La vice-présidence des Philippines traverse une période de turbulences alors qu’une troisième plainte en destitution vient d’être déposée contre Sara Duterte. Un groupe composé de sept prêtres catholiques est à l’origine de cette nouvelle procédure, ajoutant aux accusations de corruption et de complot d’assassinat déjà portées contre la numéro deux du pays.
Selon des sources proches du dossier, la plainte accuse Mme Duterte d’avoir « dépensé de façon anormale » des millions de dollars de fonds publics, à la fois dans l’exercice de ses fonctions de vice-présidente mais aussi lorsqu’elle était à la tête du ministère de l’Éducation. Plus grave encore, les plaignants affirment qu’elle aurait ourdi un complot visant à assassiner l’actuel président, Ferdinand Marcos.
Une procédure de destitution controversée
Pour les prêtres à l’origine de la plainte, la destitution est devenue « la ligne de défense nécessaire et ultime contre la corruption aux plus hauts échelons de la fonction publique ». Ils estiment que Sara Duterte « ne peut pas être vice-présidente une minute de plus » au vu des faits qui lui sont reprochés.
Cependant, les chances de succès d’une telle procédure restent incertaines à ce stade. Pour aboutir, la destitution doit être approuvée par au moins un tiers des députés de la chambre basse du parlement, puis votée par les deux tiers des sénateurs. Or, la commission de la justice de la chambre basse a indiqué qu’aucune des trois plaintes déposées contre Mme Duterte n’avait encore fait l’objet d’une audience publique, un préalable indispensable à tout vote.
L’implosion d’une alliance politique
Cette avalanche de procédures contre Sara Duterte intervient alors que l’alliance nouée entre sa famille et celle du président Marcos semble avoir volé en éclats ces derniers mois. Pressentie un temps pour briguer la présidence, Mme Duterte avait finalement renoncé au profit de Ferdinand Marcos, fils de l’ancien dictateur du même nom, avant d’être élue vice-présidente à ses côtés en 2022.
Mais les relations se sont nettement dégradées à l’approche des élections de mi-mandat prévues l’an prochain. En novembre dernier, Sara Duterte avait choqué en déclarant publiquement avoir donné l’ordre de tuer Ferdinand Marcos s’il lui arrivait malheur. Des propos qu’elle a ensuite tenté de minimiser, évoquant l’expression de sa « consternation » face aux échecs du gouvernement.
Un avenir politique en suspens
Face à la tempête, le président Marcos a tenté de calmer le jeu, estimant qu’une destitution de sa vice-présidente ne « contribuerait pas à améliorer la vie d’un seul Philippin ». Il a publiquement appelé les députés à ne pas donner suite aux plaintes, qualifiant l’affaire de simple « tempête dans un verre d’eau ».
Mais l’avenir politique de Sara Duterte n’en reste pas moins incertain. Héritière d’une dynastie politique sulfureuse – son père Rodrigo Duterte a présidé le pays de 2016 à 2022 -, elle se retrouve aujourd’hui empêtrée dans de sérieuses accusations à quelques mois d’un scrutin crucial. Même si la procédure de destitution n’aboutit pas, le parfum de scandale risque de coller durablement à son image et de compromettre ses ambitions.
Les développements des prochaines semaines seront donc décisifs. Entre tensions au sommet de l’État, accusations de corruption et complots allégués, c’est toute la vie politique philippine qui se retrouve sous haute tension. Et au cœur de la tourmente, Sara Duterte joue désormais son avenir et sa survie politique.