La restauration de Notre-Dame de Paris, gravement endommagée par un incendie en 2019, est scrutée de près. Mais un aspect du chantier suscite particulièrement la controverse : le choix du nouveau mobilier liturgique et des assises. Un design minimaliste et contemporain qui tranche avec l’architecture gothique de la cathédrale et ne fait pas l’unanimité.
Un projet confié à deux designers
Pour ce projet d’envergure, l’archevêque de Paris Mgr Ulrich a lancé une consultation fin 2022 afin de sélectionner les artistes qui concevront les 5 éléments du mobilier liturgique (ambon, cathèdre, autel, tabernacle et baptistère) ainsi que les chaises. Son choix s’est finalement porté sur le designer Guillaume Bardet pour le mobilier en bronze, et la designeuse Ionna Vautrin pour les assises en bois.
Si le projet de Guillaume Bardet semble assez classique au premier abord, il est en réalité plus audacieux qu’il n’y paraît avec ses lignes épurées. Quant aux chaises de Ionna Vautrin, elles arborent un design résolument moderne et léger qui contraste avec le style gothique flamboyant de l’édifice.
Le profil atypique de Ionna Vautrin
La personnalité de la créatrice des chaises, Ionna Vautrin, suscite également quelques remous. D’après un portrait dressé par Libération, cette designer bretonne de 43 ans, « de gauche » et férue de bande-dessinées féministes, se définit comme « le repoussoir de Trump ». L’incendie de Notre-Dame en 2019 ne lui avait d’ailleurs pas provoqué « d’émotions débordantes », même si elle reconnaît que « ça [lui] a fait quelque chose ».
Lors de sa sélection, Ionna Vautrin s’est interrogée sur sa légitimité à participer à un tel projet alors qu’elle n’est « jamais allée au catéchisme ». Elle estime cependant que « le métier de designer, c’est de toute façon répondre à des problématiques qu’on ne connaît pas ».
Un coût qui interroge
Au-delà des questions esthétiques et idéologiques, c’est aussi le montant du projet qui fait grincer des dents. Les nouveaux aménagements sont en effet chiffrés à 6 millions d’euros, entièrement financés par la Fondation Notre-Dame. Un budget conséquent au regard des sommes déjà engagées pour la restauration globale de la cathédrale.
Des réactions contrastées
Sur les réseaux sociaux, les avis sont partagés. Si certains saluent l’audace de miser sur un design contemporain pour redonner vie à Notre-Dame, d’autres dénoncent un choix en décalage total avec l’identité historique et spirituelle du lieu.
Un mobilier ultra-contemporain qui jure complètement avec le style gothique de la cathédrale. Incompréhensible.
— Un internaute sur Twitter
Bravo pour ce choix courageux d’allier le meilleur du design actuel au patrimoine architectural de Notre-Dame. Une belle façon de conjuguer passé et présent.
— Une internaute sur Twitter
L’archevêque Mgr Ulrich assume ce parti-pris d’un « mobilier épuré très contemporain » avec « des lignes claires, simples, lisibles, ainsi qu’une harmonie de l’ensemble ». Le diocèse prévoit d’exposer les différents projets proposés afin que chacun puisse se forger son propre avis.
Prochaines étapes
La commission nationale de l’architecture et du patrimoine doit encore valider définitivement ces choix le 13 juillet prochain. Le chantier de Notre-Dame suit par ailleurs son cours, avec notamment l’installation de la nouvelle charpente en bois de chêne prévue à partir de septembre.
Malgré la polémique, l’objectif de rouvrir la cathédrale au public pour décembre 2024 est maintenu. Les fidèles et les visiteurs pourront alors découvrir le nouveau visage intérieur de Notre-Dame de Paris, entre respect du passé et vision artistique résolument tournée vers l’avenir. Un pari audacieux dont seul le temps permettra de juger la pertinence.