Face à un afflux de migrants qu’il juge « orchestré » par Minsk et Moscou, le gouvernement polonais vient d’adopter un projet de loi lui permettant de restreindre temporairement le droit d’asile. Une mesure forte et controversée, bien que soutenue par la Commission européenne.
La Pologne accuse la Biélorussie et la Russie
Selon des sources proches du gouvernement, la Pologne, membre de l’Otan et de l’UE, soupçonne depuis 2021 le Bélarus et la Russie d’organiser délibérément cet afflux migratoire. L’objectif serait de déstabiliser la région et l’Union Européenne dans son ensemble, dans le cadre d’une « attaque hybride ». Des accusations rejetées en bloc par le régime bélarusse.
Soutien de Bruxelles face à « l’instrumentalisation » des migrants
La semaine passée, la Commission Européenne a estimé que les pays de l’UE étaient en droit de limiter les droits des demandeurs d’asile « instrumentalisés » par la Russie. Un soutien clair à la position polonaise, qui se retrouve en première ligne face à ces mouvements migratoires orchestrés à des fins politiques.
« Un droit que personne n’a l’intention de retirer à qui que ce soit – est utilisé aujourd’hui, surtout à la frontière avec le Bélarus, par les ennemis de l’État polonais »
Donald Tusk, Premier ministre polonais
Une mesure temporaire mais symbolique
Concrètement, le projet de loi permettra au gouvernement de restreindre le dépôt de demande d’asile à la demande du ministre de l’Intérieur, sous certaines conditions. La restriction sera limitée dans le temps (maximum 60 jours, renouvelables avec l’accord du Parlement) et dans l’espace (sur une portion précise de la frontière).
Plus qu’une réforme de fond, il s’agit donc d’une mesure symbolique visant à réaffirmer la souveraineté polonaise sur ses frontières face à ce que le gouvernement considère comme une forme d’agression. Un message fort aussi bien à destination de ses voisins qu’en interne.
D’autres mesures envisagées
Parallèlement à ce texte sur le droit d’asile, le gouvernement polonais a également adopté mercredi d’autres propositions de lois sur les étrangers. Parmi elles, un renforcement des conditions d’attribution des visas, destiné là encore à reprendre le contrôle des flux migratoires.
Si ces différents textes doivent encore être validés par le Parlement puis promulgués par le Président pour entrer en vigueur, ils illustrent la volonté de fermeté des autorités polonaises. Un positionnement qui ne fait toutefois pas l’unanimité parmi la coalition gouvernementale, la Gauche ayant exprimé ses réserves sur les restrictions du droit d’asile.
Des tensions qui restent vives
Cette loi intervient dans un contexte de fortes tensions entre la Pologne et ses voisins russes et bélarusses. Membre de l’OTAN et farouche soutien de l’Ukraine, Varsovie se retrouve en première ligne face à ce qu’elle considère comme une tentative de déstabilisation orchestrée par Moscou.
Malgré les protestations de Minsk et de la Russie, qui nient toute implication dans ces mouvements migratoires, la Pologne semble donc déterminée à employer tous les moyens à sa disposition pour protéger ses frontières et sa souveraineté. Une position ferme, au risque de susciter des critiques sur le respect du droit d’asile et des valeurs européennes.