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Opération Militaire Massive en Cisjordanie Nord

L’armée israélienne lance une vaste opération antiterroriste dans le nord de la Cisjordanie. Bouclages, tirs nourris, accusations graves… Mais pourquoi maintenant, et jusqu’où cela va-t-il aller ? La tension est à son paroxysme.

Imaginez-vous réveillé au milieu de la nuit par le grondement sourd des bulldozers et le vrombissement des drones. C’est ce qu’ont vécu des milliers d’habitants du nord de la Cisjordanie dans la nuit du mardi au mercredi. Sans préavis, l’armée israélienne a déclenché une opération d’envergure présentée comme « antiterroriste ». Bouclages, raids simultanés, tirs : la région de Toubas est devenue, en quelques heures, le nouveau théâtre d’une confrontation qui ne semble jamais vouloir s’éteindre.

Une opération « vaste » et soudaine dans une zone déjà sous tension

Dès les premières heures de mercredi, l’armée israélienne a annoncé le lancement d’une « vaste opération antiterroriste » dans le nord de la Cisjordanie occupée. Le communiqué militaire est clair : les forces déployées « ne permettront pas au terrorisme de s’implanter » dans cette région. Mais derrière cette formule officielle se cache une réalité bien plus brutale pour les habitants.

À Toubas, Tammoun, Tayassir et dans le camp de réfugiés de Faraa, les accès ont été coupés. Des monticules de terre fraîchement retournés barrent les routes. Des véhicules blindés stationnent aux entrées des villes. Pour beaucoup de familles, impossible de sortir ou de rentrer chez soi.

Que reproche exactement l’armée israélienne aux groupes locaux ?

Si l’armée reste discrète sur les objectifs précis, elle évoque la présence de cellules armées préparant des attaques. Des précédents existent : en septembre dernier, des opérations similaires avaient été justifiées par la neutralisation d’individus suspectés de planifier des attentats. Cette fois encore, le schéma semble identique.

Côté palestinien, on dénonce une punition collective. Le gouverneur de Toubas, Ahmad Assaad, parle d’une ville « bouclée » et de tirs délibérés sur des immeubles résidentiels. Des témoignages font état de l’utilisation d’un aéronef de combat et de mitrailleuses lourdes à Tammoun. Des accusations que l’armée n’a pas commentées dans l’immédiat.

« Ils ont tiré avec des mitrailleuses lourdes sur des civils, visant des immeubles résidentiels. »

Gouverneur Ahmad Assaad, au téléphone depuis Toubas

Une région agricole prise dans l’étau de l’occupation

Le gouvernorat de Toubas n’est pas un bastion urbain comme Jénine ou Naplouse. C’est une zone majoritairement rurale, où l’agriculture reste le principal moyen de subsistance. Oliviers, champs de blé, élevage : voilà le quotidien de milliers de familles. Pourtant, depuis plusieurs mois, cette tranquillité relative a volé en éclats.

Le camp de réfugiés de Faraa, au sud de Toubas, concentre particulièrement les tensions. Créé après 1948, il abrite aujourd’hui plusieurs milliers de personnes. En février 2025, une opération israélienne y avait déjà provoqué le déplacement temporaire de centaines d’habitants. Aujourd’hui, le scénario se répète.

Un timing qui interroge : pourquoi maintenant ?

La trêve entrée en vigueur à Gaza le 10 octobre dernier était censée apaiser l’ensemble des territoires. Pourtant, en Cisjordanie, la violence n’a jamais vraiment baissé. Octobre a même été marqué par un pic des attaques de colons, le plus élevé en près de vingt ans selon l’ONU.

Le 10 novembre, un Israélien était tué et trois autres blessés dans une attaque au couteau près de Bethléem. Les deux assaillants palestiniens avaient été abattus sur place. Ce type d’événement, combiné à la crainte d’une contagion de la résistance armée, semble avoir convaincu l’état-major israélien d’agir préventivement dans le nord.

Bilan humain : des chiffres qui donnent le vertige

Depuis l’attaque du 7 octobre 2023 et le début de la guerre à Gaza, la Cisjordanie a basculé dans une spirale meurtrière sans précédent. Plus d’un millier de Palestiniens y ont été tués – combattants, mais aussi très nombreux civils – par l’armée ou par des colons. De l’autre côté, au moins 43 Israéliens ont perdu la vie dans des attaques ou lors d’opérations militaires.

Ces chiffres froids cachent des drames humains immenses. Des familles détruites, des villages entiers traumatisés, une jeunesse qui grandit sous occupation et sous le feu.

À retenir :

  • Plus de 1 000 Palestiniens tués en Cisjordanie depuis octobre 2023
  • Pic historique des violences de colons enregistré en octobre 2025
  • La trêve à Gaza n’a pas stoppé l’escalade en Cisjordanie

Et demain ? Vers une nouvelle Intifada ?

La question brûle toutes les lèvres. Chaque grande opération dans le nord de la Cisjordanie ces derniers mois a été suivie d’une recrudescence des affrontements. Les jeunes des camps, armés ou non, défient ouvertement les incursions. Les réseaux sociaux relayent les images de drones abattus, de cocktails Molotov, de funérailles devenues manifestations.

Dans ce contexte, l’opération actuelle risque de faire office de détonateur. Les habitants de Toubas et des villages voisins le savent : chaque bouclage dure plus longtemps que le précédent. Chaque raid laisse derrière lui des maisons détruites, des blessés, parfois des morts.

Et pendant ce temps, la communauté internationale observe, condamne parfois mollement, mais reste largement impuissante face à une occupation qui dure depuis 1967 et qui, plus de cinquante ans après, continue de produire les mêmes scènes de chaos.

La nuit tombe sur Toubas. Les monticules de terre sont toujours là. Les soldats aussi. Et dans les maisons, des familles retiennent leur souffle, attendant la prochaine explosion ou le prochain coup de feu. Dans cette partie du monde, la paix semble toujours repousser ses limites, un jour de plus.

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