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Recep Tayyip Erdogan condamne l’assassinat de son “frère” Ismaïl Haniyeh

Le président turc Erdogan a vivement condamné l'assassinat de son "frère" Ismaïl Haniyeh, chef du Hamas. Ses propos dénonçant la "barbarie sioniste" suscitent la polémique. Quelles conséquences pour les relations déjà tendues entre Ankara et Israël ? Une situation...

Le ton est grave et l’émotion palpable dans le message publié par le président turc Recep Tayyip Erdogan sur le réseau social X (ex-Twitter) ce lundi 31 juillet. Le chef de l’État y condamne avec la plus grande fermeté “l’assassinat perfide” de celui qu’il qualifie de “frère”, Ismaïl Haniyeh, le dirigeant politique du Hamas. Ce mouvement islamiste palestinien, considéré comme terroriste par Israël, l’Union européenne et les États-Unis, contrôle de facto la bande de Gaza depuis 2007.

“Que Dieu ait pitié de mon frère Ismaïl Haniyeh, tombé en martyr à la suite de cette odieuse attaque”, écrit le président Erdogan, avant de pointer du doigt la responsabilité d’Israël, dénonçant “la barbarie sioniste”. Des accusations graves, qui risquent de tendre encore un peu plus les relations déjà compliquées entre Ankara et l’État hébreu.

Un “frère” et allié de longue date

Le président turc ne cache pas sa proximité avec le Hamas, qu’il considère comme un mouvement de “résistance” légitime face à l’occupation israélienne. En 2017, il avait accueilli en grande pompe à Istanbul Ismaïl Haniyeh, tout juste élu à la tête du bureau politique du Hamas. Les deux hommes affichaient alors leur connivence, Erdogan qualifiant le chef du Hamas de “frère” et louant “la lutte du peuple palestinien”.

Une alliance qui irrite profondément Israël, qui accuse régulièrement la Turquie de soutenir et d’héberger sur son sol des membres du Hamas impliqués dans des activités terroristes. En 2018, après des mois de tensions diplomatiques, Ankara avait même temporairement rappelé son ambassadeur en Israël pour protester contre la répression meurtrière de manifestations palestiniennes à Gaza.

Un équilibre diplomatique fragile

Malgré ces désaccords profonds, la Turquie et Israël ont toujours maintenu un minimum de relations, essentiellement motivées par des intérêts économiques et sécuritaires. Mais la virulente sortie d’Erdogan risque de fragiliser encore cet équilibre déjà précaire.

Côté israélien, la réaction ne s’est pas fait attendre. Le Premier ministre Benyamin Netanyahou a fermement rejeté les accusations de “barbarie”, qualifiant les propos d’Erdogan de “rhétorique haineuse et mensongère”. Il a rappelé qu’Ismaïl Haniyeh était considéré comme un “terroriste” par la communauté internationale, responsable de multiples attaques contre des civils israéliens.

Il ne peut y avoir de paix et de stabilité dans la région tant que des dirigeants continueront de soutenir aveuglément des organisations terroristes.

– Benyamin Netanyahou, Premier ministre israélien

Conséquences pour Gaza et l’avenir du Hamas

Au-delà des échanges acrimonieux entre dirigeants, c’est l’avenir même du Hamas et de la bande de Gaza qui semble en jeu. Privé de son leader historique, le mouvement islamiste pourrait être fragilisé et sujet à des luttes de pouvoir internes, avec le risque d’une escalade des tensions.

  • La succession d’Ismaïl Haniyeh à la tête du Hamas s’annonce complexe et potentiellement conflictuelle.
  • L’état de siège imposé par Israël à Gaza depuis plus de 15 ans risque de s’aggraver, accentuant la crise humanitaire.
  • Une reprise des hostilités avec Israël n’est pas à exclure, avec le risque de nouvelles victimes civiles.

Face à ces défis, la communauté internationale semble bien en peine d’offrir des perspectives crédibles. Les appels au calme et au dialogue, rituellement lancés après chaque crise, peinent à se concrétiser sur le terrain. Et les soutiens dont bénéficie le Hamas, comme celui de la Turquie, sont vus par beaucoup comme un obstacle à la paix.

Tant qu’Erdogan et d’autres continueront à faire une distinction entre terrorisme “acceptable” et “inacceptable”, il sera très difficile d’avancer vers une solution négociée du conflit.

– Un diplomate européen

Les déclarations fracassantes du président turc après l’assassinat d’Ismaïl Haniyeh illustrent une nouvelle fois la complexité et les passions qui entourent le conflit israélo-palestinien. Ankara prend le risque de s’isoler davantage sur la scène internationale en affichant un soutien sans ambiguïté au Hamas. Une posture qui semble guidée par des considérations idéologiques et de politique intérieure, Erdogan cherchant à incarner la défense de la cause palestinienne dans le monde musulman. Mais cet activisme tous azimuts pourrait aussi se retourner contre les intérêts turcs. Accusée de complaisance envers le terrorisme, la Turquie voit ses relations se dégrader non seulement avec Israël, mais aussi avec de nombreux partenaires occidentaux. L’émotion suscitée par l’élimination ciblée d’un dirigeant du Hamas ne doit pas masquer les responsabilités de ce mouvement, qui instrumentalise depuis de longues années la souffrance des Gazaouis à des fins politiques. Seul un changement de paradigme, basé sur la reconnaissance mutuelle et le rejet de la violence, pourrait ouvrir une voie vers une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens. Les déclarations va-t-en guerre, d’où qu’elles viennent, ne font que nous en éloigner un peu plus.

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