Imaginez un instant : vous êtes soldat américain déployé dans une zone de guerre, et soudain, vous apprenez que des informations sensibles sur votre prochaine mission ont circulé sur une simple application de messagerie grand public. C’est exactement ce que reprochent aujourd’hui de hauts responsables au secrétaire à la Défense des États-Unis, Pete Hegseth. Entre fuites potentielles, frappes controversées et relations exécrables avec l’état-major, le ministre se retrouve au cœur d’une tempête qui menace jusqu’à la cohésion de l’armée américaine.
Un Ministre Dans le Viseur de Tous les Camps
Depuis plusieurs semaines, Pete Hegseth accumule les casseroles. Ancien animateur de télévision reconverti en homme fort de la défense nationale, il incarnait pourtant la rupture promise par la nouvelle administration. Mais les critiques pleuvent désormais de toutes parts : opposition démocrate, mais aussi républicains modérés et, surtout, une partie de l’appareil militaire lui-même.
Le malaise est tel que même des figures influentes du parti majoritaire commencent à prendre leurs distances. Le leader de la majorité sénatoriale républicaine a ainsi refusé, à deux reprises en quelques jours, de renouveler publiquement sa confiance au ministre. Un silence assourdissant qui en dit long sur la gravité de la situation.
L’affaire Signal : Quand la Sécurité Opérationnelle Passe Après la Communication
Tout a commencé avec une découverte aussi banale qu’inquiétante. Avant des frappes aériennes contre des positions au Yémen, des échanges classifiés ont transité via l’application Signal, connue pour son chiffrement mais loin d’être approuvée pour des communications secret-défense.
Un rapport interne indépendant du Pentagone a conclu que cette pratique avait « potentiellement compromis des informations » et aurait pu « mettre en danger le personnel et les missions » en cas d’interception par une puissance étrangère. L’erreur est d’autant plus grave qu’un journaliste a été ajouté par inadvertance à l’un de ces groupes de discussion, révélant l’existence de ces échanges au grand jour.
La défense du ministre repose sur un argument juridique : il disposait de l’autorité nécessaire pour déclassifier certaines informations. Son entourage insiste : aucune donnée réellement classifiée n’aurait été partagée. « Affaire classée », a même tranché Pete Hegseth lui-même sur les réseaux sociaux. Pourtant, dans les couloirs du Pentagone, nombreux sont ceux qui y voient une légèreté inacceptable.
« L’utilisation de Signal avait potentiellement compromis des informations (…), ce qui aurait pu mettre en danger le personnel et les missions si elles avaient été divulguées à un adversaire étranger. »
Rapport interne du Pentagone
Frappes Contestées : Des Opérations Antidrogue aux Accents d’Exécutions
Mais l’affaire Signal n’est que la partie émergée de l’iceberg. Une autre opération, bien plus sombre, met le secrétaire à la Défense dans une position intenable. En mer des Caraïbes, un navire suspecté de trafic de drogue a été frappé par l’armée américaine. Jusque-là, rien que de très classique dans la lutte antidrogue.
Sauf que le bâtiment a été touché une deuxième fois, délibérément, pour achever les survivants de la première salve. Une pratique qui évoque furieusement les exécutions extrajudiciaires et qui choque profondément, y compris au sein des forces armées.
Interrogé sur ces images, le président américain lui-même a marqué une certaine gêne. S’il affirme avoir autorisé leur diffusion, il dit « ne pas savoir » ce qu’elles montrent exactement et refuse clairement d’endosser l’idée d’achever des survivants. « Je soutiens la destruction des bateaux », précise-t-il toutefois, dans une pirouette qui en dit long sur l’embarras de l’exécutif.
Un Amiral Irreprochable Transformé en Fusible ?
Officiellement, c’est l’amiral commandant les opérations spéciales qui a pris la décision de frapper une seconde fois. Un officier aux états de service exemplaires, décoré et respecté. Mais dans les couloirs du Congrès comme du Pentagone, beaucoup y voient une manœuvre grossière : faire porter le chapeau à un subordonné pour protéger le ministre.
L’intéressé doit d’ailleurs être auditionné par des parlementaires. Une audition sous haute tension qui pourrait sceller le sort de plusieurs carrières. Car transformer un amiral de ce rang en bouc émissaire suscite la colère : chez les démocrates, évidemment, mais aussi chez de nombreux républicains et, surtout, au sein même de l’institution militaire.
Les opérations contestées en quelques points :
- Navire suspecté de trafic de drogue en mer des Caraïbes
- Première frappe américaine
- Seconde frappe délibérée sur les survivants
- Validation directe par le secrétaire à la Défense
- Refus présidentiel d’endosser l’achèvement des survivants
Un Climat Délétère Entre le Politique et l’État-Major
Depuis le retour de l’administration Trump, les relations entre le pouvoir civil et les hauts gradés n’ont cessé de se dégrader. Des dizaines de généraux et amiraux ont été limogés ou mis à la retraite forcée. Une réunion particulièrement musclée a même vu le secrétaire à la Défense tancer vertement plusieurs centaines d’officiers supérieurs.
Son message était clair : finies les règles d’engagement « politiquement correctes », place à la « létalité maximale » et au « bon sens » des combattants sur le terrain. Un discours martial qui a séduit une partie de l’électorat, mais qui a profondément heurté la culture militaire américaine, habituée à un certain respect de la chaîne de commandement et des lois de la guerre.
Le départ, présenté comme une retraite classique, d’un amiral commandant la zone Caraïbes, illustre parfaitement ce malaise. Des sources internes affirment qu’il s’agit en réalité d’une mise à l’écart décidée par Pete Hegseth lui-même, après des mois de tensions croissantes.
Vers une Crise Institutionnelle Majeure ?
Au-delà du sort personnel du secrétaire à la Défense, c’est toute la chaîne de commandement qui semble vaciller. Quand un ministre perd la confiance d’une partie de ses troupes et que même le président prend soin de marquer ses distances, la situation devient explosive.
Les prochaines auditions au Congrès, les prochaines révélations, risquent de transformer cette série d’affaires en véritable crise politique. Car dans une démocratie, l’armée reste soumise au pouvoir civil. Mais quand ce pouvoir civil perd la confiance de ceux qui portent l’uniforme, les conséquences peuvent être lourdes.
Pour l’instant, Pete Hegseth s’accroche. Ses soutiens les plus fervents continuent de le présenter comme l’homme du renouveau, celui qui ose enfin secouer une institution jugée trop timorée. Mais chaque jour qui passe renforce l’impression que le ministre joue sa survie politique.
Et dans ce bras de fer inédit entre un secrétaire à la Défense controversé et une partie de l’appareil militaire qu’il est censé diriger, une seule certitude : les prochaines semaines seront décisives. Pour Pete Hegseth, pour l’administration Trump, et peut-être pour l’image même des forces armées américaines.
À retenir :
Une série d’affaires graves fragilise le secrétaire à la Défense Pete Hegseth : utilisation contestée de Signal pour des communications sensibles, validation de frappes visant à achever des survivants, limogeages en série et climat exécrable avec l’état-major. Même au sein du camp républicain, les soutiens s’effritent. L’issue de cette crise pourrait marquer durablement les relations civilo-militaires aux États-Unis.









