Imaginons un instant que votre proche, un être cher, un ami, soit brutalement fauché sur la route par un chauffard inconscient. Le choc, la colère, l’incompréhension vous envahiraient. Vous attendriez alors de la justice qu’elle soit à la hauteur de votre souffrance, qu’elle rende hommage à cette vie si injustement arrachée. Pourtant, en France, force est de constater que nombreux sont les drames routiers qui ne bénéficient pas de l’attention judiciaire qu’ils méritent.
Le long chemin des familles endeuillées
Chaque année, ce sont des centaines de familles qui voient leur existence basculer suite à un homicide routier. Des parents anéantis, des fratries décimées, des enfants orphelins. Leur seul réconfort : obtenir justice pour que le sacrifice de leur proche ne reste pas vain. Mais la route est longue et semée d’embûches.
Malgré la gravité de l’acte commis, nombre de ces affaires sont encore jugées par un simple tribunal correctionnel, et non par une cour d’assises comme le réclament les associations de victimes. Un sentiment d’injustice et de mépris qui vient s’ajouter à une souffrance déjà incommensurable.
Perdre un enfant dans ces circonstances, c’est une double peine. On nous l’arrache et on nous dénie le droit à un vrai procès.
Marie, mère d’un adolescent tué par un chauffard récidiviste.
Des peines jugées trop clémentes
Autre motif de colère pour ces proches meurtris : des condamnations jugées bien trop légères au regard du préjudice subi. Des peines avec sursis qui s’enchaînent, des récidivistes qui conservent leur permis, des indemnisations dérisoires qui ne compensent en rien la perte d’un être aimé.
Face à ce constat, de plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer la création d’un véritable homicide routier, distinct des traditionnels délits routiers. Un crime passible de la cour d’assises, avec à la clé des peines plus lourdes et une reconnaissance pleine et entière du préjudice des victimes.
Vers une réforme pénale ?
Sous la pression des associations et face à l’émotion suscitée par des drames très médiatisés, les lignes commencent doucement à bouger. Des propositions de lois émergent pour durcir la réponse pénale en matière d’infractions routières graves.
- Création d’un délit d’homicide routier, voire d’un crime
- Peines planchers en cas de circonstances aggravantes (alcool, stupéfiants…)
- Suspension automatique du permis en cas d’homicide
- Meilleure prise en charge de l’indemnisation des victimes
Des évolutions législatives qui, si elles se concrétisent, constitueraient une véritable avancée pour des milliers de familles en souffrance. Car au-delà de la sanction, c’est avant tout une reconnaissance que réclament ces proches injustement privés d’un être cher.
Chaque vie perdue devrait être jugée avec la même considération, quelle que soit la cause du drame. Un homicide reste un homicide, sur la route comme ailleurs.
Jacques, frère d’une victime.
Sensibiliser plutôt que réprimer ?
Pour certains experts cependant, la réponse pénale ne saurait suffire. Car derrière chaque drame de la route, ce sont aussi des comportements à risques qu’il faut combattre en amont. Vitesse, alcool, stupéfiants, distraction au volant… Autant de facteurs accidentogènes qu’il est urgent de prévenir.
Et si plutôt que de se focaliser sur la répression, on misait davantage sur la sensibilisation ? C’est le pari de nombreuses associations qui multiplient les actions de prévention auprès des jeunes conducteurs. Des campagnes chocs pour susciter une prise de conscience, des témoignages de victimes pour marquer les esprits.
Car n’oublions pas qu’au volant, chacun de nos actes peut avoir des conséquences tragiques. Un moment d’inattention, un petit excès de vitesse, un verre de trop… Il suffit parfois de peu pour basculer de vie à trépas. Et briser à jamais celle de toute une famille.
La sécurité routière, l’affaire de tous
Alors oui, il est grand temps que la justice prenne la mesure de ces drames qui endeuillent nos routes chaque année. Que les peines soient à la hauteur de l’irréparable commis. Que les victimes soient enfin entendues et respectées dans leur souffrance.
Mais il est tout aussi crucial que chacun d’entre nous se sente concerné par cet enjeu de société majeur qu’est la sécurité routière. Car ce sont nos vies qui sont en jeu, celles de nos proches, de nos enfants. Personne n’est à l’abri d’un drame qui vient fracasser une existence en un instant.
Ensemble, exigeons une justice plus ferme contre ces crimes de la route. Ensemble, préservons la vie en adoptant une conduite responsable. Pour que plus jamais un proche ne devienne un simple nom sur une stèle en bord de route. Pour que le sang cesse de couler sur le bitume de l’indifférence.