Face aux nouvelles sanctions américaines visant Gazprombank, la banque russe chargée d’enregistrer les paiements des contrats gaziers, Vladimir Poutine vient de signer un décret assouplissant les règles pour les achats de gaz russe par les clients étrangers. Une manœuvre qui soulève de nombreuses interrogations sur les futures modalités de paiement et les conséquences pour l’économie russe.
Gazprombank dans le viseur des sanctions américaines
Gazprombank, le bras financier du géant Gazprom, était jusqu’à présent le seul établissement bancaire autorisé à traiter les transactions liées aux contrats de gaz russe depuis avril 2022, suite à un premier décret de Poutine. Mais le 21 novembre dernier, Washington a annoncé des restrictions visant une cinquantaine de banques russes, dont Gazprombank, pour tenter de tarir les revenus de Moscou issus de la vente d’hydrocarbures.
Concrètement, ces sanctions empêchent désormais Gazprombank de gérer toute nouvelle transaction financière impliquant le système financier américain pour les contrats énergétiques à l’étranger. Un coup dur pour la Russie, alors que de nombreux acheteurs devaient ouvrir un compte dans cette banque et régler leurs achats en roubles, un moyen de soutenir la monnaie nationale face aux lourdes sanctions occidentales.
Poutine riposte avec un nouveau décret
En réponse, Vladimir Poutine a donc signé jeudi un décret permettant aux clients étrangers de payer leur gaz russe via d’autres banques que Gazprombank. Toutefois, les modalités précises restent floues pour le moment. Quels établissements bancaires non sanctionnés seront habilités à recevoir ces paiements ? Les acheteurs devront-ils toujours régler en roubles ou d’autres devises seront-elles acceptées ?
Selon une source proche du dossier, le Kremlin réfléchirait à un mécanisme permettant de contourner les sanctions en passant par des banques de pays tiers non concernés. Mais rien n’a été officiellement confirmé pour l’heure. Une chose est sûre, ce nouveau bras de fer autour du gaz russe risque d’accroître l’incertitude sur les marchés énergétiques.
L’impact sur l’économie et la monnaie russes
L’annonce des sanctions américaines a déjà provoqué un net affaiblissement du rouble, tombé au plus bas face au dollar et à l’euro depuis mars. Si une monnaie plus faible peut rendre les exportations russes moins chères, elle renchérit aussi le coût des importations, avec un risque d’alimenter davantage l’inflation, déjà élevée à 8,5%.
Pour rassurer, le ministre des Finances Anton Silouanov a déclaré que la situation se stabilisait et que les acteurs économiques russes trouveraient de nouvelles possibilités de règlement avec l’étranger d’ici 2 à 3 semaines. Mais certains experts doutent que le retour à la normale soit si rapide, d’autant que la plupart des pays européens cherchent à réduire leur dépendance au gaz russe.
La Hongrie demande une exemption
Principal allié de Moscou au sein de l’UE, la Hongrie a demandé à Washington une exemption permettant à Gazprombank de continuer à enregistrer ses paiements de gaz russe. Budapest importe encore environ deux tiers de son gaz depuis la Russie et s’inquiète de possibles perturbations.
Mais la probabilité que les États-Unis accèdent à cette requête semble mince. D’autant que l’objectif affiché des sanctions est justement de pénaliser financièrement la Russie pour son offensive en Ukraine et d’inciter les Européens à accélérer leur sevrage gazier vis-à-vis de Moscou.
Dans ce bras de fer énergétique et géopolitique, Vladimir Poutine tente donc une nouvelle parade avec son décret, dont l’efficacité reste à démontrer. Si le flou persiste sur les solutions de paiement alternatives à Gazprombank, c’est toute la stratégie du Kremlin pour amortir le choc des sanctions qui apparaît fragilisée, avec de lourdes conséquences potentielles pour l’économie russe.