Imaginez remonter sur des skis après une rupture des ligaments croisés, affronter la glace autrichienne de Sölden dès la première course et réussir à accrocher une dix-huitième place. C’est exactement ce qu’a vécu Alexis Pinturault il y a tout juste un mois. Ce vendredi, à Copper Mountain, le Français dispute son deuxième géant de l’hiver avec un objectif clair : transformer les bonnes sensations de l’entraînement en performance chronométrique.
Un retour progressif mais convaincant
Quand on a été absent des pistes pendant de longs mois, chaque virage devient un test. Pinturault ne le cache pas : le plus dur après une telle blessure, c’est de retrouver le bon timing. « Quand on revient, on a tendance à attaquer trop tôt par sécurité », explique-t-il. Résultat ? Des appuis moins francs, une vitesse moins explosive. Depuis Sölden, le champion a travaillé précisément ce point avec son staff.
Le déclic ? Des séances intensives à Tignes puis deux semaines complètes à Copper Mountain dès le 19 novembre. Là-bas, sous le soleil du Colorado, les chronos sont tombés. D’abord quelques dixièmes gagnés manche après manche, puis des scratches complets le matin. Des repères concrets qui redonnent le sourire à celui qui reste l’un des skieurs les plus titrés de l’histoire française.
La confiance, cette variable invisible
En ski alpin, la confiance n’est pas un vain mot. C’est elle qui autorise à décaler le point de déclenchement, à laisser filer le ski plus longtemps avant de déclencher la prise d’angle. Pinturault le dit lui-même : il faut « déverrouiller » cette retenue instinctive née de la peur de retomber. Chaque entraînement réussi agit comme une brique supplémentaire dans la reconstruction mentale.
« Quand on arrive à faire le scratch sur la matinée, ce sont des points de repère concrets qui montrent que les choses évoluent. »
Alexis Pinturault
Ces mots résument parfaitement l’état d’esprit actuel. On sent le compétiteur reprendre le dessus sur le convalescent.
Un groupe France qui pousse dans le bon sens
Autre élément positif : l’équipe de France de géant vit une dynamique intéressante. À Sölden, Thibaut Favrot signait un superbe top 5 et le jeune Flavio Vitale pointait déjà dixième. Des performances qui tirent tout le monde vers le haut. Pinturault insiste sur cette émulation : « On a un groupe en formation, avec beaucoup de jeunes, mais qui a montré de très belles choses. On peut tous s’appuyer dessus. »
Dans un sport aussi individuel que le ski alpin, cette solidarité technique change la donne. Les échanges, les vidéos, les retours d’expérience permettent à chacun de progresser plus vite. Et quand le leader historique retrouve ses moyens, l’effet est démultiplié.
Copper Mountain, un terrain particulier
La piste de Copper Mountain n’est pas la plus technique du circuit, mais elle demande une glisse parfaite et une gestion fine de la vitesse. Altitude élevée (plus de 3 000 mètres au départ), neige souvent rapide, virages larges : tout repose sur la capacité à maintenir une trajectoire propre dès les premiers mètres.
Pour Pinturault, habitué des pistes plus tournantes, c’est un exercice différent. Mais c’est aussi une opportunité : sur ce type de tracé, les skieurs en pleine confiance peuvent creuser des écarts importants. Le Français arrive avec deux semaines d’acclimatation et d’entraînement sur place, un avantage non négligeable.
Objectifs mesurés mais ambition intacte
Interrogé sur ses attentes précises, le Savoyard reste prudent : « Je n’ai pas d’objectifs chiffrés. L’idée, c’est que ça progresse toujours. » Une réponse typique de celui qui sait que la régularité viendra avec le temps. Mais derrière cette modestie apparente, on sent l’envie de retrouver le chemin du podium rapidement.
Car Pinturault n’a pas oublié qu’il reste le dernier Français vainqueur du gros globe de cristal (2021). À 34 ans, il possède encore la marge technique et l’expérience pour embêter les meilleurs, Marco Odermatt en tête. Le Suisse, déjà impressionnant en super-G la veille, sera le grand favori. Mais un Pinturault en confiance peut toujours créer la surprise.
La sélection tricolore, futur casse-tête
Un commentaire glissé sur les réseaux par un internaute met le doigt sur une réalité : l’équipe de France est devenue dense. Entre les anciens (Pinturault, Mathieu Faivre), les trentenaires solides (Favrot) et les jeunes qui explosent (Vitale, Léo Anguenot…), les places pour les grandes échéances vont devenir chères. Quatre places seulement pour les Jeux olympiques en géant : la concurrence interne s’annonce féroce.
Pinturault, avec son palmarès et son aura, bénéficiera forcément d’une certaine considération. Mais dans le sport de haut niveau, rien n’est jamais acquis. Chaque course devient un argument supplémentaire. Copper Mountain pourrait donc être plus qu’un simple géant de reprise : un vrai tournant dans la saison du Français.
Ce qu’il faut retenir avant la course
- Sölden (18e) a servi de révélateur plus que de contre-performance
- Deux semaines d’entraînement intensif à Copper Mountain
- Chronos en nette progression, scratches réalisés
- Confiance technique retrouvée sur le timing d’attaque
- Groupe France performant qui tire tout le monde vers le haut
- Pas d’objectif chiffré mais envie évidente de performer
Le géant hommes débute ce vendredi à 18 heures heure locale (21 heures en France). Pinturault portera le dossard 12 lors de la première manche. Suffisant pour observer les premiers passages et ajuster ? Ou assez haut pour imposer son rythme dès le début ? Réponse dans quelques heures.
Une chose est sûre : le champion français arrive avec le sourire et les jambes. Reste à transformer tout cela en centièmes. Et quand on s’appelle Alexis Pinturault, on sait que c’est souvent une question de déclic. Le Colorado pourrait bien être le théâtre de ce déclic tant attendu.









