C’est un premier pas vers la liberté pour des dizaines de travailleurs chinois réduits en esclavage par des réseaux mafieux de cyberfraude basés en Birmanie. Jeudi, un groupe de 50 d’entre eux a franchi la frontière thaïlandaise, en route vers un rapatriement tant attendu en Chine, selon des sources sur place.
Escortés par d’imposantes forces de sécurité, ils ont été conduits en bus jusqu’à l’aéroport de Mae Sot, dans le nord-ouest de la Thaïlande, où des vols spéciaux affrétés par Pékin les attendaient. Au total, près de 600 personnes devraient être évacuées ces trois prochains jours. Mais le chemin sera encore long avant que tous les captifs ne retrouvent la liberté.
Des milliers de victimes de l’esclavage moderne
Selon la Première ministre thaïlandaise, près de 7000 personnes, majoritairement chinoises, attendraient encore d’être libérées de ces bagnes des temps modernes. Un chiffre qui pourrait même atteindre 10 000 selon des milices locales. Des hommes et des femmes, souvent victimes de la traite d’êtres humains, piégés par de fausses promesses d’emplois lucratifs.
Dans ces complexes géants de la cybercriminalité, qui pullulent le long de la frontière birmane, ils sont forcés de travailler pour des réseaux mafieux spécialisés dans les arnaques en ligne, via des casinos virtuels ou des escroqueries aux cryptomonnaies. Un business juteux qui rapporterait des milliards de dollars chaque année à ces organisations criminelles.
Torture, violences et travail forcé au quotidien
Le calvaire des victimes ne s’arrête pas à la privation de liberté. Beaucoup subissent tortures, violences sexuelles, détentions arbitraires et travail forcé, comme le révèle un récent rapport de l’ONU. Leur passeport confisqué, ils n’ont aucun moyen de s’échapper de cet enfer.
Nombre de victimes ont été soumises à la torture, à la détention arbitraire, à la violence sexuelle ou encore au travail forcé.
Rapport des Nations unies, 2023
La Birmanie, plaque tournante de la cybercriminalité
La situation chaotique en Birmanie depuis le coup d’État militaire de 2021 a fait du pays une véritable plaque tournante pour ces activités illégales. Les zones frontalières, considérées comme des non-droit, sont devenues le terrain de jeu favori des mafias, qui agissent en toute impunité. Selon l’ONU, au moins 120 000 personnes seraient exploitées dans ces centres.
Pékin accentue la pression sur la junte
Face à l’ampleur du phénomène, la Chine, pourtant proche alliée et fournisseur d’armes de la junte birmane, a décidé de hausser le ton ces derniers mois. Une manière pour Pékin de protéger ses ressortissants, principales victimes et petites mains de ces réseaux, mais aussi sa réputation, écornée par les agissements de ses citoyens à l’étranger.
Si ce premier rapatriement est un signal fort, le chemin sera encore long avant de démanteler ces mafias tentaculaires profondément enracinées dans la région. Un défi de taille pour la communauté internationale, qui se doit d’agir pour mettre fin à ce fléau de l’esclavage moderne.