Le 15 novembre 1988, à Alger, Yasser Arafat, figure emblématique de l’Organisation de libération de la Palestine, proclamait l’État de Palestine. Près de quatre décennies plus tard, ce geste résonne encore dans les couloirs de la diplomatie mondiale. Alors que la guerre fait rage à Gaza et que la Cisjordanie reste sous occupation, la question de la reconnaissance de cet État autoproclamé divise toujours. Pourquoi certains pays s’engagent-ils dans cette reconnaissance tandis que d’autres s’y opposent fermement ? Cet article explore les dynamiques complexes de cette reconnaissance, ses implications et les évolutions récentes qui redessinent la carte géopolitique.
Un Tournant Diplomatique Majeur
En septembre 2025, la reconnaissance de l’État de Palestine a franchi un cap symbolique. Lors de l’Assemblée générale de l’ONU, plusieurs pays européens, dont la France, la Belgique, le Luxembourg et Malte, ont officiellement reconnu cet État, rejoignant ainsi une liste déjà étoffée par le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie et le Portugal. Ces annonces, survenues après près de deux ans de conflit dévastateur à Gaza, marquent un tournant. Mais que signifie réellement cette vague de reconnaissances, et pourquoi suscite-t-elle autant de débats ?
Quels Pays Reconnaissent la Palestine ?
Sur les 193 membres de l’ONU, environ 151 pays reconnaissent aujourd’hui l’État de Palestine, soit près de 80 % des nations. Ce chiffre, impressionnant, reflète un mouvement global en faveur de cette reconnaissance, bien que des incertitudes subsistent pour certains pays africains, où les données récentes manquent. Parmi les premiers à avoir franchi le pas, l’Algérie se distingue : dès 1988, elle a soutenu la proclamation de Yasser Arafat, suivie par de nombreux pays arabes, africains et latino-américains.
En Asie, des puissances comme la Chine et l’Inde figurent parmi les soutiens de longue date. La Russie, elle aussi, a rejoint cette liste dès les premières années. Plus récemment, l’Europe, longtemps divisée, a vu une accélération des reconnaissances. Outre les annonces de 2025, des pays comme la Suède (2014), la Norvège, l’Espagne, l’Irlande et la Slovénie ont également reconnu la Palestine depuis le début du conflit à Gaza en 2023.
- Pays arabes : Quasi-unanimité dans la reconnaissance.
- Afrique : Majorité des nations, avec l’Algérie en pionnière.
- Amérique latine : Presque tous les pays soutiennent la Palestine.
- Europe : Une majorité croissante, avec la France et le Royaume-Uni en 2025.
« La reconnaissance de la Palestine est un acte symbolique, mais elle place la Palestine et Israël sur un pied d’égalité en droit international. »
Philippe Sands, avocat et professeur de droit
Qui Refuse de Reconnaître l’État Palestinien ?
Environ 39 pays ne reconnaissent pas l’État de Palestine, avec en tête les États-Unis et Israël. Le gouvernement israélien, sous la direction de Benjamin Netanyahu, rejette catégoriquement l’idée d’un État palestinien. En 2024, le Parlement israélien a même adopté une résolution s’opposant à sa création, une position qui cristallise les tensions. Parmi les autres pays réfractaires, on trouve des alliés proches d’Israël ou des États-Unis, comme le Japon, la Corée du Sud, Singapour, le Cameroun, le Panama et la plupart des nations d’Océanie.
En Europe, des pays comme l’Italie et l’Allemagne restent fermement opposés à une reconnaissance unilatérale, préférant une solution négociée dans le cadre d’un processus de paix. Cette division européenne, bien que moins marquée qu’auparavant, illustre la complexité des enjeux géopolitiques.
Pays/Continent | Position |
---|---|
États-Unis | Non-reconnaissance |
Israël | Rejet total |
Europe (Italie, Allemagne) | Non-reconnaissance |
Afrique (Cameroun) | Non-reconnaissance |
Qu’Implique la Reconnaissance d’un État ?
La reconnaissance d’un État est un acte à la croisée du politique et du juridique, comme l’explique Romain Le Boeuf, professeur de droit international. Selon lui, les États sont libres de choisir le moment et la forme de cette reconnaissance, qu’elle soit explicite (une déclaration officielle) ou implicite (des relations diplomatiques). Cependant, il n’existe pas de registre officiel pour recenser ces actes, ce qui rend la question subjective.
En droit international, un État est défini par trois critères : un territoire, une population et un gouvernement indépendant. La reconnaissance ne crée pas l’État, mais elle lui confère une légitimité symbolique. Dans le cas de la Palestine, elle renforce l’idée que cet État répond à ces critères, malgré l’occupation israélienne en Cisjordanie et la destruction de Gaza.
« Le droit international est clair : la reconnaissance ne crée pas l’État, pas plus que son absence n’empêche son existence. »
Romain Le Boeuf, professeur de droit international
Pour les pays qui reconnaissent la Palestine, cet acte est souvent perçu comme un soutien à la cause palestinienne et une pression sur Israël pour relancer les négociations de paix. Cependant, pour les opposants, comme les États-Unis, une reconnaissance unilatérale pourrait compromettre les pourparlers bilatéraux.
L’Impact du Conflit à Gaza
Le conflit déclenché par l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 a joué un rôle déterminant dans la récente vague de reconnaissances. Les images de destruction à Gaza, combinées à la réponse militaire israélienne, ont ravivé le débat sur la question palestinienne. Depuis, 19 pays supplémentaires ont reconnu l’État de Palestine, un chiffre qui témoigne de l’impact émotionnel et politique de cette guerre.
En Europe, longtemps réticente, les mentalités évoluent. Des pays comme la France et le Royaume-Uni, membres influents du G7, ont franchi le pas en 2025, marquant un changement de paradigme. Cette dynamique pourrait encourager d’autres nations à reconsidérer leur position, bien que des obstacles subsistent.
- 1988 : Proclamation de l’État de Palestine, suivie de reconnaissances immédiates.
- Années 2010 : Deuxième vague de reconnaissances, notamment en Europe.
- 2023-2025 : Nouvelle série de reconnaissances après le conflit à Gaza.
Un Acte Symbolique aux Enjeux Réels
Si la reconnaissance de la Palestine est avant tout symbolique, elle a des répercussions concrètes. Elle renforce la position de l’Autorité palestinienne sur la scène internationale et légitime ses revendications. Elle peut également influencer les dynamiques de pouvoir dans les négociations de paix, bien que celles-ci semblent aujourd’hui au point mort.
Pour les Palestiniens, chaque nouvelle reconnaissance est une victoire diplomatique, un pas vers la reconnaissance universelle. Pourtant, l’absence de consensus, notamment parmi les grandes puissances, maintient la question dans une zone d’incertitude. Les États-Unis, par leur poids géopolitique, continuent de freiner ce mouvement, tout comme Israël, qui y voit une menace à sa sécurité.
Vers un Avenir Incertain
La reconnaissance de l’État de Palestine, bien que soutenue par une large majorité des nations, ne résout pas les défis fondamentaux : l’occupation de la Cisjordanie, la reconstruction de Gaza et la recherche d’une solution à deux États. Chaque annonce, comme celles de la France ou du Royaume-Uni en 2025, ravive l’espoir pour certains et les tensions pour d’autres. Mais une question demeure : ces gestes diplomatiques suffiront-ils à changer la donne sur le terrain ?
Le débat sur la reconnaissance de la Palestine illustre la complexité des relations internationales. Entre symbolisme, droit et politique, il reflète les aspirations d’un peuple et les résistances d’un monde divisé. Alors que la communauté internationale continue de se positionner, l’avenir de la Palestine reste suspendu à des négociations qui peinent à aboutir.
Points clés à retenir :
- 80 % des pays de l’ONU reconnaissent la Palestine en 2025.
- La guerre à Gaza a accéléré les reconnaissances, notamment en Europe.
- Les États-Unis et Israël restent fermement opposés à cette reconnaissance.
- La reconnaissance est un acte symbolique mais aux implications politiques majeures.
En conclusion, la reconnaissance de l’État de Palestine est bien plus qu’une formalité diplomatique. Elle incarne un espoir pour des millions de Palestiniens, tout en révélant les fractures du système international. Alors que le monde observe, chaque nouvelle reconnaissance redessine les contours d’un conflit qui, malgré les décennies, reste loin d’être résolu.