Imaginez un instant : vous marchez main dans la main avec votre enfant dans un lieu animé, un centre commercial bondé ou une fête foraine. Vous détournez les yeux une seconde, et il disparaît. La panique vous envahit, votre cœur bat à tout rompre. Maintenant, imaginez que ce cauchemar dure depuis près de deux ans. C’est la réalité déchirante de familles comme celle de Kobi Kalfon, dont le fils Segev, 27 ans, est retenu captif à Gaza depuis l’attaque du 7 octobre 2023. Ce jour-là, 251 personnes ont été enlevées par le Hamas et le Jihad islamique lors d’une offensive brutale en Israël, marquant le début d’un calvaire qui perdure pour 49 otages encore détenus, dont 27 sont présumés morts.
Un Silence Brisé par la Douleur
Longtemps, des familles comme les Kalfon ont choisi la discrétion, évitant les projecteurs des médias et les rassemblements publics. Leur douleur était intime, presque inavouable. Mais quelque chose a changé. Les retours d’otages libérés lors d’une trêve en février 2024 ont bouleversé leur approche. Certains captifs ont révélé avoir eu accès à la télévision pendant leur détention, une information qui a frappé Kobi Kalfon comme un électrochoc. « Segev ne pouvait pas m’entendre, ni entendre sa mère », confie-t-il, la voix tremblante. Ce constat l’a poussé à sortir de l’ombre pour crier son désespoir et maintenir l’espoir que son fils l’entende, d’une manière ou d’une autre.
Le Drame du Festival Nova
Segev Kalfon était au mauvais endroit au mauvais moment. Le 7 octobre 2023, il participait au festival de musique Nova, un événement festif qui s’est transformé en scène d’horreur. Plus de 370 personnes y ont perdu la vie, massacrées par les combattants du Hamas. Segev, lui, a été arraché à sa vie, emmené de force dans les tunnels ou les caches de Gaza. Depuis, sa famille vit dans une attente insoutenable, suspendue à des nouvelles qui ne viennent pas. « Quand j’entends ce qu’il pourrait vivre là-bas, je suis au bord de l’effondrement », murmure Kobi, les yeux rivés sur une photo de son fils.
« Mon cœur s’est arrêté le 7 octobre. »
Kobi Kalfon, père de Segev
À Dimona, dans le sud d’Israël, la maison familiale est devenue un sanctuaire dédié à Segev. Sa chambre, figée dans le temps, déborde de symboles d’espoir : livres religieux, talismans, dessins d’enfants envoyés par des inconnus solidaires. Un message, écrit d’une main enfantine, proclame : « On attend Segev. » Un sac de sport noir, rempli de ses affaires, trône près de la porte, prêt pour le jour où il reviendra. « J’ai la foi, je crois qu’il reviendra », répète Kobi, comme une prière.
Une Boulangerie, Symbole de Résilience
À Arad, la boulangerie familiale est un autre lieu où le souvenir de Segev est omniprésent. Son visage souriant orne les t-shirts des employés, une grande affiche à l’entrée, et même une fresque peinte sur un mur. « Il s’entendait avec tout le monde », raconte Kobi avec fierté. Segev, bien que fils du patron, se comportait comme un employé ordinaire, gagnant le respect de ses collègues et clients. La boulangerie reflète un microcosme de la société israélienne, où se croisent des employés bédouins musulmans et des clients juifs ultra-orthodoxes, unis dans un même élan de solidarité.
La boulangerie des Kalfon est plus qu’un commerce : c’est un lieu de mémoire et d’espoir, où chaque pain pétri semble porter un vœu pour le retour de Segev.
Un Cri d’Espoir dans les Rues de Tel Aviv
La douleur des familles ne se limite pas aux Kalfon. À Tel Aviv, des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées récemment pour exiger la libération des otages. Parmi elles, Ofir Breslevski, père de Rom, un autre otage, a pris la parole pour la première fois. Longtemps silencieux, il a interpellé directement le Premier ministre israélien : « Ça suffit ! Prenez une décision, mettez fin à la guerre et ramenez tout le monde ! » Sa voix, portée par la foule, incarnait la frustration et l’urgence d’un peuple confronté à l’inaction.
« Vous êtes un dirigeant, alors prenez cette décision ! »
Ofir Breslevski, père de Rom
Ce rassemblement a été déclenché par la diffusion de vidéos choquantes par le Hamas et le Jihad islamique, montrant des otages amaigris, à bout de forces. Ces images ont ravivé le débat en Israël sur la nécessité d’un accord urgent pour leur libération. Mais les négociations, complexes et freinées par des intérêts politiques divergents, piétinent. Les familles, elles, continuent de vivre dans l’angoisse, suspendues à un appel qui pourrait changer leur vie.
Les Défis des Négociations
La situation des otages est au cœur d’un conflit géopolitique complexe. Le Hamas exige des concessions majeures, notamment la fin des hostilités et la libération de prisonniers palestiniens, tandis qu’Israël insiste sur la neutralisation des capacités militaires du groupe. Entre ces positions, les otages et leurs familles sont pris en étau. Voici les principaux obstacles aux négociations :
- Exigences divergentes : Les deux parties campent sur des positions difficilement conciliables.
- Pression internationale : Les appels à un cessez-le-feu se multiplient, mais sans consensus clair.
- Impact humanitaire : La détérioration des conditions de détention des otages complique les discussions.
Pour les familles, chaque jour sans nouvelles est une épreuve. Pourtant, elles refusent de perdre espoir. « On attend cet appel 24 heures sur 24 », confie Kobi Kalfon, les yeux fixés sur son téléphone, comme si la sonnerie pouvait retentir à tout moment.
Une Société Unie dans la Douleur
Le drame des otages transcende les clivages. Dans la boulangerie des Kalfon, clients et employés de toutes origines se réunissent, partageant un même souhait : le retour des captifs. Ce lieu, comme tant d’autres en Israël, incarne une solidarité nationale face à l’adversité. Les dessins d’enfants, les messages de soutien, les prières : tout converge vers un même objectif, celui de ramener les otages chez eux.
Date clé | Événement |
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7 octobre 2023 | Attaque du Hamas, 251 otages enlevés |
Février 2024 | Trêve, libération de certains otages |
Août 2025 | Rassemblements massifs pour exiger un accord |
Vers un Dénouement ?
Alors que les mois passent, la pression monte. Les familles, autrefois silencieuses, élèvent désormais la voix, portées par une détermination farouche. Elles savent que chaque jour qui passe rapproche leurs proches d’un sort incertain, mais aussi d’une possible libération. Les vidéos récentes, bien que choquantes, ont eu un effet paradoxal : elles ont galvanisé l’opinion publique et ravivé l’urgence d’une solution.
Pour Kobi Kalfon, l’attente est une torture, mais aussi une source d’espoir. Il continue de préparer le retour de Segev, gardant son sac prêt, sa chambre intacte. « On attend cet appel tous les jours », répète-t-il, comme un mantra. Dans cette attente, il y a toute la force d’un père, d’une famille, d’une nation qui refuse de plier face au désespoir.
Ce drame, bien plus qu’un fait divers, est le reflet d’une crise humaine et politique aux ramifications profondes. Les familles des otages, par leur courage et leur résilience, rappellent au monde que derrière les chiffres et les négociations, il y a des vies, des histoires, des espoirs brisés mais jamais éteints.