Au cœur de l’Assemblée Nationale, une commission attise toutes les convoitises : la Commission des Finances. Véritable joyau stratégique, elle est le théâtre de jeux de pouvoir et d’enjeux cruciaux pour le budget de l’État. Mais pourquoi suscite-t-elle un tel engouement parmi les députés ? Plongeons dans les coulisses de cette instance clé.
La Commission des Finances, Gardienne du Budget
La mission première de la Commission des Finances est d’exercer un contrôle minutieux sur le budget de l’État. Chaque année, avant le passage en séance plénière, elle passe au crible le projet de loi de finances qui détaille l’ensemble des recettes et dépenses prévues. Un travail de fourmi pour s’assurer de la bonne utilisation des deniers publics.
Mais le rôle de la commission ne s’arrête pas là. Elle veille aussi à la bonne application du budget voté. Pour cela, elle peut mener des contrôles sur place et sur pièces dans les ministères, afin d’auditer les dépenses. Récemment, la commission des finances du Sénat a ainsi épluché les comptes de Bercy pour comprendre les causes de la dégradation du déficit français en 2023.
Des Pouvoirs Étendus
Au-delà du contrôle budgétaire, la Commission des Finances dispose de larges prérogatives. Elle peut convoquer tout acteur impliqué dans les finances publiques, que ce soit des ministres, des commissaires européens ou des dirigeants d’entreprises publiques. Un pouvoir de convocation qui lui permet de recueillir toutes les informations nécessaires à sa mission.
Mais c’est surtout l’article 40 de la Constitution qui confère à la commission un rôle pivot. Selon cet article, les propositions de loi et amendements des parlementaires ne sont pas recevables s’ils entraînent une diminution des ressources publiques ou la création d’une nouvelle charge. Il revient donc au président de la commission de juger de la recevabilité financière des initiatives de ses collègues, un pouvoir considérable.
L’article 40 instaure une inégalité entre l’exécutif, dont les projets de loi ne sont pas astreints à son respect, et le législatif, pour qui c’est le cas.
Éric Coquerel, Président de la Commission des Finances
Un Poste Stratégique pour l’Opposition
Depuis 2007, la tradition veut que la présidence de la Commission des Finances soit confiée à un membre de l’opposition. Un usage devenu règle en 2008 et qui confère à ce poste une dimension hautement stratégique. L’opposition y voit un moyen de peser sur les débats budgétaires et de faire entendre sa voix.
Mais que se passerait-il si le parti présidant la commission rejoignait le gouvernement en cours de législature ? C’est la question qui se pose avec la possible entrée de députés insoumis au gouvernement. La commission se retrouverait alors dans une situation inédite, avec un président appartenant à la majorité. Un scénario déjà vécu en 2022 avec le ralliement d’Éric Woerth à Emmanuel Macron.
Une Influence qui Dépend du Président
Si les pouvoirs de la Commission des Finances sont étendus, leur exercice dépend beaucoup de la personnalité de son président. Chacun a sa lecture de l’article 40 et sa manière de contrôler le gouvernement. Là où certains font preuve de souplesse, d’autres se montrent plus intransigeants.
Éric Coquerel, président de la commission pendant la dernière législature, avait ainsi une conception extensive de son rôle. Loin de se cantonner à un contrôle technique, il n’hésitait pas à monter au créneau sur des sujets politiques, comme la réforme des retraites. Une pratique qui tranche avec celle de ses prédécesseurs plus discrets.
Véritable tour de contrôle des finances publiques, la Commission des Finances de l’Assemblée Nationale est un rouage essentiel de notre démocratie. Son influence sur les débats budgétaires et son rôle de contre-pouvoir en font un poste très convoité, notamment par l’opposition. Mais au-delà des enjeux partisans, c’est bien l’intérêt général qui doit primer. Un défi de tous les instants pour celles et ceux qui ont l’honneur de siéger dans cette commission pas comme les autres.