C’est la douche froide. Alors que la communauté internationale fondait de grands espoirs dans le sommet de la paix prévu ce dimanche à Luanda entre le Rwanda et la République démocratique du Congo (RDC), la présidence angolaise a annoncé son annulation pure et simple. Une impasse diplomatique qui replonge dans l’incertitude la résolution du conflit sanglant qui déchire depuis plus de 30 ans l’est de la RDC.
Un sommet avorté, des espoirs déçus
Pourtant, les signes étaient encourageants. Les présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame devaient se rencontrer en Angola sous l’égide du président Joao Lourenço, désigné médiateur par l’Union africaine, pour tenter une nouvelle fois de rétablir la paix. Mais à la mi-journée, seul Félix Tshisekedi avait fait le déplacement. La partie rwandaise brillait par son absence, condamnant ces négociations à l’échec avant même qu’elles n’aient commencé.
Depuis novembre 2021, l’est de la RDC est de nouveau en proie aux violences du groupe armé M23 (« Mouvement du 23 mars »). Soutenu par le Rwanda et son armée selon Kinshasa, ce groupe rebelle contrôle désormais de vastes pans de ce territoire riche en ressources minérales. Des affrontements quotidiens avec l’armée congolaise jettent sur les routes de l’exil des dizaines de milliers de civils.
Un dialogue de sourds
Alors comment expliquer ce revirement de situation ? D’après des sources proches des discussions, le Rwanda aurait posé comme condition préalable aux négociations que la RDC accepte un dialogue direct avec les rebelles du M23. Une ligne rouge pour Félix Tshisekedi qui refuse catégoriquement de discuter avec ceux qu’il considère comme des « ennemis de la République ». Pour Kinshasa, c’est avec le Rwanda qu’il faut négocier car c’est lui qui contrôle et arme cette rébellion.
Si Kigali est de bonne foi et retire ses troupes, le conflit s’arrêtera avec le M23 en même temps qu’avec le Rwanda.
Une source gouvernementale congolaise
Côté rwandais en revanche, on réclame que la RDC s’engage fermement à « reprendre des pourparlers directs avec le M23 dans un cadre et des délais bien définis ». De plus, Kigali exige le démantèlement des FDLR, un groupe armé formé par d’anciens responsables du génocide au Rwanda en 1994. Bien qu’affaiblis, ces rebelles hutu constituent toujours aux yeux du Rwanda une menace permanente.
Un fragile espoir de paix s’envole
Ironie de l’histoire, fin novembre, un plan de paix avait pourtant bien été approuvé par les deux pays. Consulté par l’AFP, ce document prévoyait le départ des soldats rwandais et la « neutralisation » des FDLR par l’armée congolaise sous 90 jours. Mais la méfiance et les intérêts contradictoires ont eu raison de ce énième cessez-le-feu.
Car depuis le début du conflit, une demi-douzaine de trêves ont déjà été décrétées puis violées. Le dernier cessez-le-feu en date, signé fin juillet, n’a pas résisté à une nouvelle offensive du M23 et des accrochages quasi-quotidiens avec l’armée congolaise. Chaque camp accuse l’autre de ne pas respecter ses engagements.
La situation sécuritaire ne cesse de se détériorer à l’est de la RDC, avec de lourdes conséquences humanitaires.
Un responsable onusien
L’échec de ce sommet de Luanda est donc un coup dur pour les espoirs de paix dans la région. Sans avancée diplomatique, les violences risquent de s’intensifier sur le terrain, au détriment des populations civiles une nouvelle fois prises en étau. Mais l’impasse actuelle montre surtout la complexité d’un conflit régional qui concentre des intérêts économiques, sécuritaires et politiques souvent inconciliables. Tant que les causes profondes ne seront pas traitées, il y a fort à parier que l’est de la RDC continuera de sombrer dans un cycle sans fin de violence.