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Palawan Face à l’Exploitation Minière : Un Combat Écologique

À Palawan, l'exploitation minière menace rizières et forêts. Un moratoire de 50 ans peut-il sauver l'île ? Découvrez les enjeux écologiques et sociaux d'une lutte cruciale...

Imaginez une île où les rizières verdoyantes côtoient des montagnes éventrées, où les pangolins disparaissent et où les inondations ravagent les terres ancestrales. À Palawan, aux Philippines, ce contraste dramatique est une réalité quotidienne. Cette île, souvent décrite comme un paradis tropical, est au cœur d’un dilemme : préserver sa beauté naturelle ou céder à l’exploitation minière qui promet des richesses, mais à quel prix ?

Palawan : Un Trésor Naturel sous Pression

Palawan, dans l’ouest des Philippines, est une destination touristique prisée pour ses plages immaculées et ses forêts luxuriantes. Mais sous cette surface idyllique se cachent de vastes gisements de nickel, un minerai essentiel pour les batteries des véhicules électriques et la production d’acier inoxydable. Cette richesse attire les compagnies minières, mais menace l’équilibre écologique et les moyens de subsistance des communautés locales.

Depuis des générations, des familles comme celle de Moharen Tambiling cultivent des rizières dans des paysages autrefois préservés. Aujourd’hui, ces terres sont bordées par des amas de terre extraits des mines, et les conséquences se font sentir. « Les animaux disparaissent, les fleurs aussi », déplore Moharen, dont les paroles résonnent comme un cri d’alarme face à un écosystème en péril.

Un Moratoire pour Sauver l’Île

Face à cette menace, les autorités de Palawan ont pris une décision audacieuse : un moratoire de 50 ans sur les nouvelles demandes d’exploitation minière, adopté à l’unanimité en mars dernier. Ce moratoire vise à freiner l’expansion d’une industrie qui, bien que lucrative, laisse derrière elle des cicatrices environnementales et sociales.

« Nous voyons les effets à long terme de l’exploitation minière dans le sud de Palawan », explique Nieves Rosento, ancienne conseillère et fervente défenseure du moratoire.

Ce n’est pas la première fois que les Philippines tentent de réguler cette industrie. En 2021, le pays a levé une interdiction de neuf ans sur les nouvelles licences minières, ce qui a déclenché une vague de demandes. Cependant, les bénéfices économiques escomptés restent faibles : les exportations de minerais représentent moins de 2 % du PIB national. À Palawan, les promesses d’emplois et de prospérité peinent à convaincre une population de plus en plus méfiante.

Les Conséquences sur les Communautés Locales

Pour les habitants comme Alayma, sœur de Moharen Tambiling, l’exploitation minière a bouleversé les moyens de subsistance. Mère célibataire de six enfants, elle gagnait autrefois un revenu décent en vendant des homards pêchés près de la côte. Aujourd’hui, une jetée minière a remplacé son lieu de pêche, et l’indemnisation proposée – environ 1 800 euros – est jugée dérisoire face à la perte de ses revenus.

« Toute notre communauté dépendait de cette zone », témoigne Alayma, dont la voix traduit à la fois colère et désespoir. Les peuples autochtones, en particulier, sont touchés de plein fouet. Selon l’ONG Global Witness, un cinquième des terres autochtones des Philippines est concerné par des permis d’exploitation ou de prospection minière.

Chiffre clé : Entre 2001 et 2024, Palawan a perdu 219 000 hectares de couverture forestière, selon Global Forest Watch.

Une Nature Dévastée par la Déforestation

Les opérations minières ont des effets dévastateurs sur l’environnement. Les montagnes déboisées pour extraire le nickel provoquent des inondations décrites comme « redoutables, profondes et rapides » par les habitants. Ces catastrophes, exacerbées par la perte de couverture forestière, menacent les rizières et les villages environnants.

Une entreprise, active dans la région d’Ipilan, a été sanctionnée pour avoir abattu des arbres dans des zones protégées. Malgré cela, ses activités se poursuivent, et les plaintes déposées auprès de sa société mère restent sans réponse. Cette impunité alimente la frustration des communautés locales, qui se sentent abandonnées face à une industrie puissante.

Les Promesses Non Tenues de l’Industrie Minière

Les compagnies minières, comme celle opérant à Rio Tuba, mettent en avant des bénéfices économiques : royalties pour les communautés, recettes fiscales, et développement d’infrastructures comme des ports et des hôpitaux. « Nous avons transformé un marais en une localité moderne », affirme un représentant de l’entreprise, vantant les mérites d’une exploitation soi-disant responsable.

Mais ces promesses sonnent creux pour beaucoup. Kennedy Coria, un habitant illettré, raconte recevoir chaque année quelques kilos de riz en guise de compensation pour les bénéfices de la mine. « C’est tout ce qu’on nous donne », déplore-t-il. Nieves Rosento va plus loin : « Certains peuples autochtones n’ont reçu aucune royaltie depuis dix ans. »

Impact Conséquence
Déforestation Perte de 219 000 hectares de forêt entre 2001 et 2024
Inondations Rizières et villages menacés par des crues soudaines
Perte de biodiversité Disparition de pangolins, phacochères et oiseaux

Un Équilibre Précaire : Progrès ou Préservation ?

L’exploitation minière à Palawan illustre un dilemme mondial : comment concilier la demande croissante en minerais, notamment pour les technologies vertes, avec la préservation des écosystèmes ? Jeminda Bartolome, une métayère militante, résume bien cette tension : « Les véhicules électriques réduisent la pollution, mais à quel prix pour nos terres ? »

Le moratoire pourrait bloquer environ 70 projets miniers couvrant 240 000 hectares, selon Grizelda Mayo-Anda, avocate spécialisée en droit de l’environnement. Cependant, il n’empêchera pas l’expansion des mines existantes, comme celle de Rio Tuba, ni les activités en cours à Ipilan. De plus, une récente décision de la Cour suprême, annulant une interdiction similaire dans une province voisine, soulève des inquiétudes quant à l’avenir du moratoire.

Vers un Avenir Durable ?

Le combat de Palawan dépasse les frontières de l’île. Il incarne une lutte universelle pour protéger les écosystèmes face aux pressions économiques. Les habitants, soutenus par des militants et des défenseurs de l’environnement, appellent à une exploitation minière plus responsable et à une meilleure redistribution des bénéfices.

Pour l’instant, le moratoire offre un répit, mais son efficacité reste incertaine. Les habitants comme Moharen, Alayma et Kennedy continuent de vivre au rythme des promesses non tenues et des paysages transformés. Leur histoire nous rappelle une vérité essentielle : la richesse des sous-sols ne doit pas se faire au détriment de celle des écosystèmes et des communautés.

En résumé :

  • Palawan adopte un moratoire de 50 ans pour limiter l’exploitation minière.
  • La déforestation et les inondations menacent les écosystèmes et les communautés.
  • Les peuples autochtones reçoivent peu ou pas de compensations.
  • Le moratoire pourrait bloquer 70 projets, mais les mines existantes continuent.

Palawan se tient à un carrefour. Entre la préservation de son patrimoine naturel et les pressions de l’industrie, l’île incarne un combat qui résonne bien au-delà de ses rivages. La question demeure : le moratoire suffira-t-il à protéger ce joyau des Philippines, ou n’est-ce qu’un premier pas dans une lutte de longue haleine ?

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