New Delhi, la mégapole tentaculaire abritant plus de 30 millions d’âmes, se retrouve une fois de plus prise au piège d’un épais brouillard de pollution. Lundi, les niveaux de particules fines PM2.5, les plus néfastes pour la santé car s’infiltrant dans le sang, ont atteint des sommets vertigineux, dépassant de 60 fois les seuils recommandés par l’Organisation Mondiale de la Santé.
Un cocktail toxique devenu habituel
Chaque hiver, c’est le même scénario cauchemardesque qui se répète dans la capitale indienne. Les fumées d’usines, les gaz d’échappement et les brûlis agricoles se mélangent, formant un smog irrespirable qui enveloppe la ville. Dans certains quartiers lundi matin, les concentrations en PM2.5 ont atteint la valeur ahurissante de 907 microgrammes par mètre cube.
Face à cette situation critique, les autorités ont déclenché dimanche soir le niveau d’alerte maximal. La plupart des écoles sont restées portes closes et la circulation des véhicules les plus polluants strictement limitée. Mais ces mesures suffisent-elles ?
Des habitants désemparés
Pour les millions de citadins contraints de vivre dans cet air vicié, le quotidien vire au calvaire. « J’ai les yeux qui brûlent depuis plusieurs jours », témoigne Subodh Kumar, conducteur de rickshaw. « Je ne sais pas ce que le gouvernement fait contre ça, mais moi je dois être sur la route, qu’est-ce que je ferai sinon ? ».
Beaucoup n’ont pas les moyens de s’équiper en purificateurs d’air ou d’avoir un logement bien isolé. « Qui peut se payer un purificateur d’air quand il a du mal à payer ses factures ? », s’insurge Rinku Kumar, chauffeur de « tuk-tuk ». « Les riches ministres et les hauts fonctionnaires peuvent se permettre de rester chez eux, pas les gens ordinaires comme nous ».
Des autorités pointées du doigt
Si les conditions météorologiques hivernales, avec des vents faibles et des températures basses, favorisent la stagnation des polluants, beaucoup dénoncent l’inaction des pouvoirs publics. La Cour suprême a récemment ajouté l’air pur à la liste des droits fondamentaux, sommant le gouvernement d’agir.
Mais les initiatives restent timides, à l’image de ce drone présenté par la ville pour pulvériser de l’eau sur les zones les plus polluées. « Des mesurettes », fustigent les ONG, qui prônent de « stopper les émissions à leur base », notamment les brûlis agricoles dénoncés par la ministre en cheffe de New Delhi.
Un enjeu de santé publique majeur
Car au-delà de l’inconfort, cette pollution de l’air représente une véritable bombe sanitaire à retardement. Selon une étude du Lancet, elle aurait causé 1,67 million de décès en Inde rien qu’en 2019. Les particules fines sont à l’origine de nombreuses pathologies :
- Maladies cardiovasculaires
- Maladies respiratoires
- Cancers du poumon
Un fléau d’autant plus injuste qu’il frappe en premier lieu les populations les plus vulnérables. À New Delhi, l’urgence est là. Il est temps pour les autorités de prendre des mesures à la hauteur de cette crise, sans quoi c’est toute une génération qui risque de payer le prix fort de cette négligence.