Lundi soir, sur la place Jean-Jaurès à Montreuil, le spectacle était à la fois familier et surprenant. Familier, car les drapeaux rouges de la France Insoumise flottaient fièrement au vent, brandis par une foule enthousiaste venue assister au premier meeting unitaire du Nouveau Front populaire. Mais aussi surprenant, car derrière cette manifestation d’unité, les tensions internes étaient palpables.
Au cœur de ces dissensions, la 7ème circonscription de Seine-Saint-Denis, fief du député LFI sortant Alexis Corbière. Ce dernier a vu l’investiture lui échapper au profit d’une nouvelle venue, Sabrina Ali-Benali, désignée par les instances nationales de LFI. Une décision lourde de conséquences, puisque Corbière a décidé de maintenir sa candidature malgré tout.
Une circonscription symbolique des tensions à gauche
Le cas de la 7ème circonscription de Seine-Saint-Denis est loin d’être isolé. Plusieurs députés “frondeurs” de la France Insoumise, jugés trop critiques envers la direction du parti, ont connu le même sort qu’Alexis Corbière. Une “purge” qui passe mal auprès des militants et des électeurs attachés à ces figures locales.
Pourtant, sur scène lundi soir, les représentants du Nouveau Front populaire ont tenté de gommer ces dissensions. Sabrina Ali-Benali, investie par LFI, est apparue entourée de ses soutiens et a assuré avoir “tout le monde avec elle“. Une façon de réaffirmer sa légitimité, elle qui a été propulsée candidate au détriment du député sortant.
L’unité malgré tout, le mot d’ordre du meeting
Au-delà du cas Corbière, c’est bien l’unité de la gauche qui était en jeu lors de ce meeting de lancement de campagne. Les représentants des différentes composantes du Nouveau Front populaire se sont succédés à la tribune, martelant un message d’union et de rassemblement.
Comme l’a souligné le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, “on ne va pas passer la soirée là-dessus“, à propos des tensions. L’objectif était clair : fédérer les troupes et les électeurs derrière un projet commun, au-delà des querelles intestines.
Il faut désormais regarder vers l’avenir et les élections législatives. Notre responsabilité, c’est de réussir le rassemblement.
Olivier Faure, Premier secrétaire du PS
Un test grandeur nature pour la gauche unie
Ce meeting était donc un véritable test pour la crédibilité et la solidité du Nouveau Front populaire. Malgré les efforts déployés sur scène pour afficher une unité sans faille, les défis restent nombreux pour cette alliance encore fragile.
D’abord, la question des investitures et des ego froissés continue de peser. Les déçus et les “frondeurs” comme Alexis Corbière pourraient être tentés de faire cavalier seul, fragilisant l’alliance. Il faudra beaucoup de diplomatie en interne pour apaiser les tensions.
Ensuite, au-delà des querelles de personnes, c’est la cohérence du projet politique commun qui est en jeu. Entre les différentes sensibilités qui composent le Nouveau Front populaire, des divergences existent sur de nombreux sujets. Il faudra réussir à les dépasser pour proposer un programme clair et ambitieux aux électeurs.
Enfin, la gauche unie devra faire face à une conjoncture politique difficile, marquée par une poussée des extrêmes et un paysage très polarisé. Réussir à imposer une troisième voie, sociale et écologique, représentera un vrai défi.
Faire de Montreuil un symbole du renouveau à gauche
En choisissant Montreuil pour ce meeting inaugural, le Nouveau Front populaire a voulu envoyer un message fort. Cette ville populaire de Seine-Saint-Denis incarne à elle seule les espoirs et les difficultés d’une gauche qui cherche à se réinventer.
Malgré les doutes et les divisions, les militants et les élus présents lundi soir veulent croire en leur capacité à écrire une nouvelle page de l’histoire politique française. Faire front commun face aux crises sociales et écologiques, renouer avec les classes populaires, porter un projet de transformation de la société… les défis sont immenses mais la détermination semble intacte.
Ce meeting de Montreuil n’était qu’une première étape. La route est encore longue jusqu’aux élections législatives de 2024. Mais en tentant de resserrer les rangs malgré les turbulences, la gauche unie espère avoir posé un premier jalon vers la reconquête. L’avenir dira si l’alliance était solide ou si les vieilles divisions referont surface. Une chose est sûre : le pari est osé mais porteur d’espoir pour tous ceux qui rêvent d’un renouveau politique à gauche.
