Alors que les regards sont tournés vers le futur des négociations climatiques internationales, une ombre inquiétante plane sur les pays qui accueilleront les prochaines conférences des parties (COP). Selon un rapport de l’ONG Oil Change International, les Émirats arabes unis, l’Azerbaïdjan et le Brésil, respectivement hôtes des COP 28, 29 et 30, prévoient d’augmenter leur production d’énergies fossiles de 32% d’ici 2035. Une révélation qui jette le trouble sur la cohérence entre les engagements climatiques et les actes.
Un écart préoccupant entre paroles et actes
Quelques mois seulement après l’accord de la COP 28 en faveur d’une sortie progressive des énergies fossiles, la « troïka des présidences de COP » que forment les Émirats, l’Azerbaïdjan et le Brésil avaient pourtant annoncé vouloir « améliorer la coopération et la continuité » des négociations climatiques pour limiter le réchauffement à 1,5°C. Mais derrière ces déclarations d’intention, les plans énergétiques de ces pays vont à l’encontre de l’objectif affiché :
- Le Brésil prévoit d’augmenter sa production de pétrole et gaz de 36% par rapport à 2023
- Les Émirats arabes unis envisagent une hausse de 34% de leurs énergies fossiles
- L’Azerbaïdjan table sur une augmentation de 14% de sa production
Pourtant, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) est claire : pour ne pas dépasser 1,5°C de réchauffement, la production mondiale de combustibles fossiles doit diminuer de près de 55% d’ici 2035. Un objectif qui semble compromis par les projets des pays hôtes des futures COP.
Un « terrible exemple » pour les autres pays
Au-delà de l’impact direct de ces plans de production, c’est le signal envoyé à la communauté internationale qui inquiète Oil Change International. Shady Khalil, un responsable de l’ONG, souligne le risque que la « troïka » fait peser sur l’objectif qu’elle est censée défendre :
En poursuivant leurs projets d’exploitation des énergies fossiles, la troïka risque de compromettre l’objectif dont elle est censée être la gardienne et de donner un terrible exemple aux autres pays.
Car si ces pays en première ligne des négociations climatiques ne montrent pas l’exemple, comment convaincre les autres nations de s’engager résolument dans une transition énergétique ?
Une responsabilité partagée avec les pays du Nord
Mais la responsabilité ne pèse pas uniquement sur les épaules des pays hôtes des COP. L’ONG épingle aussi les pays riches, en particulier les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Norvège et le Royaume-Uni, qui pourraient être à l’origine de 50% de la pollution au carbone issue des nouveaux projets d’hydrocarbures d’ici 2050.
Pour Oil Change International, une action immédiate et coordonnée de l’ensemble de ces acteurs est indispensable pour espérer une « élimination mondiale juste et équitable des combustibles fossiles ». Un défi colossal, qui passera par des choix forts des présidences de COP, censées ouvrir la voie. Le futur des négociations climatiques mondiales en dépend.
Un révélateur des enjeux géopolitiques de l’énergie
Au-delà des engagements climatiques, ces révélations mettent en lumière les enjeux géopolitiques et économiques sous-jacents dans les discussions sur la transition énergétique. Délaisser les énergies fossiles implique de profonds changements pour des pays dont les économies et l’influence reposent en grande partie sur l’or noir. Un défi majeur, qui nécessitera une coopération internationale renforcée et des mécanismes de soutien pour engager ces nations vers un nouveau modèle de développement.
Les révélations d’Oil Change International ont donc le mérite de mettre en lumière les défis colossaux qui attendent la communauté internationale dans la lutte contre le dérèglement climatique. Des paradoxes aux lourdes conséquences, qui devront être surmontés pour espérer maintenir un monde viable. Les présidences de COP seront plus que jamais scrutées et attendues pour impulser une dynamique vertueuse. Un défi à la hauteur de l’urgence climatique.