À l’approche de l’élection présidentielle américaine prévue le 5 novembre, les accusations de fraudes électorales refont surface sur les réseaux sociaux. Parmi elles, une affirmation particulièrement choquante : un Canadien aurait réussi à voter pour Donald Trump sans même avoir eu à présenter une pièce d’identité. Cette déclaration incendiaire, publiée sur un réseau social et vue des millions de fois, a rapidement enflammé le débat. Mais que se cache-t-il vraiment derrière cette histoire devenue virale ?
Un Canadien prétend avoir voté sans papiers d’identité
Tout commence le 28 octobre dernier, lorsqu’un internaute affirme dans une publication avoir pu voter pour le candidat républicain Donald Trump sans présenter de document justifiant son identité. “Je suis Canadien, mais puisque les États-Unis n’exigent pas de pièce d’identité, j’ai traversé la frontière pour voter”, écrit-il dans un message vu plus de 13 millions de fois en quelques jours seulement.
Une aubaine pour les partisans de Donald Trump, en quête de voix pour devancer son adversaire démocrate Kamala Harris dans les sondages. “Je pense faire la même chose, dans quel État puis-je me prendre ?”, demande l’un d’eux. “Le monde a besoin de Trump”, renchérit un autre, appelant tous les étrangers à suivre cet exemple. La machine à complotisme semble lancée, mais il s’agit en réalité d’une “fake news”.
La photo détournée d’une vraie électrice
En creusant un peu, on découvre en effet que la photo du bulletin de vote publiée par le prétendu Canadien a en fait été postée à l’origine par une certaine Ashley Muñoz, qui assure en être l’autrice. Sur sa publication datée du 13 octobre, soit deux semaines avant celle devenue virale, on retrouve le même bulletin en faveur de Donald Trump. L’internaute malveillant a en fait récupéré ce cliché en le recadrant pour faire disparaître les doigts manucurés qu’on pouvait y voir.
Un détournement efficace car il s’inscrit dans une remise en cause plus large du processus électoral américain. Certains affirment en effet qu’il serait possible de voter sans présenter de pièce d’identité. Une généralisation abusive, la réalité étant bien plus nuancée.
Des règles variables selon les États
Aux États-Unis, ce sont en effet les gouvernements locaux qui fixent les règles d’identification des électeurs. D’après le site de la Conférence nationale des législatures des États (NCSL), un organisme non-partisan, 36 des 50 États du pays obligent les électeurs à présenter une forme d’identification lors du vote. Dans les 14 restants, d’autres méthodes sont utilisées pour vérifier l’identité, comme une signature ou des informations fournies sur le lieu de vote, avant de les comparer aux données enregistrées sur les électeurs.
Même dans un État ne demandant pas de preuve d’identité, un étranger ne disposant pas du droit de vote ne pourrait donc pas mettre un bulletin dans l’urne, n’étant tout simplement pas inscrit sur les listes électorales. Des listes dont la loi fédérale exige une mise à jour régulière. Seuls de très rares cas d’erreur permettant à des citoyens étrangers de voter ont été rapportés par le passé, avec un impact marginal sur les résultats, rappelle la presse américaine.
Le spectre des fraudes plane sur la campagne
Cela n’empêche pas ce type de “fake news” de prospérer, sur fond de climat de défiance. Depuis début octobre, pas moins de 8,3 millions de tweets évoquent des fraudes électorales, soit 4% des discussions liées à la campagne selon la plateforme de veille Visibrain. C’est déjà deux fois plus que lors de la précédente présidentielle, qui avait abouti à l’assaut du Capitole par des partisans de Donald Trump.
Si voter sans pièce d’identité relève donc globalement du mythe, le retour en force des théories complotistes, attisées par des contenus viraux trompeurs, est une réalité préoccupante à l’approche du scrutin crucial du 5 novembre. Dans un contexte aussi électrique, où le moindre incident peut mettre le feu aux poudres, la prudence et la vérification des faits s’imposent plus que jamais pour préserver l’intégrité du processus démocratique.