Lors d’un discours devant les députés nouvellement élus, le président ouzbek Chavkat Mirzioïev a surpris en annonçant sa volonté de « raviver l’opposition » au sein du Parlement. Une déclaration inattendue dans ce pays d’Asie centrale encore considéré par de nombreuses ONG comme ayant un régime autoritaire, et ce malgré des promesses récentes de libéralisation politique.
Une ouverture politique en demi-teinte
Élu en 2016 à la tête de cette ex-république soviétique de 35 millions d’habitants, Chavkat Mirzioïev a entamé une politique d’ouverture après des décennies d’isolement relatif. Des réformes économiques ont été lancées pour attirer les investissements étrangers et développer des secteurs comme le tourisme.
Mais sur le plan politique, les avancées restent timides. Les récentes élections législatives en sont une illustration :
- Seuls 5 partis loyaux au président étaient autorisés à présenter des candidats
- Sans surprise, le parti présidentiel a remporté ce scrutin
- Les observateurs de l’OSCE ont déploré un « environnement politique limité n’offrant pas de véritable choix aux électeurs »
Au Parlement, le chef de l’État a maintenant décidé d’accorder « une fois par trimestre aux députés de l’opposition de poser au moins une question au gouvernement ». Un premier pas certes, mais encore loin d’un véritable pluralisme politique.
Une société civile et des médias sous contrôle
Au-delà des institutions, la mainmise du pouvoir sur la société reste forte en Ouzbékistan :
- L’opposition politique comme la société civile demeurent quasi-inexistantes
- La presse et l’économie sont toujours majoritairement contrôlées par l’État
- Au classement mondial de la liberté de la presse de RSF, le pays a rechuté à la 148e place en 2024
Et les autorités viennent d’annoncer l’introduction prochaine d’un « examen moral » pour vérifier les contenus des médias, de la musique ou encore du cinéma avant leur diffusion. Une mesure inquiétante dans ce pays musulman et laïc.
La longue marche vers la démocratie
Malgré ces freins, certains observateurs veulent voir dans le discours présidentiel un signe d’espoir. Accorder ne serait-ce qu’un peu de place à la contradiction au Parlement serait un premier pas symbolique vers plus de débat démocratique.
Mais le chemin sera long pour que l’Ouzbékistan, habitué depuis son indépendance à un pouvoir centralisé et autoritaire, devienne un pays où l’opposition joue pleinement son rôle. Les prochains mois diront si Chavkat Mirzioïev est prêt à aller au-delà des paroles et à engager de vraies réformes politiques.
Son souhait de “raviver l’opposition” est un premier signal encourageant. Mais il faudra bien plus pour transformer en profondeur le système politique ouzbek. La communauté internationale suivra de près l’évolution de la situation et les actes concrets du président pour juger de sa sincérité et du chemin que prend le pays sur la voie de la démocratisation.