À quelques jours du lancement de la campagne présidentielle au Cameroun, une question intrigue : où est le chef d’État, figure centrale de cette élection ? Âgé de 92 ans, il a quitté son pays pour un séjour privé en Europe, laissant derrière lui un vide politique et des interrogations. Ce départ, à l’aube d’une échéance électorale cruciale, alimente les spéculations sur sa santé, son engagement et les dynamiques qui entourent sa candidature.
Un Président au Cœur des Débats
Le président camerounais, au pouvoir depuis plus de quatre décennies, brigue un huitième mandat lors de l’élection prévue le 12 octobre. Cette longévité exceptionnelle en fait une figure à la fois emblématique et controversée. Pourtant, sa récente absence du pays, annoncée comme un voyage privé, soulève des questions sur sa capacité à mener une campagne active. Selon des sources diplomatiques, il aurait rejoint Genève, une destination qu’il fréquente depuis des décennies pour des séjours prolongés.
Cette escapade européenne intervient dans un contexte délicat. Alors que la campagne électorale s’ouvre officiellement, l’opposition, bien que divisée, tente de s’organiser pour contester son pouvoir. Mais l’absence du président, combinée à son âge avancé, alimente un sentiment de frustration parmi les citoyens et les observateurs.
Un Voyage Qui Fait Jasé
Le départ du président pour l’Europe, annoncé par un communiqué officiel, n’a pas manqué de susciter des réactions. Genève, ville prisée par le chef d’État, est devenue synonyme de ses absences prolongées. Une enquête menée par un consortium de journalistes a révélé qu’il aurait passé près de quatre ans et demi de sa présidence à l’étranger, souvent dans des hôtels de luxe comme l’InterContinental. Ces séjours, estimés à des dizaines de millions de dollars, contrastent avec les défis économiques et sociaux auxquels fait face le Cameroun, où un quart de la population vit sous le seuil de pauvreté.
Chaque jour, des Camerounais meurent dans des conditions difficiles. Comment peut-il se reposer tranquillement à Genève, aux frais du contribuable ?
Diosky Moresmo, porte-parole de la Brigade anti-sardinards Belgique
Ce contraste alimente la colère de certains Camerounais, notamment ceux de la diaspora. Une manifestation est prévue à Genève pour dénoncer ce séjour, perçue comme une provocation face aux difficultés quotidiennes des citoyens, comme le manque d’accès à l’eau, à l’électricité ou aux soins de santé.
Une Campagne à Distance
Alors que la campagne électorale bat son plein, le président reste loin des projecteurs. Son parti, le RDPC, prévoit des meetings, notamment dans l’extrême nord du pays, mais sa participation reste incertaine. Cette absence physique contraste avec la stratégie de son entourage, qui semble orchestrer sa campagne à distance. Depuis l’annonce de sa candidature en juillet, il n’a pas directement interagi avec les électeurs, préférant une communication minimaliste.
Certains analystes estiment que cette discrétion est stratégique. Selon Davis Kiwuwa, expert en études internationales, rester en retrait permet de maintenir une certaine aura d’autorité tout en évitant les critiques sur son état de santé. Cette approche rappelle les leçons tirées de performances publiques jugées décevantes par d’autres dirigeants âgés à l’international.
Pourquoi cette absence intrigue-t-elle ?
- Santé scrutée : À 92 ans, chaque déplacement est analysé comme un indice de sa condition physique.
- Contexte électoral : L’élection approche, et son absence pourrait affaiblir sa campagne.
- Tensions sociales : Les séjours coûteux en Europe alimentent le mécontentement populaire.
Une Opposition en Mal d’Unité
Face à un président quasi absent, l’opposition camerounaise peine à s’unir. Malgré des discussions répétées, aucun candidat consensuel n’a émergé pour défier le chef d’État sortant. Cette fragmentation, observée depuis des décennies, constitue un obstacle majeur pour ceux qui souhaitent un changement politique. Arrey Elvis Ntui, analyste pour International Crisis Group, souligne cette frustration :
Beaucoup de Camerounais sont frustrés que l’opposition, qui tente depuis près de 30 ans de remplacer le président, ne soit toujours pas en mesure de se mettre d’accord.
Arrey Elvis Ntui
Cette division profite au président, qui reste le grand favori de l’élection. Cependant, l’absence d’un adversaire uni pourrait également réduire l’enthousiasme électoral, dans un pays où la participation est souvent faible.
Tensions Familiales et Scandales
Au-delà de la politique, ce voyage intervient dans un contexte familial troublé. La fille du président, Brenda, a récemment fait parler d’elle en publiant une vidéo où elle demandait aux Camerounais de ne pas voter pour son père. Bien que rapidement supprimée, cette déclaration a provoqué un tollé avant que la jeune femme ne présente des excuses publiques, affirmant son ignorance en matière de politique.
Ce n’est pas la première fois que Brenda fait les gros titres. En juin, elle a été condamnée pour diffamation à Genève après une plainte déposée par une artiste camerouno-nigériane. Ces incidents mettent en lumière la vie fastueuse de la famille présidentielle en Europe, souvent perçue comme déconnectée des réalités camerounaises.
Un Contexte Social Explosif
Le Cameroun fait face à des défis majeurs : pauvreté, crises sécuritaires dans certaines régions, et infrastructures défaillantes. Dans ce contexte, les séjours répétés du président à l’étranger sont perçus comme une insulte par une partie de la population. Les opposants, comme la Brigade anti-sardinards, dénoncent l’utilisation des fonds publics pour financer ces voyages, alors que les besoins de base restent insatisfaits.
| Problèmes au Cameroun | Impact sur la population |
|---|---|
| Pauvreté | 25 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. |
| Infrastructures | Manque d’accès à l’eau et à l’électricité dans plusieurs régions. |
| Santé | Hôpitaux sous-équipés, accès limité aux soins. |
Cette situation attise les tensions sociales et renforce le sentiment d’injustice. Les manifestations prévues à Genève témoignent de l’exaspération croissante d’une partie de la diaspora, qui appelle à un changement radical.
Quel Avenir pour le Cameroun ?
Alors que l’élection approche, le Cameroun se trouve à un carrefour. L’absence prolongée de son président, combinée à une opposition désorganisée, laisse peu de place à un débat politique constructif. Pourtant, les enjeux sont immenses : développement économique, stabilité sociale et renouvellement du leadership.
Le président, malgré son âge et ses absences, conserve une emprise sur le pouvoir, soutenue par un parti bien implanté et un système politique verrouillé. Mais les critiques, tant au sein du pays qu’à l’étranger, s’intensifient. La question reste ouverte : jusqu’à quand cette stratégie d’absence pourra-t-elle perdurer ?
Points clés à retenir
- Absence remarquée : Le président est en Europe à l’aube de la campagne électorale.
- Opposition fragmentée : L’incapacité à s’unir affaiblit les chances de changement.
- Tensions sociales : Les séjours coûteux à l’étranger exacerbent le mécontentement.
- Enjeux familiaux : Les frasques de la famille présidentielle alimentent les controverses.
En définitive, l’absence du président camerounais à l’approche de l’élection soulève des questions fondamentales sur la gouvernance et l’avenir du pays. Entre stratégie politique, défis sociaux et tensions familiales, le Cameroun retient son souffle à l’aube de cette échéance décisive.
