Imaginez un monde où votre banque émet son propre stablecoin, où Visa, Stripe ou Shopify font circuler des milliards directement sur une blockchain ultra-rapide, et où tout cela profite… à Polygon. C’est exactement la vision que défendent les dirigeants du réseau depuis plusieurs mois. Pourtant, pendant ce temps, le token POL (ex-MATIC) continue de tester des supports vieux de plusieurs années. La grande question : les stablecoins institutionnels vont-ils enfin devenir le catalyseur tant attendu ?
Polygon ne veut plus être un simple Layer 2 : il veut devenir l’autoroute des stablecoins mondiaux
Depuis 2024, Polygon a radicalement changé de stratégie. Exit l’image du « Ethereum pas cher pour les jeux et les NFT ». Le réseau se positionne désormais comme la couche de règlement privilégiée pour tous les acteurs traditionnels qui souhaitent émettre des stablecoins ou des deposit tokens (jetons représentant directement les dépôts bancaires).
Et les arguments ne manquent pas : frais ridiculement bas (souvent <0,01 $), millions de transactions par jour, intégrations déjà opérationnelles avec Visa, Stripe, Shopify, Revolut, AirGap, ou encore la présence massive d’USDC (Polygon est la deuxième chaîne la plus utilisée pour les transferts P2P d’USDC après Ethereum mainnet).
Une vision chiffrée impressionnante : 100 000 stablecoins d’ici 2030
Aishwary Gupta, responsable mondial des paiements et des actifs réels chez Polygon, ne mâche pas ses mots : d’ici la fin de la décennie, plus de 100 000 stablecoins différents pourraient voir le jour. Pas seulement des USDT ou USDC bis, mais des émissions provenant :
- Des grandes banques commerciales et centrales
- Des géants du paiement (Visa, Mastercard, PayPal…)
- Des plateformes e-commerce wishing garder la valeur dans leur écosystème
- Des États et institutions supranationales
Pour Gupta, les stablecoins ne menacent pas le contrôle monétaire : ils le dollar reste le dollar, mais sa demande mondiale explose grâce à ces versions on-chain. Les banques, elles, préfèrent émettre leurs propres deposit tokens plutôt que de voir leurs clients placer leurs euros ou dollars sur des protocoles DeFi à haut rendement.
« Les stablecoins renforcent la domination du dollar, ils ne la fragilisent pas. Une banque qui émet un deposit token garde le passif sur son bilan tout en offrant à ses clients l’expérience blockchain. »
Aishwary Gupta, Polygon Labs
AggLayer : le weapon fatale pour unifier la liquidité
Le vrai game-changer selon Polygon ? L’AggLayer, cette technologie d’agrégation de liquidité entre chaînes qui permet à un stablecoin émis sur Polygon d’être instantanément utilisable sur Arbitrum, Optimism, Base, ou même sur une sidechain privée d’une banque.
En clair : une seule émission, une liquidité unifiée partout. C’est exactement ce dont ont besoin les institutions qui ne veulent pas gérer dix versions différentes de leur stablecoin selon la chaîne.
Le token POL est-il prêt à profiter de cette vague ?
Théoriquement, oui. Plus de stablecoins = plus de transactions = plus de frais brûlés ou redistribués aux stakers de POL. Le modèle économique est clair.
Mais dans la pratique, le token continue de souffrir. Depuis la migration MATIC → POL en septembre 2024, le cours a perdu plus de 60 % face à son ATH de 2021 et évolue actuellement autour de niveaux de support historiques (zone 0,30-0,35 $ au moment de rédaction).
Analyse technique POL/USD – Décembre 2025
| Support clé | 0,31 – 0,34 $ (zone tenue depuis 2022) |
| RSI 14 jours | 32 (survendu, en divergence haussière) |
| MACD | Ligne passant positive sur 4h et quotidien |
| Volume | Faible, en baisse depuis 3 mois |
Les signaux techniques sont donc plutôt encourageants à court terme : triangle ascendant en formation, RSI survendu qui remonte, MACD qui croise à la hausse. Mais le volume reste désespérément faible – le principal point noir.
La concurrence n’a jamais été aussi rude
Arbitrum et Optimism captent la majorité des flux institutionnels DeFi. Base (Coinbase) explose grâce à son intégration native Coinbase. zkSync et Scroll séduisent les puristes du ZK. Même Solana, malgré ses pannes, continue d’attirer les volumes de trading.
Polygon doit donc prouver que son positionnement « stablecoin + paiements traditionnels » est supérieur à la simple course au TVL DeFi.
Les signaux qui pourraient tout changer en 2026
- L’arrivée effective de grands noms (une grande banque européenne ou américaine qui annonce son deposit token sur Polygon)
- Le lancement commercial complet de l’AggLayer avec plusieurs chaînes partenaires
- Une augmentation significative du volume USDC sur Polygon (actuellement ~25 % des transferts P2P mondiaux)
- Le retour des volumes de trading sur QuickSwap et autres DEX Polygon
Dès qu’un de ces catalyseurs se concrétise, le narratif « Polygon = infrastructure stablecoin » pourrait enfin prendre le dessus sur le sentiment actuel de « L2 oublié ».
Conclusion : un pari risqué mais potentiellement explosif
Polygon joue aujourd’hui son va-tout sur la tokenisation massive des dépôts bancaires et des paiements du monde réel. Si la vision se réalise, POL pourrait devenir l’un des actifs les plus sous-évalués du marché. Si elle échoue face à la concurrence ou si les institutions préfèrent finalement des chaînes privées ou permissionnées, le token risque de rester coincé dans sa range encore de longs mois.
Pour l’instant, le support tient. Les indicateurs techniques deviennent positifs. Reste à savoir si 2026 sera l’année où les stablecoins institutionnels passeront enfin du discours aux milliards de volume quotidien sur Polygon.
Une chose est sûre : rarement un projet aura eu un narratif aussi clair… et un token aussi décorrélé de ce narratif. Le réveil pourrait être brutal – dans un sens ou dans l’autre.









