Des détonations d’artillerie lourde rompent le silence glacial de l’Arctique finlandais. D’après une source proche du dossier, l’OTAN y mène actuellement son plus grand exercice militaire jamais organisé dans la région, déployant des milliers de soldats à proximité immédiate de la frontière russe. Cette opération, baptisée “Dynamic Front 25”, est perçue par beaucoup comme une démonstration de force face au voisin russe dans un contexte de tensions accrues.
Un exercice d’une ampleur inédite en Arctique
Jusqu’à 3600 soldats venus des États-Unis, du Royaume-Uni, de France et d’autres pays membres de l’Alliance Atlantique participent tout au long du mois à des exercices de tir réels en Laponie finlandaise. Ce déploiement massif s’inscrit dans le cadre plus large de “Dynamic Front 25”, le plus grand exercice d’artillerie jamais mené par l’OTAN en Europe, mobilisant au total près de 5000 soldats sur plusieurs théâtres d’opérations, de la Finlande à la Pologne en passant par l’Estonie et l’Allemagne.
Pour un chercheur de l’Institut finlandais des affaires internationales cité par l’AFP, ces manœuvres visent clairement à envoyer un message à la Russie :
Ces entraînements de l’OTAN sont de plus en plus destinés à montrer à d’autres pays, surtout à la Russie, que l’Alliance est unie et capable de défendre ses membres.
– Joel Linnainmaki, chercheur à l’Institut finlandais des affaires internationales
L’adhésion de la Finlande attise les tensions
Cet exercice sans précédent intervient dans un contexte particulier pour la Finlande. Le pays nordique, qui partage pas moins de 1340 km de frontière avec la Russie, a en effet choisi de tourner le dos à des décennies de non-alignement militaire pour rejoindre l’OTAN en 2022, en réaction directe à l’invasion de l’Ukraine par Moscou. Une décision qui a suscité l’ire du Kremlin, voyant dans ce rapprochement une provocation et une menace pour sa sécurité.
En accueillant “Dynamic Front 25” sur son sol, la Finlande marque donc une étape symbolique majeure en tant que nouveau membre de l’Alliance Atlantique. C’est la première fois qu’un exercice militaire otanien de cette envergure se déroule en territoire finlandais.
Interopérabilité et préparation au combat arctique
Selon le colonel Janne Makitalo, qui pilote les opérations en Finlande, l’objectif principal de ces manœuvres est double. Il s’agit d’une part de renforcer l’interopérabilité entre alliés, en particulier au niveau des unités d’artillerie. D’autre part, l’accent est mis sur l’entraînement des troupes aux conditions extrêmes de l’environnement arctique.
L’artillerie est la pièce maîtresse du champ de bataille, comme l’expérience des combats en Ukraine nous l’a montré.
– Colonel Janne Makitalo
Interrogé sur le risque de provoquer la Russie en déployant un tel dispositif militaire à ses portes, le colonel Makitalo se veut rassurant, affirmant qu’il ne s’agit pas d’une « quelconque démonstration de force », même si de facto l’adhésion finlandaise a ajouté « 280 000 soldats » au flanc nord de l’OTAN.
Rovajarvi, un terrain d’entraînement unique en Europe
C’est à Rovajarvi, dans un paysage désolé recouvert d’une fine couche de neige et de glace, que les troupes otaniennes ont pris position. Avec plus de 1000 km2, ce champ de tir et zone d’entraînement est le plus vaste d’Europe, offrant des conditions uniques pour simuler de véritables situations de guerre.
Malgré des températures pouvant descendre jusqu’à -20°C l’hiver, les forces armées finlandaises, réputées pour leur adaptation au froid extrême, sont dans leur élément. Le lieutenant Antti-Matti Puisto, chef de la section de tir de la brigade finlandaise de Carélie, insiste sur l’importance de maintenir la chaleur en portant plusieurs couches de vêtements et en gardant les campements au sec.
Pour le sergent Olli Myllymaki, conscrit finlandais qui vient de terminer une série d’exercices de tir au moyen de chars K9, la portée historique de l’événement ne fait aucun doute : « Nous sommes en train d’écrire l’Histoire », affirme-t-il avec fierté.
Une opération sous haute surveillance
Si l’OTAN se défend de toute volonté de provocation, nul doute que cet exercice d’une ampleur inédite en Arctique est scruté de très près par Moscou. Dans un contexte de tensions déjà exacerbées par la guerre en Ukraine et l’adhésion finlandaise à l’Alliance Atlantique, “Dynamic Front 25” apparaît comme un nouveau point de friction potentiel entre l’Occident et la Russie.
Reste à savoir comment le Kremlin réagira à cette démonstration de force à ses frontières. Une chose est sûre : en choisissant l’Arctique comme théâtre d’opérations pour son plus grand exercice militaire, l’OTAN envoie un signal fort sur sa détermination à défendre chaque pouce du territoire de ses membres, même dans les contrées les plus reculées et les plus hostiles.