À Châtillon-sur-Chalaronne, charmante commune médiévale de l’Ain, l’ouverture prochaine d’un collège privé hors contrat pour filles fait couler beaucoup d’encre. La Maison d’éducation Pauline Marie Jaricot, qui accueillera ses premières élèves en septembre, se distingue par une pédagogie très traditionaliste d’inspiration catholique qui suscite de vives critiques.
Une pédagogie genrée controversée
Jupes longues en dessous du genou obligatoires, épaules couvertes, interdiction du pantalon et du décolleté… Le code vestimentaire strict imposé aux jeunes filles n’est que la partie émergée de l’iceberg. L’établissement prévoit également des cours de couture, de cuisine, d’art floral ou encore de droit pour “valoriser la féminité” et préparer les élèves à leur “vocation spécifique”.
On éduque pas forcément garçons et filles de la même façon. Les filles ont une longueur d’avance, ce n’est pas sexiste c’est juste que les gens ne veulent pas voir la vérité.
Thérèse Madi, fondatrice de l’école
Cette vision de l’éducation, profondément genrée, passe mal auprès de nombreux détracteurs qui dénoncent une pédagogie rétrograde et sexiste. Des militants laïques se sont même rassemblés devant la mairie pour manifester leur opposition au projet.
Un établissement hors contrat d’inspiration traditionaliste
Bien que privée et hors contrat, la maison Jaricot n’échappe pas pour autant à tout contrôle. Un délai d’opposition de 3 mois court actuellement, pendant lequel la préfecture, la mairie ou le parquet peuvent encore s’opposer à son ouverture. Passé ce délai, un contrôle du rectorat est prévu dès la première année pour vérifier le respect du socle commun de connaissances.
L’établissement se revendique d’une approche intégriste du catholicisme, selon le rite traditionnel Pie V. La fondatrice et directrice, Thérèse Madi, organise des colonies chaque été depuis 10 ans et est arrivée dans l’Ain il y a 4 ans avec son mari, proche du mouvement controversé Civitas, dissous en 2023 pour ses thèses jugées antisémites et islamophobes.
Entre demande de pédagogie alternative et dérives potentielles
Si une école pour garçons de même sensibilité existe depuis 40 ans à proximité sans faire de vagues, l’ouverture de ce collège pour filles cristallise davantage les passions dans le contexte actuel. Certains y voient la réponse à une demande locale pour une éducation alternative quand d’autres craignent la dérive vers un communautarisme religieux.
Au début j’ai été étonné de la démarche de création d’une école tradi du début du XXe siècle. Mais ce n’est pas une nouveauté ici.
Patrick Mathias, maire LR de Châtillon-sur-Chalaronne
Pour l’heure, une dizaine de familles auraient inscrit leur fille pour la rentrée de septembre. L’établissement restera sous haute surveillance pour s’assurer qu’au-delà des choix pédagogiques qui interrogent, il ne verse pas dans des dérives contraires aux valeurs de la République. Un équilibre délicat entre liberté d’enseignement et respect du socle éducatif commun.