La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a entamé mardi l’examen d’un dossier brûlant : la conformité de la loi hongroise de 2021 sur la « protection » des mineurs, jugée discriminatoire à l’égard des personnes LGBT. Seize pays de l’UE, dont la France et l’Allemagne, se sont joints à l’action en justice intentée par la Commission européenne contre ce texte controversé. Un procès retentissant qui cristallise les tensions entre Budapest et ses partenaires sur les valeurs fondamentales.
Une loi qui fait polémique
Adoptée en juin 2021 par la Hongrie dirigée par le nationaliste Viktor Orban, la loi en question interdit « la représentation ou la promotion » de l’homosexualité et du changement de sexe auprès des mineurs. Ce texte, accusé par certains détracteurs d’associer homosexualité et pédophilie, avait suscité une vague d’indignation parmi les dirigeants européens au moment de son adoption.
Depuis son entrée en application, les médias audiovisuels ont interdiction de diffuser du contenu LGBT pendant la journée. Les magasins ne peuvent plus vendre des produits sur ce thème à moins de 200 mètres des églises et des écoles. Certaines librairies ont même écopé d’amendes pour avoir proposé des romans graphiques avec des personnages LGBT dans leurs rayons jeunesse, rapporte l’ONG Reclaim.
Une « violation massive et flagrante » du droit européen
Pour la Commission européenne qui a saisi la CJUE en décembre dernier, cette législation constitue une « violation massive et flagrante de plusieurs règles importantes de l’UE ». À l’ouverture des débats mardi, un juriste représentant l’exécutif européen a parlé d’une « attaque frontale et grave contre l’État de droit, et plus généralement contre la société européenne ».
La Commission estime en effet que la loi hongroise viole :
- L’article 2 du Traité sur l’Union européenne relatif au respect des droits humains et à la non-discrimination
- La Charte des droits fondamentaux de l’UE
- Plusieurs directives sur le commerce électronique, les services et les médias audiovisuels
Viktor Orban en croisade contre les valeurs « illibérales »
Ce bras de fer juridique s’inscrit dans un contexte de tensions récurrentes entre le Premier ministre hongrois Viktor Orban, chantre autoproclamé des valeurs « illibérales », et ses partenaires européens. Ces dernières années, Budapest a pris plusieurs mesures controversées au nom de la « protection des enfants contre la propagande LGBT ».
La Hongrie a été le premier pays à importer dans l’UE une loi russe de « propagande anti-LGBT » datant de 2013.
Reclaim, ONG de défense des minorités sexuelles
Un procès aux enjeux cruciaux pour les droits LGBT en Europe
Au-delà du cas hongrois, ce procès devant la plus haute juridiction de l’UE revêt une portée symbolique et politique majeure pour la défense des droits des personnes LGBT à travers le continent. La décision, attendue au printemps prochain selon l’ONG Reclaim, sera scrutée de près.
Elle pourrait constituer un signal fort envoyé aux pays tentés de suivre la voie illibérale de la Hongrie, tout en rappelant les valeurs fondamentales sur lesquelles l’Europe s’est construite. À l’heure où les questions LGBT continuent de diviser, l’enjeu est de taille pour l’avenir du projet européen.