Le calvaire judiciaire de Ksenia Karelina, une citoyenne russo-américaine de 33 ans, vient de connaître un nouveau rebondissement en Russie. Condamnée en première instance à 12 ans de prison pour “trahison” le 15 août dernier, elle espérait voir sa peine réduite en appel. Mais lundi, le tribunal de la région de Sverdlovsk a rejeté son recours, rendant le verdict initial exécutoire.
Selon une source proche du dossier, le “crime” de Mme Karelina ? Avoir effectué en février 2022, au moment du déclenchement de l’offensive russe en Ukraine, un don d’environ 50 euros à Razom, une ONG fournissant une assistance matérielle aux Ukrainiens. Les autorités russes affirment que cet argent a permis l’achat d’équipements militaires par les forces ukrainiennes.
Une décision “d’une cruauté rancunière” pour Washington
La condamnation initiale avait provoqué l’ire de Washington, qui avait dénoncé “la cruauté rancunière” du jugement. Les États-Unis accusent Moscou de prendre délibérément leurs ressortissants pour cible afin de les utiliser comme monnaie d’échange contre des Russes détenus à l’étranger.
D’ailleurs, le 1er août dernier, le plus grand échange de prisonniers depuis la Guerre froide avait eu lieu entre la Russie et les Occidentaux. Des journalistes américains et opposants russes détenus en Russie avaient été libérés en échange d’agents russes présumés emprisonnés en Occident.
Le parcours de Ksenia Karelina
Ksenia Karelina, originaire d’Ekaterinbourg dans l’Oural, vivait en Californie depuis plus de dix ans et avait même obtenu la nationalité américaine. C’est lors d’un séjour en Russie en février 2024 pour rendre visite à ses grands-parents qu’elle a été arrêtée.
Selon le tribunal, l’accusée a “entièrement reconnu sa culpabilité”. Mais avec cette confirmation en appel de sa lourde peine, son sort illustre la sévérité accrue de la justice russe dans les affaires de “trahison” ou “d’espionnage” depuis le début du conflit ukrainien.
Une répression tous azimuts en Russie
Et Mme Karelina est loin d’être un cas isolé. Depuis février 2022, les autorités russes multiplient les arrestations et condamnations pour des motifs souvent liés, de près ou de loin, à une opposition supposée à l'”opération militaire spéciale” en Ukraine.
Des milliers de personnes ont ainsi été sanctionnées, menacées ou emprisonnées pour avoir critiqué le conflit, avec souvent de très lourdes peines à la clé. Une répression qui touche aussi bien les militants que de simples citoyens s’étant exprimés contre la guerre, sur les réseaux sociaux notamment.
Le durcissement de l’arsenal législatif, avec l’adoption de nouvelles lois sur les “fake news”, “l’extrémisme” ou la “trahison”, a fourni un cadre légal à cette vague répressive. L’affaire Ksenia Karelina, avec sa peine confirmée malgré un appel, en est une illustration frappante. Car en Russie aujourd’hui, même un modeste don humanitaire peut se transformer en crime d'”État”.