pour le surréalisme, elle s’inscrit plus largement dans un contexte de marché de l’art en quête perpétuelle de nouveaux sommets. Malgré un certain ralentissement observé depuis la pandémie de Covid-19, les enchères d’œuvres prestigieuses continuent de susciter l’enthousiasme des collectionneurs, prêts à débourser des sommes astronomiques pour acquérir des pièces d’exception.
Ainsi, au cours de la même soirée, un tableau de l’artiste américain Ed Ruscha, “Standard Station, Ten-Cent Western Being Torn in Half”, a été adjugé 68,2 millions de dollars, signant là aussi un nouveau record pour ce représentant majeur du pop art. Preuve que malgré les incertitudes économiques, le marché haut de gamme reste dynamique, porté par une demande soutenue pour les œuvres rares et emblématiques.
Magritte, star intemporelle
Au-delà de l’effervescence des enchères, ce record pour “L’empire des lumières” vient confirmer le statut de Magritte comme l’un des artistes les plus recherchés et les plus cotés de sa génération. Ses toiles oniriques, peuplées d’objets détournés et de juxtapositions incongrues, continuent de fasciner le public et les collectionneurs, près de 50 ans après sa disparition.
En ces temps troublés, où l’art semble parfois déconnecté des réalités, l’univers de Magritte apparaît comme un refuge, un espace de liberté où l’imagination peut s’exprimer sans entrave. Un monde où un ciel diurne peut cohabiter avec une scène nocturne, où les certitudes vacillent pour laisser place à la poésie et au mystère. Une vision qui, à l’évidence, n’a pas fini de nous enchanter et de nous surprendre, comme en témoigne cette vente record qui fera date dans l’histoire du marché de l’art.
Les clés du succès
- Rareté et qualité exceptionnelle de l’œuvre
- Provenance prestigieuse (collection Ertegun)
- Lien avec l’univers du cinéma (“L’exorciste”)
- Engouement durable pour Magritte et le surréalisme
- Contexte de marché favorable aux enchères record
Alors que le monde de l’art célèbre cette année le centenaire de la naissance officielle du surréalisme, ce coup de marteau à 121 millions de dollars résonne comme un hommage vibrant à l’un de ses plus grands représentants. Une lumière qui ne risque pas de s’éteindre de sitôt, et qui continuera longtemps de nous guider à travers les méandres fascinants de la création artistique.